Blog 2023 01/ Podcast S5 E1 : La taille d’hiver des rosiers

Vers la mi-mars, une fine équipe est réunie au Jardin des Merlettes pour un des premiers stages de l’année : la taille d’hiver des rosiers. Tour à tour, les élèves taillent des rosiers miniature et paysagers, puis des rosiers buisson et des rosiers haut buisson et demi tiges, et enfin des rosiers grimpants et lianes. 
Au début, les élèves sont timides : cette taille si radicale ne va-t’elle pas achever les rosiers après le froid bien rude de l’hiver ? Et s’ils ne repoussaient pas, ou de façon déséquilibrée ? C’est une question qui revient à chaque atelier, qu’il s’agisse d’arbustes décoratifs, de rosiers ou d’arbres fruitiers. Beaucoup d’élèves hésitent à tailler, de peur d’abîmer leurs arbustes.
Alors, pour répondre à cette question fondamentale, prenons les choses dans l’ordre : Pourquoi, quand et comment tailler les rosiers ?

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Rosier ‘Fantin Latour’

Et déjà, pourquoi taille t’on ?

Les principes de taille sont guidés par le fonctionnement cellulaire des plantes et, en particulier, celui de leurs cellules souches, c’est à dire ces cellules indifférenciées à partir desquelles toutes les autres se développent. Elles aident à réparer l’organisme mais aussi lui permettent de grandir. Ces cellules souches sont présentes dans le méristème des plantes, qui sont les zones de division cellulaire. Or le méristème n’est pas réparti de la même façon dans tous les végétaux. Il peut être présent dans leur apex (leur bourgeon terminal) alors que pour d’autres c’est à la base de la plante que tout se joue. Dans le premier cas, le végétal est qualifié d’acrotone (beaucoup d’arbres, le pin maritime par exemple) et dans le second cas, de basitone. Les rosiers font partie de cette deuxième catégorie. Bien entendu, il existe une infinité de catégories intermédiaires entre ces deux extrêmes. 

Alors que l’on gêne énormément le développement d’une plante acrotone si on l’étête, un chêne, un bouleau, par exemple ; en revanche, une plante basitone repart de plus belle si on la recèpe, c’est-à-dire si on supprime régulièrement ses rameaux à la base. C’est le cas des rosiers. Ses branches ne sont pas pérennes mais ont un cycle de vie de quelques années seulement. Au fil des années, un rameau de rosier vieillit. La sève circule moins bien, il porte moins de fleurs puis se dessèche complètement. La durée de vie d’une branche de rosier est d’environ quatre à cinq ans pour un rosier buisson, un peu plus longtemps pour un rosier grimpant. Mais même ceux-ci gagnent à être renouvelés régulièrement par une taille au pied de l’une ou l’autre de ses branches charpentières.

L’objectif principal de la taille du rosier est donc de conserver et même renforcer sa basitonie, c’est-à-dire lui permettre d’émettre régulièrement de nouveaux rameaux à partir de son pied. Et attention, quand on dit ‘de son pied’ on parle de son point de greffe, d’où l’importance de celui-ci.

Une autre question qui préoccupe beaucoup nos élèves, c’est celle du calendrier : quand est-il préférable de tailler ?

Les avis diffèrent. Au Jardin des Merlettes, nous distinguons entre la taille sur éléments inertes et celle sur éléments vivants.

Pour les éléments inertes, c’est-à-dire les branches mortes, on taille dès qu’on peut. C’est une taille de nettoyage, très utile. On la fait si possible dès qu’on remarque un élément mort sur un rosier. C’est autant de temps de gagné pour la taille proprement dite, sans compter que c’est plus agréable à faire quand il fait encore bon, à l’automne par exemple, qu’en plein hiver.

Pour les éléments vivants, la taille d’hiver est une taille assez radicale. Comme on l’a expliqué il y a un instant, on cherche à relancer la basitonie de l’arbuste en le taillant court et en éliminant les branches les plus âgées. Il est donc recommandé d’effectuer ce travail quand l’arbuste est au repos et qu’un maximum de sève est descendue dans ses racines, donc plutôt en hiver.

En conséquence, le ‘meilleur’ moment pour tailler dépend en premier lieu, de l’endroit où est situé le jardin et donc du climat environnant. Si le temps est froid (mais hors gel), la taille d’un arbuste n’entraîne pas de réaction de sa part. En revanche, si le temps est doux, une taille favorise le départ de la plante. Attention donc si vous habitez dans une région où le climat est souvent très doux en févier mais suivi par un retour des gelées. Dans ce cas, le fait de tailler en février risque de favoriser une pousse hâtive… qui gèlera en mars. Et vous devrez tailler de nouveau pour supprimer ces pousses gelées. Autrement dit, la taille fait dans ce cas plus de mal que de bien : elle fatigue l’arbuste et vous avez travaillé pour rien. C’est pour cette raison que le stage de taille de rosiers est organisé vers la fin mars au Jardin des Merlettes, plutôt qu’en février où il nous arrive régulièrement de travailler en T shirt au jardin.

Le moment de tailler dépend aussi bien entendu du moment auquel le jardinier est disponible. Il doit organiser ses priorités entre toutes ses tâches en fonction de sa présence dans son jardin. En particulier s’il s’agit d’une maison de campagne ou de vacances, il n’a pas forcément la possibilité de tailler en hiver. D’expérience les rosiers sont assez tolérants. On cherche à respecter autant que possible leur cycle annuel de croissance, mais mieux vaut tailler à contre temps que pas du tout. En revanche, en ce qui concerne les tailles de rénovation, c’est à dire les tailles de restructuration sur des rosiers grimpants qui ont été laissés à eux-mêmes plusieurs années de suite, autant que possible, on évitera d’effectuer ces tailles pendant la période de croissance. Si l’on n’a pas d’autre choix que d’effectuer une telle taille en été, on évitera les périodes de forte chaleur et on arrosera le rosier copieusement. Et l’on fera peut-être en deux ou trois fois (c’est-à-dire en répartissant sur deux ou trois ans, ce que l’on aurait pu faire en une seule fois en hiver.

Taille d’un rosier grimpant ‘Mme Meilland’

Les rosiers NON remontants sont un cas particulier, on ne les taille pas en hiver mais en juillet, après leur floraison. Ils produiront pendant l’été les pousses qui fleuriront en mai de l’année suivante. 

Bien entendu, on ne taille pas les nouvelles pousses des rosiers grimpants, on se contente de les attacher en les arquant pour une floraison plus abondante et bien répartie. 

Une situation particulière concerne les travaux qui seraient à effectuer sur ou autour d’une maison sur laquelle pousse un rosier grimpant. Souvent les artisans demandent que le rosier soit sévèrement rabattu pour ne pas gêner leur échafaudage. Il faut autant que possible prévoir cette situation, tailler le rosier très bas, mais à la bonne période, c’est-à-dire hors végétation pour que les rosiers souffrent le moins possible. Même si les travaux sont décalés dans le temps, par exemple, s’ils ont lieu en été, le fait d’avoir taillé pendant la période de dormance aura permis à l’arbuste de conserver un maximum de sève. Il va émettre de nouvelles pousses qui seront souples et faciles à haubaner pendant les travaux, et repartira très vite une fois les travaux achevés et l’échafaudage supprimé.

Et maintenant que l’on est bien d’accord qu’il faut agir et qu’on sait à peu près quand le faire, pratiquement, comment s’y prend on ?

On applique toujours la même méthode : on commence par un diagnostic. Et pour cela, on observe le rosier pour évaluer sa vigueur. A-t-il porté beaucoup de roses durant la saison précédente ? Et on répertorie les pousses de l’année passée (leur nombre, leur force, leur longueur …). Ensuite, on regarde s’il y a des parties abîmées : blessées, mortes, ou même dévorées par des animaux ou des insectes.

Puis, et c’est bien spécifique aux rosiers, on examine l’état du point de greffe, c’est-à-dire cet endroit où une variété particulière de rose a été greffée sur un porte greffe d’églantier par exemple. Ce point est vital pour le rosier car c’est là que se concentre le méristème dont on a parlé tout à l’heure et c’est donc de là que partent les nouvelles pousses du rosier. Alors on observe : le point de greffe est-il dégagé ou au contraire est-il enterré ? Porte-t-il de la mousse ? Dans les pays froids, il est d’usage de recouvrir en hiver le pied des rosiers, c’est-à-dire de le buter légèrement pour protéger le point de greffe du froid. Mais lorsque le printemps arrive, il faut dégager ce pied pour qu’il reçoive les rayons du soleil. C’est un peu fastidieux mais bien utile. 

Après ce premier diagnostic, on prépare le rosier à la taille.

Pour observer le rosier, on commence par le dégager du haut en bas. On arrache les mauvaises herbes au pied, comme on vient de le voir, mais on enlève également les ronces ou petites lianes qui s’y seraient invitées à notre insu

Le point de greffe doit être bien apparent : si ce n’est pas le cas, on le dégage doucement en suivant le tracé des tiges en partie enterrées jusqu’à arriver à leur origine. Cet exercice réserve souvent des surprises tant les tiges sont parfois enterrées loin de leur départ. J’ai vu reprendre avec une bonne vigueur tellement de vieux rosiers tout décatis simplement après un bon soin au pied pour dégager le point de greffe qui avait fini par se perdre, enterré sous la terre et les mauvaises herbes.

Dégager le pied du rosier sert également à repérer et éliminer les gourmands. En effet les gourmands sont des rejets du porte greffe, c’est-à-dire du rosier sauvage sur lequel le rosier est greffé. Ils ne partent donc pas du rosier greffé mais leur origine se situe en dessous du point de greffe ou sur les racines du porte greffe. En nettoyant soigneusement le point de greffe, on peut facilement faire la différence. Une exception concerne les rosiers botaniques. En effet, comme ce sont des rosiers naturels, c’est-à-dire qui ne sont pas greffés, ils peuvent drageonner librement, et toutes ces pousses sont autant de rosiers botaniques que vous pouvez transplanter ailleurs dans votre jardin ou donner. Cette remarque n’est pas fortuite car certains rosiers botaniques ont vraiment tendance à voyager tout autour de leur point de départ, voire à devenir un peu envahissants si on n’y prend pas garde. Toujours par rapport au point de greffe, on vérifie aussi à quelle hauteur il se situe par rapport au niveau du sol. En effet, autant le point de greffe lui-même doit être exposé au soleil à la belle saison, autant toutes les racines doivent, elles, être enterrées, comme c’est le cas pour la plupart des ligneux. Attention donc aux rosiers plantés trop hauts et dont les racines partiellement exposées au soleil pourraient souffrir gravement pendant la canicule.

La taille proprement dite

Une fois que tous les préparatifs ont été effectués et le diagnostic posé, la taille elle même est vraiment très simple et rapide.

Les rosiers buissons :

Voici quelques photos de rosiers avant la taille. Comme on l’a expliqué, le rosier est un arbuste basitone, c’est à dire qu’il est capable de repousser rapidement et de reconstituer une structure à partir de sa base.

La taille d’hiver est donc l’occasion annuelle de supprimer les branches vieillies, abîmées ou cassées. On sélectionne ensuite soigneusement les branches à conserver, environ 5 à 9, selon la force du rosier. On les choisit de façon à ce qu’elles se placent bien les unes par rapport aux autres et puissent se développer harmonieusement. Puis on raccourcit l’ensemble.

Les rosiers grimpants

Le clou de la session est la taille et le palissage du rosier grimpant ‘Aimée Vibert’, sur la pergola, puis la régénération d’un très vieux rosier grimpant ‘Madame Meilland’. Le rosier est parfaitement capable de ‘repercer’ sur vieux bois. Cela permet de diminuer l’envergure de cet arbuste, devenu trop haut par rapport au mur de soutien. En l’absence d’un support solide, les branches pourraient se trouver emportées en cas de tempête.

En hiver, on peut tailler très sévèrement un rosier âgé : il formera des pousses à partir des yeux latents situés tout le long de son tronc. C’est une particularité de cette plante bien utile à connaître. Donc, pas de panique si une tempête, des travaux ou d’autres aléas viennent à endommager vos beaux rosiers. Une taille nette pour permettre à la blessure de bien cicatriser, et c’est reparti ! Attention cependant, ceci n’est pas applicable aux rosiers ‘tige’ : si la plante est abîmée en dessous de son point de greffe, c’est un églantier qui repousserait… Et si la plante a été sectionnée (suite à un accident) pendant la saison chaude, pensez à l’arroser abondamment.

Taille et palissage du rosier grimpant ‘Aimé Vibert’

Les pousses mettront quelques semaines, voire un ou deux mois après la taille pour percer sur le vieux bois des rosiers. Elles se développeront ensuite vigoureusement et le travail du jardinier consistera à les conduire doucement vers la forme souhaitée, en pergola ou contre une façade. C’est un travail soigneux et un peu périlleux car ces tiges nouvelles sont très cassantes. Il fait l’objet du stage du mois de septembre où les élèves drapent les grands rosiers pour une floraison ‘bluffante’ au printemps suivant. Nous y reviendrons dans un prochain article/podcast.

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Blog 2022 12 : La taille d’hiver des arbres fruitiers palissés

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Le mois de mars ouvre la saison des tailles au Jardin des Merlettes. La taille d’hiver est une étape très importante pour les arbres fruitiers palissés.
Pourquoi tailler en mars, plutôt qu’en janvier ou février ? S’il ne gèle pas, on peut tailler pendant toute la saison d’hiver. Tout dépend du nombre d’arbres que l’on doit tailler. Pour ne pas imposer de fatigue inutile aux arbres, il vaut mieux tailler les arbres à pépins avant l’éclosion des boutons floraux (un stade appelé E par les arboriculteurs, comme sur la photo ci-dessous), c’est-à-dire, en Puisaye, avant la mi-avril. Que ce soit pour les formes libres (de plein vent) ou les formes palissées, la taille d’hiver se préoccupe de la structure de l’arbre : formation, raccourcissement annuel ou rénovation plus importante, voire élagage. La taille d’été, effectuée éventuellement en plusieurs fois, se concentrera sur la mise à fruits. Contrairement à ce que croient la plupart des gens non initiés, la taille des arbres fruitiers ne correspond pas à un acharnement mais à une nécessité. Pour plus d’information à ce sujet, nous vous référons à notre podcast de mai 2019

Cordon horizontal unilatéral Reinette Blanche du Vina

La taille régulière annuelle

Les jardiniers s’inquiètent souvent de la difficulté supposée de la taille des arbres palissés. Mais cette taille n’est pas du tout si compliquée que l’on croit. Il faut simplement respecter quelques étapes. C’est ce que l’on examine en détail durant les deux jours du stage de taille d’hiver des arbres fruitiers palissés que nous proposons au jardin en début de printemps chaque année.

Voir le stage de taille d’hiver des arbres fruitiers palissés

La première étape consiste à bien comprendre ce que l’on va faire : pourquoi et quels éléments tailler ? La réponse à ces questions conditionne la façon de tailler. Pour une taille renouvelée régulièrement tous les ans, on cherche simplement àrapprocher les branches autour d’une certaine forme de charpente. Une grande partie du travail consistera donc à réduire chaque coursonne pour canaliser la vitalité de l’arbre vers les organes productifs. Une autre étape consiste donc à savoir reconnaître chaque organe de l’arbre fruitier que l’on va tailler. Et pour la troisième étape on réfléchit aux possibilités d’évolution de chaque organe identifié : ceux qui deviendront du bois et formeront des rameaux, ceux qui se transformeront en boutons à fruits, et ceux qui végèteront peut-être. Quand tout cela est reconnu et trié, on peut tailler.

Il s’agit donc d’un processus analytique, assez lent au départ, le temps d’acquérir le coup d’oeil . Une fois que l’on a compris la méthode, le coup de main vient assez vite. Et bien sûr, mieux un arbre a été taillé l’année précédente, plus il est simple à tailler, surtout si une taille d’été a également été effectuée.

La forme la plus simple : le cordon

Le cordon est la forme la plus simple à tailler car il s’agit de former une branche charpentière toute droite. On procède doucement, en laissant ces branches charpentières s’allonger peu à peu. Pour cela, on taille chaque année leur extrémités, aussi appelées “prolongements”, de façon à ne garder chaque année qu’une volée de bourgeons. L’emplacement des bourgeons le long d’une branche suit en effet un schéma bien précis, toujours le même pour une même variété. Pour le pommier par exemple, ce schéma est hélicoïdal, comme un escalier à vis. Entre un bourgeon situé face à vous sur la branche et le suivant placé de la même façon, il y en a 4 à 6 autres. Observez vos arbres, vous reconnaîtrez vite ce schéma. Cet arrangement géométrique spécifique des bourgeons le long de la branche s’appelle la phyllotaxie.

L’objectif de la taille annuelle est d’installer une forme “en arêtes de poisson”, c’est-à-dire d’obtenir qu’à tour de rôle, une coursonne pousse sur la droite du cordon, puis une autre à gauche, pas de coursonne sur le dessus du cordon, et pas de coursonne en dessous. Comme l’implantation des bourgeons le long de la branche répond toujours à la même géométrie, le fait de choisir toujours un bourgeon orienté de la même façon à droite puis à gauche résulte en un écartement des coursonnes qui reste sensiblement le même tout au long du cordon. Cette régularité constitue un élément esthétique important dans la taille des arbres fruitiers.

Pour nous assurer que ce processus analytique est bien compris, nous demandons pendant nos stages à chaque élève tour à tour d’expliquer ce qu’il voit et pourquoi il propose telle ou telle solution. Plusieurs alternatives sont souvent possibles. Une fois que la taille est effectuée, on vérifie les liens tout le long du cordon car celui-ci a augmenté de diamètre depuis la taille de l’année ou de l’été précédent. Et on finit en raccourcissant les prolongements des charpentières. L’exemple ci-dessous montre la taille d’un pommier ‘Reine des Reinettes Bonnin’ conduit en cordon simple bilatéral.

Le résultat peut sembler un peu dépouillé; pourtant, dès le mois de septembre, on constate que l’arbre a une belle vigueur et que nos efforts ont porté leurs fruits. Les arbres palissés du Jardin des Merlettes ont été plantés en novembre 2006 et les formes en cordons simples ou multiples portent maintenant régulièrement des fruits. Les formes en fuseaux sont encore en formation mais portent des fruits dans la partie inférieure des arbres comme ci-dessous, ce poirier ‘Beurré Hardy’.

Fuseau Beurré Hardy

Des formes un peu plus difficiles : croisillons, U et palmettes

Pour ces formes, la difficulté provient de la nécessité de créer des angles : il faut donc tailler les charpentières de façon à ce qu’elles produisent des pousses dans la direction nécessaire. Une fois les pousses obtenues, on attache soigneusement les jeunes branches en les dirigeant simplement avec un lien souple (du raphia par exemple) pour installer la forme. On reviendra plusieurs fois pour ajuster la forme peu à peu en resserrant le lien, à l’occasion  de la taille d’été par exemple. Mais on attendra que le bois soit bien aoûté l’été suivant pour utiliser un lien rigide.

Pour chaque forme, tri croisillon, cordon à plusieurs étages ou palmette, il faut anticiper la pousse de l’année et comprendre comment l’arbre va évoluer. Dans certains cas (photo ci dessous, au milieu), on pratique une taille d’attente car on n’installera un étage supérieur que lorsque l’étage inférieur aura achevé sa pousse.

Comme pour les formes en cordons, on ne laisse les branches charpentières s’allonger que d’une vingtaine de centimètres au plus chaque année. Si, pour les cordons horizontaux on enlève les rameaux sur et sous le cordon, pour les cordons verticaux, il faut supprimer les rameaux qui poussent soit sur le devant, soit sur l’arrière des branches. Ces précautions permettent aux coursonnes latérales de s’installer du haut en bas des branches charpentières et d’assurer ainsi une bonne production fruitière avec un fruit tous les 15 cm environ. Un arbre palissé se construit tout doucement, entre 10 et 15 ans pour la majorité des formes. Quand on choisit une forme fruitière, il faut donc prendre en compte le temps que l’on peut accorder à l’établissement des arbres. Quelques formes assez faciles sont présentées en détail sur notre site, sur la page consacrée à notre verger palissé.

Ces différentes formes fruitières ne sont pas le fruit du hasard mais ont été conçues sur la base des observations des jardiniers. En particulier, je vous propose de réfléchir un moment à la façon dont la sève circule dans nos arbres fruitiers. Je dis souvent aux stagiaires que, contrairement à ce qu’ils croient, ils ne suivent pas un stage de jardinage mais une formation de plombier. Certes, on n’a pas affaire à des tuyaux de cuivre mais c’est bien de la bonne répartition des liquides que l’on appelle sèves que va dépendre la bonne santé et la croissance de l’arbre… et sa capacité à porter des fruits. L’arbre puise ses ressources dans le sol et la sève dite brute (eau et sels minéraux) est conduite jusqu’aux extrémités de la plante où, dans ses feuilles, se produit la photosynthèse et la transformation de la sève brute en sève élaborée qui se répartit dans tous les organes de l’arbre en redescendant. Or toutes les parties de l’arbre ne reçoivent pas un flux de même débit. Dans beaucoup de cas, et en particulier pour les arbres fruitiers, plus une branche est érigée, plus elle va recevoir un flux important de sève, un peu comme un jet d’eau qui jaillirait du sol. La plante pousse alors, c’est-à-dire qu’elle produit du bois. Mais de fruits, point ! Pour obtenir des fruits, il faut que le flux de sève soit ralenti, ce qui est le cas dans les branches secondaires (les coursonnes) ou lorsque les branches principales sont arquées à 60 ou 45 degrés environ (les croisillons), ou même à l’horizontale, en cordons. C’est aussi pour répondre aux exigences des flux de sève dans les arbres que les formes fruitières ne comportent JAMAIS de branches orientées vers le bas mais toujours vers le haut, même si la pente est très faible.

La taille de formation des jeunes arbres

La taille de formation vise à établir la structure de la charpente. Durant cette étape très importante, on recherche l’équilibre de l’arbre et la formation de branches trapues. On les taille sévèrement chaque année pour leur permettre de se renforcer et de se couvrir de coursonnes comme nous venons de le décrire. Nous présentons ci-dessous l’exemple de la formation d’un gobelet de pommier ‘Reinette du Grand Faye’. Le scion a été étêté au printemps suivant sa plantation. Trois branches se sont développées à partir des trois bourgeons supérieurs. Elles ont été taillées de nouveau très court au printemps suivant. Et des rameaux se sont développés dans le prolongement de ces axes pour atteindre environ 60 cm à l’automne. Chacune de ces branches est de nouveau raccourcie au printemps suivant.

Ces première tailles sont décisives pour le devenir des arbres fruitiers. Elles sont rapides à effectuer car chaque arbre ne requiert que quelques coups de sécateur. Mais chacun d’eux est important. Il faut choisir soigneusement la hauteur ou la longueur de chaque rameau et le bourgeon sur lequel tailler. La principale erreur à éviter est d’aller trop vite ou de se placer sur le côté de l’arbre. Pour choisir l’oeil sur lequel tailler, il est préférable de se placer face à l’axe de la branche que l’on est en train de tailler. Faute de pratiquer ainsi, on fait des erreurs difficiles à corriger par la suite, comme dans le cas de l’abricotier montré ci-dessous.

Conséquence d’une erreur lors d’une taille de formation

La taille de régénération des arbres palissés âgés

C’est probablement la plus difficile des tailles : reprendre des arbres palissés qui ont été abandonnés quelques années. Pour régénérer des arbres fruitiers de plein vent, on procède à une réduction de couronne ou à un éclaircissage, ou une combinaison des deux et on arrive rapidement à une restructuration de l’arbre. 
Pour les arbres palissés, le problème est plus complexe. Il s’agit en effet de rétablir une forme donnée et là encore, il faudra procéder par étapes : commencer par un diagnostic de vitalité de l’arbre, puis recenser les éléments de l’arbre sur lequel on pourra s’appuyer et enfin, pour les cas les plus difficiles, établir un programme de taille sur deux ou trois ans.

Diagnostic de vitalité et recensement des organes

Certains arbres ne peuvent pas être rétablis dans une forme palissée. Par exemple, si trop de coursonnes ont disparu le long des branches. Et s’il reste un peu de végétation, il faut vérifier qu’elle part bien au dessus de la greffe, sinon, on risque de reformer… un franc ! Autant remplacer ces arbres rapidement. La photo de gauche ci-dessous présente un arbre dont le tronc est très abîmé, et dont la sève ne circule plus. L’arbre du milieu a perdu toute vitalité et il vaudrait mieux l’arracher. En revanche, la photo de droite présente un arbre très ancien, certes, mais qui porte de nombreuses coursonnes et qui sera encore bien productif. Il suffit de le tailler annuellement soigneusement, en veillant à laisser assez de bois jeune, les brindilles par exemple, et d’éclaircir soigneusement les fruits pour laisser des ressources à l’arbre pour pousser. Et on veillera à protéger les nouvelles pousses spontanées qui seraient bien placées et donc pourraient servir à compléter la structure.

Taille de régénération

On ne peut régénérer de façon satisfaisante que les arbres dont la structure apparaît encore clairement. Certains cas sont faciles, l’arbre a simplement trop poussé et il suffit de supprimer les branches superflues. Très vite, on retrouve la forme. A condition de pratiquer une légère taille d’été, l’arbre portera de nouveau des fruits au bout d’un an ou deux. Il est également recommandé de restaurer le palissage sur le mur. Un travail un peu fastidieux mais très efficace pour soutenir l’arbre… et pour le rendu esthétique !

Mais, c’est parfois un peu moins simple. La photo ci-dessous montre un cas fréquent d’arbre très vigoureux qui a poussé tout en hauteur et a perdu ses coursonnes sur toutes les branches du bas. Les rameaux en hauteur sont des gourmands improductifs. Il ne suffit pas de les couper car ils repousseraient de plus belle, telle une brosse. Vigueur et fructification ne font pas bon ménage en arboriculture fruitière. Il faut donc reprendre la taille assez doucement pour que l’arbre ne réagisse pas en produisant des fagots de bois ! Le meilleur moyen est d’étaler le programme de taille sur deux ou trois saisons.

Taille de régénération plus difficile

Une taille régulière et bien conduite, c’est à dire progressive, permettra à l’arbre de porter de nouveau des fruits, mais il ne sera pas possible de revenir à la structure ordonnée d’un arbre qui a été régulièrement taillé et soigné. Tailler un arbre palissé n’est pas difficile mais demande un peu de patience et beaucoup de persévérance. Le résultat est à la hauteur du soin apporté et il y a peu de choses plus jolies dans un jardin qu’un arbre palissé couvert de fruits. S’il est nécessaire de vous en convaincre, voici pour finir une photo prise au Potager du Roi, à Versailles. Difficile de faire mieux.

Poirier palissé au Potager du Roi, à Versailles

Blog 2022 10 : la taille de formation des arbres fruitiers : simple, indispensable et complètement oubliée

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Planter un nouvel arbre fruitier est toujours un bonheur pour un jardinier. Après la visite chez le pépiniériste ou dans une fête des plantes, ou à l’arrivée du paquet, on se dépêche pour planter son arbre au jardin. On l’installe dans son trou de plantation (avec une poignée d’orties), on le haubane, on l’arrose, on se réjouit en pensant aux futures récoltes et aux confitures et conserves qui s’ensuivront… et on l’oublie.
Trois ou quatre ans plus tard, le petit arbre a bien grandi et il fait la fierté de ses propriétaires, ravis de le voir si bien pousser… Selon les cas (voir plus bas), il est devenu bien touffu ou au contraire ses branches se sont allongées démesurément. La première récolte survient et soudain, faute d’une taille de formation appropriée, les choses vont commencer à se compliquer. En effet, tel qu’il s’est développé naturellement, l’arbre est mal préparé à porter de lourdes récoltes et celles ci vont l’abîmer année après année. La situation est très différente selon le mode végétatif des arbres mais, dans tous les cas, une taille de formation bien conduite permet d’éviter la plupart de ces problèmes. Par ‘taille de formation’, par opposition à ‘taille de fructification’, ‘taille d’entretien’ ou ‘taille de régénération’, on entend la taille conduite pendant les premières années d’un arbre et qui vise à bien établir sa charpente.

La taille de formation des arbres à pépins : renforcer la charpente et former des coursonnes

Quelques indications pour le tout début de la formation de l’arbuste fruitier :

Tout d’abord : Bien choisir la hauteur du tronc
Le jardinier l’oublie souvent, mais beaucoup d’arbres peuvent être taillés de façon à modifier leur hauteur. La seule chose à respecter est le point de greffe. Il faut bien entendu toujours tailler au dessus de ce point, sinon, on se retrouve avec un porte greffe seul, un sauvageon par exemple,… et non plus avec la variété greffée. Une fois déterminée par cette première taille, la hauteur choisie pour le tronc sera définitive. Il faut donc bien réfléchir au départ, car on ne peut choisir qu’une seule fois !
Donc, lorsque votre jeune arbuste fruitier arrive dans votre jardin, il vous appartient de déterminer à quelle hauteur vous voulez voir se développer des branches charpentières. L’arbuste que vous avez acheté a bien souvent déjà développé quelques branches, mais rien ne vous empêche de revenir en arrière et de raccourcir en mars le tronc à la hauteur voulue. L’arbre reprendra de plus belle si vous avez pris le soin de planter en novembre, de façon à ce que les racines s’établissent tranquillement.
On peut choisir entre la cépée (photo de gauche), la basse tige (au centre) ou la haute tige (à droite).

Deuxième recommandation très importante : être attentif à l’orientation des branches
La direction de la branche qui pousse à la suite d’une coupe est entièrement déterminée par l’orientation de l’oeil sur lequel la coupe est réalisée. Si l’on se trompe d’oeil, la branche poussera dans une direction non désirée. La photo ci dessous montre le résultat d’une telle erreur. 

Lors des stages au Jardin des Merlettes, les participants apprennent donc à bien se positionner face à la branche à couper, la meilleure façon d’éviter ce genre d’erreur. On se place exactement dans l’axe de la branche que l’on souhaite tailler ce qui permet de déterminer facilement l’angle de chaque oeil et de choisir le plus approprié pour la forme que l’on souhaite. Le rattrapage d’une mauvaise taille de formation est difficile, hasardeux… et long, alors il faut bien prendre son temps avant le coup de sécateur décisif.

3ème règle de base : Ne pas laisser trop de charpentières
Puisque l’on est en train de monter une charpente, il convient d’anticiper la pousse des branches qui existent et prévoir que chaque branche va grossir de façon considérable. Il lui faudra de la place pour bien se développer sans gêner les branches voisines. Les photos ci-dessous montrent un arbre en gobelet qui comprenait 9 branches charpentières. On en a enlevé 4 pour en laisser 5. Chaque branche a ensuite été raccourcie.

Voici un autre exemple, sur un jeune poirier : dans ce cas encore on supprime quelques branches et on raccourcit les autres pour leur permettre de se renforcer. En effet, si on laisse les branches s’allonger trop vite, elles seront trop frêles pour porter les fruits. Chaque hiver, on raccourcit donc pour ne conserver que 15 à 20cm de la pousse de l’année précédente. Le renforcement des branches est très considérable d’une année sur l’autre. On passe d’une branche qui a la taille d’un crayon de papier à la taille d’un pouce, puis d’un manche à balai. Ceci bien sûr, à condition d’avoir bien raccourci la branche chaque printemps.

Il ne faut pas craindre que l’arbre soit dégarni. C’est vrai qu’il semble un peu ‘déplumé’ après cette taille, mais la pousse lors du printemps suivant est spectaculaire… et ainsi bien conduite. C’est une vraie preuve que la taille des arbres fruitiers ne correspond pas à une logique d’acharnement de la part d’un jardinier trop zélé mais à une nécessité pour le développement harmonieux de la charpente de l’arbre.

Faut-il laisser un jeune arbre porter des fruits ?Un vrai dilemme pour le jardinier
On cherche à conduire un arbre pour lui donner une forme adaptée à un certain usage. Parfois, cet objectif nous oblige àfreiner nos envies de goûter les fruits dès les premières années. En effet, on aurait tendance à laisser venir les premiers fruits où qu’ils soient situés, c’est-à-dire, même en bout de branche. C’est pourtant une erreur à éviter absolument. En effet lorsque le fruit vient à mâturité, il se forme sur la branche, au bout du pédoncule, une boursouflure que l’on appelle une bourse. Celle-ci agit comme un filtre sur la sève de l’arbre. Or, lorsque le fruit est cueilli, la bourse reste (photo ci-dessous).
Tous les arboriculteurs ne sont pas d’accord sur l’effet de ces bourses sur les récoltes suivantes : certains disent que les fruits obtenus sur des coursonnes qui portent ces bourses sont particulièrement délicieux, d’autres, en revanche, les trouvent rabougris. Nous n’avons pas trouvé d’étude statistique solide sur le sujet mais constaté fréquemment que la présence d’une bourse ralentit la pousse de la branche. S’il s’agit d’une charpentière, on comprend donc que la présence d’une bourse est indésirable. Il vaut donc mieux ne pas laisser venir de fruit aux extrémités des branches, et pour cela, la façon la plus efficace consiste à éliminer les fleurs mal placées au printemps (ce qu’on appelle ‘effleurage’).

Bourses

Les étapes successives d’une taille de formation
Les photos ci-dessous montrent la progression sur cinq ans de la taille de formation d’un pommier ‘Reine des reinettes Bonnin’ conduit en cordon simple bilatéral. L’allongement des branches est très progressif d’une année sur l’autre. On souhaite en priorité former des charpentières fortes (les cordons) et, en examinant les points de coupe des années successives, on constate que le diamètre de ces branches forcit d’année en année. On cherche ensuite à favoriser le développement de coursonnes bien établies et réparties régulièrement (environ une tous les 15 à 20 cm) sur les deux côtés latéraux (droite ou gauche) des branches, mais ni dessous ni dessus. Ce sont ces coursonnes qui porteront les futurs fruits, un ou deux selon leur force, mais pas plus.

Et voici le résultat, à l’été de l’année 5 :

Année 5 (automne) : les fruits !

Comme pour les autres stages organisés par le Jardin des Merlettes, les stages de taille des arbres fruitiers ont lieu au moment où les tâches doivent étre effectuées. Il y a donc plusieurs stages. Nous vous proposons de démarrer par un stage de taille d’hiver, d’arbres en formes libres ou palissées, selon ce que vous avez dans votre jardin puis, lorsque vous avez pris un peu d’assurance et commencez à connaître vos arbres, vous pouvez vous essayer à la taille en vert .

Voir le stage de taille d’hiver des arbres fruitiers à pépins de haute tige
Voir le stage de taille d’hiver des arbres fruitiers palissés
Voir le stage de taille ‘en vert’ des arbres fruitiers

Quels arbres faut-il ainsi former ?

Les exemples ci-dessus se rapportent à des arbres formés sur des palissages et que l’on suit très soigneusement d’année en année. Cependant, ces mêmes principes s’appliquent également aux arbres de haute tige, en forme dite ‘libre’. Pour eux aussi il est important de prévoir une structure solide et donc d’éliminer les branches charpentières en surnombre dès les premières années. Et un raccourcissement les deux ou trois premières années des branches que l’on aura décidé de conserver leur permettra de se renforcer et de supporter ainsi plus facilement, c’est à dire sans étai, le poids des futures récoltes.
On taillera donc ainsi les pommiers et les poiriers, mais aussi les cognassiers qui s’y prêtent d’ailleurs très bien, comme on le voit sur la photo ci dessous.

Jeune cognassier

Même les néfliers, dont les fruits sont pourtant plus légers , ont besoin d’une taille, au moins occasionnelle. Elle sert à éclaircir leur charpente de temps en temps, comme on le ferait pour un arbuste d’ornement. Faute de cela, l’arbuste ploie facilement sous le poids des fruits (ci dessous).

Néflier

Lorsqu’un arbre n’a pas été taillé dans les années suivant sa plantation, il développe une ramure trop dense, voire parfois enchevêtrée, et qui finit par l’étouffer. Les branches s’entrecroisent, le vent et le soleil n’arrivent plus au centre des branches, les maladies cryptogamiques s’installent. La sanction est une taille de restauration parfois sévére… mais ceci fera l’objet d’un autre article.

2- La taille de formation des arbres à noyaux : garder du bois jeune, près du tronc

Les arbres portant des fruits à noyaux ne repercent pas sur vieux bois
La stratégie de taille à adopter pour les arbres à noyaux est très différente de celle des arbres à pépins car ils ont la particularité de ne pas repercer sur vieux bois. Cela signifie que si une coupe est effectuée sur une branche qui a plus de deux ans, il y a de fortes chances qu’aucun bourgeon ne se forme sur la partie de la branche conservée et que celle ci meure dans les semaines ou les mois suivant la taille. Il faut donc garder du bois jeune partout sur l’arbre et en même temps éviter de s’éloigner trop des charpentières.
Le problème n’est pas aussi aigu pour toutes les espèces de fruits à noyaux. Les pruniers, par exemple, repartent en général assez bien, même sur du bois ancien. A l’inverse, les pêchers ne repercent quasiment pas.
Chaque année, un arbre à noyaux en bonne santé va émettre de nouvelles pousses qui vont mesurer de 40 à 50cm, voire plus d’un mètre pour les cerisiers et les pruniers. Si le jardinier n’y prend pas garde et n’intervient pas pour raccourcir ces nouvelles pousses, l’extrémité des branches va donc s’éloigner chaque année de cette même distance du centre de l’arbre. En trois ans, l’arbre est déjà très dégingandé. La pousse des années suivantes se ralentit, car la sève a un trop long chemin à parcourir jusqu’à l’extrémité des branches. Et les fruits, placés trop loin du tronc sont plus petits et ont moins de saveur.
Voici une photo d’un pêcher laissé à lui même pendant environ dix ans. Il a poussé très en hauteur et offre un faciès ‘en plumet’ car les branches principales qui formaient sa charpente se sont cassées les unes après les autres sous le poids des fruits. Il est maintenant très difficile de reconstituer une nouvelle charpente plus proche du sol car on risque que l’arbre ne reparte pas. Or les fruits sont désormais difficiles à atteindre et il est quasiment impossible de tailler correctement les branches à cette hauteur, sauf à faire des équilibres sur échelles…

Comment tailler ? L’exemple d’un pêcher de plein vent
Il est très important de tailler réguliérement les arbres à noyaux, en particulier les pêchers car leurs branches sont plus souples que celles des arbres à pépins et qu’elles ont tendance à ployer, et souvent, à se rompre sous le poids des fruits.
Pour garder des branches courtes on doit intervenir à différents moments tout au long de l’année :

  • Au début du printemps, au moment de la floraison, pour la formation des arbres jeunes. Cela sert également pour la fructification des arbres plus âgés mais ce n’est pas le propos aujourd’hui.
  • En vert, lorsque les fruits sont bien formés. Vers le mois de juillet, on raccourcit les rameaux au dessus des fruits que l’on a éclaircis pour n’en laisser que quelques uns par branche.
  • S’il faut pratiquer une taille d’élagage et supprimer des branches, fin Juillet. Jusqu’à récemment encore, on recommandait d’effectuer les tailles d’élagage sur arbres à noyaux en octobre ou début novembre, quand la sève est descendue et que l’on ne risque plus de provoquer des épanchements de gomme. Cependant, force est de constater que les arbres cicatrisent beaucoup mieux en été et c’est pour cela que nous avons adapté notre pratique… et changé la date du stage d’élagage des arbres à noyaux. 

Au total, le jardin propose donc trois stages différents pour la taille de vos fruitiers à noyaux. En avril, sur fleurs, la taille de fructification, fin juin, la taille en vert et fin juillet, la taille de rénovation.

Voir les stages de taille des arbres fruitiers à noyaux

Voici des photos des étapes de la formation d’un jeune pêcher :

Au bout de cinq ans, voici à quoi le pêcher ressemble :

Mais voilà, même avertis,  nous ne sommes pas toujours assez sévères. La charpente de l’arbre (à gauche, ci dessous) semble bien équilibrée. Pourtant, on l’a laissé s’allonger trop vite et l’une des branches maîtresses n’est pas encore assez solide pour supporter le poids des fruits (photo du milieu). Dès que le poids des fruits a augmenté, il a été nécessaire d’étayer cette branche (photo de droite). En automne, cette charpentière sera taillée à la naissance d’une ramification plus proche du tronc pour éviter cette mésaventure l’an prochain et permettre un nouveau départ et un renforcement de la charpentière.

Le cas des cerisiers haute tige
On le voit ci dessous pour ce cerisier bigarreau Napoléon, les principes sont exactement les mêmes au départ que pour les poiriers ou les pommiers vus plus haut : sélection des charpentières, puis raccourcissement radical chaque année.

Les photos montrées soulignent à quel point il faut être sévère dans ces tailles de formation, et supprimer une grande partie de la pousse de l’année pour vraiment renforcer la base de la charpente. L’exemple ci dessous présente un cerisier pour lequel la taille de formation, bien conduite au départ, a été abandonnée trop tôt. Et l’arbre s’est perdu en branches trop frêles.

Griotte du Nord

Les arbres à noyaux palissés
Même si le résultat semble très différent, la méthode est exactement la même pour ce pêcher palissé : choix et palissage de quelques charpentières que l’on laisse s’allonger progressivement et taille des branches latérales pour les rapprocher du mur. Et le résultat est magnifique. Voici par exemple la mise en place d’un pêcher palissé au Jardin des Merlettes (brugnon blanc) et le résultat au bout d’un an. Certes, on est encore loin des grands pêchers palissés du Potager du Roi, à Versailles, (photo de droite, avant la taille de printemps) mais on est en route…

Et on peut appliquer cette méthode à beaucoup d’autres espèces : abricotiers, cerisiers, et méme : figuiers et plaqueminiers !

Figuiers palissés

Blog 2022 09 : Comment choisir ses rosiers

Le jardinier qui souhaite planter des rosiers a beaucoup de chance : l’offre des pépiniéristes est très fournie et les catalogues regorgent de merveilles. Oui mais… comment choisir ? Car si les rosiers sont en général des plantes faciles à cultiver, rien n’est plus dommage que de voir un rosier mal adapté à l’endroit où il est planté. Le propos semble anodin. Pourtant tout le savoir-faire du jardinier ne pourra pas compenser un mauvais choix à la plantation.

Il y a quatre règles d’or pour choisir un rosier :

  • Des plantes en bonne santé
  • Une forme de rosier appropriée à l’endroit où il est planté
  • Un besoin d’entretien de la variété choisie bien synchronisé avec la disponibilité et le savoir-faire du jardinier
  • Un rosier dont la couleur, les pétales, le parfum enchantent le jardinier et/ou ceux pour qui le rosier a été planté !
Rosier ‘Alchemist

Un rosier en bonne santé

Quelques régles à respecter.

Les rosiers ne supportent pas tous le froid. La plupart des rosiers résistent très bien au froid, témoin les magnifiques rosiers qui fleurissent chaque printemps devant les maisons de l’île de Gotland, à l’est de la Suède. Mais il y a desexceptions, et de taille, comme par exemple de nombreux rosiers thé. Ils ont tendance à geler jusqu’au sol en hiver, dans notre Puisaye. S’ils reprennent au printemps, ils sont simplement en retard sur la saison mais vigoureux. Mais certains ne se remettent pas de cet épisode rigoureux. Les rosiers chinensis, les noisette et les banksia n’aiment pas le froid non plus. En revanche, tous les Gallica, Rugosa et beaucoup de centifolia et alba sont bien résistants. Le rosier ‘Hansa’ ci dessous non seulement supporte le froid mais est d’autant plus beau que l’hiver a été rigoureux
Les hybrides modernes sont inégaux mais une taille très courte au printemps est souvent nécessaire.

Rosier ‘Hansa‘ en hiver

S’ils ne supportent pas tous le froid, en revanche les rosiers supportent bien la chaleur : certains rosiers nous viennent du Moyen Orient (Rose de Damas, de Perse) et ne craignent vraiment pas le soleil. A l’usage, les rosiers semblent même préférer le temps chaud au temps froid. Les épisodes de canicule de cet été 2022 l’ont amplement démontré et la plupart des rosiers de notre roseraie montrent en ce début septembre un feuillage bien fourni et brillant et préparent une belle remontée de fleurs.
Les rosiers ont besoin d’arrosage, mais moins que la plupart des plantes vivaces. Nous avons fait l’expérience cet été de pailler abondamment les pieds des rosiers mais nous ne les avons pas du tout arrosés. Ils ont bien supporté six semaines sans aucune pluie. En revanche, dès que les orages ont été assez conséquents pour traverser les paillages et réimbiber le sol, les rosiers ont produit de bien belles pousses, en avance sur ce que l’on voit en général début septembre. 
Inversement, les rosiers supportent mal un sol détrempé en hiver. Nous avons au Jardin des Merlettes quelques rosiers plantés et qui se portent bien à des endroits mal drainés et souvent inondés l’hiver. C’est le cas de ‘Mermaid’ et de certains rosiers botaniquesmais ce sont des exceptions, la plupart des rosiers n’aiment pas que leurs racines soient noyées.
Les rosiers préférent les sols argileux : il nous est bien facile de voir la différence entre les rosiers cultivés dans le jardin situé à Cosne même, dans le Val de la Loire, au sol léger et sableux, et ceux de la roseraie du Jardin des Merlettes, dans l’argile poyaudine, à environ 250 m d’altitude. Même bien enrichi en humus depuis des années, le sol du val donne de bien moins bons résultats. La structure du sol est un sujet sur lequel nous sommes particuliérement vigilants : les parterres du Jardin des Merlettes sont rechargés régulièrement en bois raméal fragmenté, terreau ou paillage de fétuque, paille ou mulch. A ce régime ne s’ajoute aucun engrais chimique, naturellement. Parmi les rosiers buissons particulièrement vigoureux et faciles : ‘Jubilé du Prince de Monaco’, ‘Westerland’ et ‘Mozart’.

Mais il faut bien reconnaître hélas que, même plantés dans des conditions idéales, certains rosiers sont fragiles : Même si la saison débute bien, ‘American Pillar’ se couvrira d’oïdium au début de l’été, de même que ‘Veichelblau’ (photo ci dessous) ou ‘Souvenir d’Alphonse Lavallée’. La différence est flagrante avec d’autres rosiers bien résistants. Autant le savoir. D’autres rosiers sont, eux, sujets au champignon Marsonia , appelé aussi ‘maladie des taches noires’ et perdent toutes leurs feuilles en début d’été. C’est le cas des rosiers ‘Alchemist’ , ‘Prince Igor’ et ‘Madame Butterfly’. Cette faiblesse ne nous a pas empêchés de les planter. Nous ne nous en préoccupons pas trop et nous contentons de tailler les branches les plus atteintes et d’arroser les rosiers les plus touchés. La pousse de remplacement qui s’ensuit en milieu d’été est en général saine.

Oidium sur rosier ‘Veichelblau’

Choisir où planter en recensant les milieux du jardin

Dans un jardin, les propriétés du sol, l’espace disponible, l’ombre portée par les bâtiments alentour et les arbres, le vent, le climat, sont autant de circonstances qu’on ne pourra pas changer. En revanche, la combinaison de ces éléments, favorables ou défavorables, peut changer de façon importante d’un endroit du jardin à l’autre et un jardinier peut utiliser ces différences de façon astucieuse.
Autant que possible, on plante les rosiers dans l’endroit du jardin le mieux adapté à leurs besoins, c’est à dire celui qui répond au plus grand nombre de critères positifs et, par ordre d’importance, de la lumière, de l’air, et un peu d’espace, tel ce rosier grimpant ‘Madame Meilland’, de plus de cinquante ans d’âge, qui contraste avec l’aspect chétif d’autres rosiers du même jardin qui ne reçoivent pas assez de lumière.

Mme Meilland’ ou ‘Peace’

Un rosier pour chaque usage

Il faut ensuite considérer la hauteur et la largeur souhaitée pour la plante qu’on installe. Bien sûr, ça coule de source…mais on a tendance à oublier cette question quand on achète un rosier. Selon l’objectif recherché, l’espace à investir ou le support à habiller, mais aussi l’association recherchée avec les plantes déjà en place et l’ambiance que l’on souhaite créer, on choisira des rosiers plus ou moins hauts ou larges, ceux qui serviront de fond et ceux qui joueront les ‘prima rosa’. Là se pose souvent un problème bien pratique : où trouver ces précieuses informations ? Les catalogues donnent des indications, mais le sol du jardin et les conditions de culture offertes au rosier changent beaucoup la donne. Nous avons ainsi planté des rosiers ‘Astronomia’ censés mesurer environ 60 cm de haut et sommes chaque année surpris par les pousses d’été qui avoisinent un mètre, ridiculisant un peu le second rang de rosiers qui s’en tient, lui, aux 80 cm prévus. Un détail anodin ? Pas vraiment, car l’effet d’ensemble est raté.

Le dessin ci-dessous présente la succession des formes de rosiers, par ordre croissant : rosier paysager couvre sol, buisson, haut buisson, demi tige, pleureur, grimpant (petit ou grand), et enfin le rosier liane. Le facteur important àconsidérer est le volume du rosier par rapport à ce qui pousse autour de lui : des plantes vivaces, d’autres buissons, ou bien si le rosier est planté en isolé sur une pelouse. Dans ce dernier cas, par exemple, on recommande de le planter par groupes de trois ou cinq exemplaires pour un meilleur effet

Et le port du rosier lui même est extrémement important, et, en particulier, la souplesse de ses branches et leur longueur.Les photos ci-dessous présentent quelques exemples de rosiers en pergola. Le rosier de gauche, ‘Pink Cloud’, est beaucoup trop petit pour cette pergola de trois mètres de haut. Ce n’est pas parce qu’il est jeune car d’autres rosiers du même âge ont déjà formé un arc de cercle au dessus de la pergola. Il n’est tout simplement pas programmé pour pousser aussi haut. Par contraste, le rosier de la photo du milieu, ‘Apple Blossom’ est parfaitement à son avantage. Mais à droite,‘Madame Alfred Carrière’ peut prêter à discussion. Il est si exubérant et difficile à draper que l’effet rendu est toujours un peu fouillis. Mais certains trouveront que cela lui donne encore plus de charme, et ses roses sont si jolies !

Et il faut également décider, bien sûr, si l’on souhaite absolument un rosier remontant ou si l’on accepte un rosier non remontant, c’est à dire qui ne fleurira qu’une seule fois… Nous n’insistons pas sur ce critère, largement discuté par ailleurs dans ce blog. Il peut être dommage, si l’on a quand même un peu de place à leur consacrer, de se priver de la magnifique floraison des rosiers non remontants. Ci dessous, ‘Wedding day’ et ‘François Juranville’.

‘Wedding Day‘ (blanc) et ‘François Juranville’ (rose)

Un rosier pour le jardinier

Et il ne faut pas oublier non plus le jardinier, qui va passer du temps à soigner les rosiers et à les attacher. Il est prudent d’intégrer dans notre choix quelques contraintes de gestion :
Il s’agit d’évaluer honnêtement le minimum de soins requis pour le rosier choisi. A chaque saison, il y a un peu de travail à faire sur les rosiers : en hiver (la taille d’hiver), au printemps (fin juin, un peu de nettoyage des fleurs fanées, et souvent, désherber le pied des rosiers), en été (la taille des rosiers non remontants que l’on n’aura pas taillé en hiver, pour préserver leur floraison de printemps), en automne enfin, le palissage des rosiers grimpants et lianes. Faute de ces soins essentiels, le rosier ne réalisera pas son potentiel.

Tout dépend donc du temps que le jardinier peut rendre disponible, et aussi de son savoir faire. La difficulté relative d’entretien des rosiers croît avec leur taille, et tout simplement déjà pour des raisons d’accès. Attention donc aux pergolas et autres grimpants pour ceux qui n’aiment pas les échelles car il faut absolument attacher les nouvelles pousses. Un rosier grimpant bien fourni peut facilement demander une demi-journée de travail deux fois par an, et quelques séances de nettoyage après floraison. Et n’espérez pas gagner du temps en ne le taillant que tous les deux ou trois ans, c’est l’inverse qui se passera car la taille sera beaucoup plus compliquée. Et si on omet l’exercice une année, le rosier n’en souffrira pas, mais il ne sera pas forcément très joli à regarder et certaines branches risquent d’être cassées par l’orage. Les choses rentreront dans l’ordre dès la taille suivante.

Les deux photos ci-dessous présentent un petit grimpant, ‘New Dawn’, qui est un bon sujet pour commencer. Il est si vigoureux que rien ne l’abattra. En revanche, en le taillant et en observant comment il pousse, vous comprendrez vite comment procéder ( à gauche, avant la taille d’hiver, au centre, après la taille). 

Et voici ‘Aimée Vibert’ , un rosier un peu plus difficile car il produit tant de pousses du pied qu’il peut décourager celui qui est chargé de le draper. Cependant il ne présente aucune difficulté une fois les pousses attachées.

Rosier ‘Aimé Vibert

Pour vérifier son choix, il est vraiment utile d’aller chaque fois qu’on le peut regarder ‘in situ’ les roses que l’on a choisies dans un catalogue. Pour cela, les roseraies de votre région sont idéales, si possible en juillet, après la première belle floraison et quand les maladies attaquent, ainsi qu’en octobre, quand seuls les rosiers les plus courageux fleurissent encore. Vous ferez des découvertes !

En région parisienne, les roseraies de Bagatelle et de l’Haÿ les Roses, à Lyon, la roseraie du Parc de la Tête d’Or, à Rennes, le parc du Mont Thabor, et beaucoup d’autres. Outre le plaisir de leur visite, ces roseraies sont particulièrement utiles pour l’amateur tant le choix qu’elles offrent est grand. Sans compter que si vous prenez le temps de regarder, vous découvrirez mille astuces utilisées par les jardiniers pour conduire et attacher les plus récalcitrants.

Un rosier … pour ses roses !

Et une fois passés en revue tous ces critères bien raisonnables, on peut simplement choisir des rosiers parce qu’on aime leurs roses ! Certains jardiniers ne jurent que par les roses ‘anciennes’, d’autres n’aiment que les polyanthas, d’autres enfin les botaniques.

Pour ma partie les aime toutes et nous avons planté des roses pour tous les goûts au Jardin des Merlettes, afin que chacun puisse s’entraîner sur les variétés qu’il préfère.

  • La famille de rosiers : ‘anciens’ versus ‘modernes’, les botaniques, des roses ‘thé’ ou des Noisettes…
  • Les critères horticoles : par exemple, la forme des fleurs, en coupe, globuleuse, turbinée,… de leurs pétales ainsi que leur nombre, simple ou centifolia, la floribondité, le port du rosier lui même, et aussi des roses, et même la façon dont elles fanent, qui peut être très jolie ou totalement disgracieuse, comme la rose ‘Sénégal’, montrée ci dessous.
  • Des qualités particulières : le parfum, bien entendu, mais aussi des qualités auxquelles on ne pense pas d’abord. Par exemple, le fait de pousser en mi-ombre. C’est le cas de ‘Alister Stella Gray’, un rosier Noisette qui s’accommode bien d’une ambiance de sous bois aéré. Parmi d’autres critères, on peut également penser à la tenue de la fleur en bouquet dont ‘Mme Meilland’ détient la médaille d’or !
  • Et enfin, les roses que l’on aime parce qu’elles font partie de notre histoire personnelle. Chacun a des souvenirs liés à telle ou telle rose dont le nom évoque un proche, un ami, un souvenir agréable.
Rose ‘Sénégal’

Voici ci-dessous, quelques unes de nos roses préférées : le ‘Rosier évêque’ pour sa couleur, ‘Mme Butterfly’, pour ses pétales turbinés et son parfum, ‘Chinensis mutabilis’ pour sa grâce….

Il ne vous reste plus qu’à vous mettre au travail. Vous allez sans doute découvrir qu’une fois choisis vos critères, le nombre de rosiers ‘éligibles’ pour votre petit coin de paradis se réduit étonnamment. Mais le résultat sera à la mesure de vos efforts de recherche. Vous êtes peut-être surpris par toutes ces précautions que je viens de décrire pour choisir vos rosiers. Mais je vous garantis que chacune d’entre elles est nécessaire. Comme dans d’autres disciplines qui font appel à nos sens artistiques, lorsque le résultat est réussi, tout paraît simple et on a tendance à minimiser le travail qui a précédé. Le visiteur en tous cas n’en saura rien.

Rendez vous bientôt au jardin, pour une visite commentée de la roseraie.

Blog 2022 08 Sécheresse et jardins, comment les concilier ?

Que faire quand la canicule sévit et que nos jardins souffrent ? Face à ce défi, chacun recherche des solutions et certaines sont plus efficaces que d’autres. Commençons, pour l’écarter bien vite, par une méthode qui me paraît bien saugrenue mais dont l’usage se répand paraît-il.

Il s’agit de peindre sa pelouse en vert

Les californiens, rois des truquages et effets spéciaux (en tous cas dans une certaine banlieue bien connue de Los Angeles) sont confrontés à une sécheresse record depuis près d’un siècle et désormais également à l’interdiction d’arroser leur jardin. C’est bien ennuyeux dans un pays où les propriétaires urbains n’imaginent pas leur villa autrement que posée dans un écrin de verdure dont l’élément principal est une pelouse. Jusqu’à présent, les jardiniers achetaient plutôt quelques rouleaux de gazon et remplaçaient les espaces trop abîmés. Mais la sécheresse se fait trop intense, les rouleaux sont chers et, faute d’un arrosage approprié, la reprise est médiocre, donc on n’est pas très avancé. Alors, de guerre lasse probablement, certains ont trouvé un moyen plus efficace de conserver une jolie couleur verte à leur pré carré, soit en installant du gazon synthétique, soit, plus récemment, en peignant le sol, tout simplement. 
Xtreme Green Grass se présente comme la société de peinture de pelouses leader sur le marché californien. Les affaires se développent vite dans le jardinage en trompe l’œil et le magazine anglais ‘The Economist’, notait déjà en 2014 que le chiffre d’affaires de cette société (dont le nom ne s’invente pas ne s’invente pas !) avait progressé de 75% un an. Pas mal mais moins bien que celui de la société de peintures pour pelouses ‘LawnLift’ dont les ventes ont, elles, progressé de 300% !

Un des arguments de vente de Lawn lift est que la dépense en eau pour arroser les pelouses des particuliers aux USA correspond en moyenne à la moitié de la consommation en eau du foyer. Je répète, pour ceux qui croirait que je me suis trompée dans les chiffres : la dépense en eau pour arroser les pelouses des particuliers aux USA correspond en moyenne à la moitié de la consommation en eau du foyer. On comprend donc facilement pourquoi il est urgent de stopper les arrosages quand l’eau se fait rare partout.
Mais ce n’est pas si facile : si la pelouse cesse d’être arrosée, elle sèche très vite et prend un aspect bien désolé. D’abord, c’est assez laid, mais aussi, le propriétaire se retrouve bien souvent dans une situation de violation du règlement de copropriété qui précise souvent que les pelouses doivent être entretenues.
De là à peindre le sol !  Bien entendu, cette pratique (je me refuse à employer le mot ‘solution’) n’est pas sans inconvénient. Tout simplement parce qu’exposer un produit chimique sur le sol autour de votre maison présente des risques pour votre santé. En fait, cette démarche m’a semblé si incongrue que je me suis renseignée sur les produits… et je n’ai pas été déçue. Outre les irritations possibles aux poumons, aux yeux, à la peau, les producteurs mentionnent que le produit peut avoir des effets potentiellement aigüs. Sans compter que la notice ne met en garde que contre les inconvénients à court terme. Mais s’agissant d’une pelouse autour d’une maison, on doit sans doute envisager aussi les effets à long terme. L’information sur la toxicité du produit est édifiante : récapitulant les différents types de toxicité (chronique, effets mutagènes, tératogènes ou sur le développement) la réponse laconique est ‘aucun connu’. Et pour l’impact sur l’environnement (eco-toxicité et bio-dégradation notamment) : aucune donnée disponible.
Je cite un peu longuement cet exemple de peinture des pelouses parce qu’il illustre bien à mon avis à quel point certains agissements peuvent être déviants par rapport à une fonction initiale. Au même titre que trop regarder un arbre peut faire oublier la forêt, trop regarder les brins d’herbe font oublier la pelouse. La fonction initiale de celle-ci est de participer à la création d’un cadre de verdure, un abri frais et reposant. Mais au fil des années, un conformisme navrant s’est imposé dans ces banlieux californiennes. Quelques arbres et arbustes, une grande pelouse abondamment arrosée, de larges allées bétonnées et le décor est posé pour un pseudo jardin : banal, pratique, demandant peu d’entretien hormis une bonne tondeuse et un réseau d’arrosage. Ni fouillis, ni biodiversité.  Mais quand l’eau vient à manquer, le modèle s’effondre.

Pomper et utiliser l’eau du sous sol

La sécheresse actuelle fait progresser les mentalités partout dans le monde, enfin dans le monde qui se croyait à l’abri de la sécheresse. En particulier, particuliers, agriculteurs et autorités locales qui gèrent l’approvisionnement en eau des villes doivent reconsidérer leur position en ce qui concerne le pompage des nappes phréatiques. Longtemps, les jardiniers des villes ou des champs ont considéré qu’arroser avec des eaux de pompage ne portait pas à conséquence. Il ne pleut pas ? Pas de souci, j’ai l’eau de mon puits, ou du ruisselet qui passe dans mon jardin. Et moins il y avait d’eau à utiliser en surface, plus on pompait. Solution simple… et bête, ça va parfois de pair. Ainsi en Californie environ 65% de l’eau utilisée en 2014 provenait de pompages directs, contre 40% environ les années précédentes. Mais cela n’est juste pas durable et le magazine GEO notait, en août 2021 que la guerre de l’eau aurait bien lieu en Californie. 

Champs irrigués

Le grand public s’est (enfin) rendu compte que le problème est très compliqué, et grave. On réexamine le concept de nappe phréatique et on se rappelle que cette eau de sous sol est un bien commun et que trop pomper entraîne invariablement des problèmes de salinité. Et si l’eau fraîche venait à manquer ?

Salinité (Source : Wikipédia)

Une fois l’urgence reconnue, on réfléchit à des moyens de préserver cette ressource précieuse. Santa Cruz, par exemple, a depuis près de 10 ans rationné l’eau et interdit de remplir baignoires et jacuzzis, tout en instituant des amendes et des classes d’instruction civiques (« water schools ») pour les contrevenants. Les résultats ont été à la mesure des moyens employés : une baisse de 26% de la consommation d’eau dès la première année par rapport à l’année précédente.
Et bien sûr, arme ultime, on peut facturer l’eau à un prix qui reflète la valeur de ce bien rare pour la communauté. Toute l’eau utilisée, c’est à dire celle du réseau de distribution mais aussi celle pompée localement, serait enfin prise en compte et facturée à chaque immeuble… mais en 2025 seulement. Certains progrès ont un peu de mal à passer dans les actes.
En attendant ces mesures radicales, chacun de nous peut commencer par faire le meilleur usage possible de l’eau qui est à sa disposition
Pour commencer, on peut installer des citernes pour récupérer l’eau de nos toitures, ce que les anglo saxons appellent « water harvesting », ou ‘récolte de l’eau. J’aime bien ce terme qui, en la comparant à une récolte, souligne combien l’eau est précieuse. Dans la bible (dans le livre de la genèse), Joseph est enfermé par ses frères dans une citerne avant d’être vendu comme esclave par ses frères. Tiens ? une citerne. Elle était probablement vide à ce moment de l’année, mais oui, le Moyen Orient a une longue tradition de conservation de l’eau. L’eau que l’on récupère ainsi ne permet pas d‘arroser une pelouse, d’ailleurs, on n’y pense même plus, mais elle fournit de l’eau à verser au pied des végétaux les plus fragiles et quelques arrosoirs peuvent faire une vraie différence et éviter la mort de tel ou tel joli arbuste.
Sans aller jusqu’à la récupération bien organisée de toutes les eaux grises de la maison, une solution à laquelle on viendra peut-être, on peut aussi reprendre les gestes que l’on a vu faire à nos grands-mères qui ne perdaient pas une cuvette d’eau de rinçage des légumes, par exemple.
Mais surtout, il faut soigner le jardin de telle façon que toute goutte qui tombe au sol lui profite et dure ! Bien sûr un orage violent ou un épisode de grêle peuvent causer des dégâts par leur violence. Mais il n’empêche qu’il faut à tout prix récupérer toute l’eau qui tombe, parfois bien violemment. Cela veut dire entretenir la perméabilité du sol et réfléchir au circuit de l’eau qui ruisselle. Autant que possible il faut retenir l’eau chez soi et l’empêcher de filer dans les égouts, au demeurant bien souvent saturés lors d’un épisode orageux. Cette préparation consiste à :

  • Repérer et supprimer autant que possible tous les endroits où le sol a été imperméabilisé. Le fameux ‘drive in’ des américains, l’entrée du garage, certaines circulations. Et les remplacer chaque fois que c’est possible par des grilles au sol au travers desquelles l’herbe pourra pousser et être tondue.
  • Installer de larges cuvettes autour des arbustes. Si le jardin est en pente, il faut souvent renforcer le bord de la cuvette, au haut et en bas, par des pierres.
  • Installer des paillages sur les parterres : cela permet d’absorber beaucoup d’eau mais, pour une bonne efficacité, il ne faut pas se contenter de recouvrir le sol, il faut installer une bonne épaisseur (3 ou 4 cm). Et si vous n’avez pas de paille, pas de souci, les tontes de gazon, le mulch, toutes sortes de débris végétaux conviendront parfaitement.

En fait, l’idée conductrice est qu’un sol ne doit jamais être laissé nu, et surtout s’il est ‘battant’, c’est-à-dire s’il a tendance à se compacter sous l’effet des gouttes d’eau. C’est le propre des sols contenant une forte proportion d’argile ou de limons. Les sols sableux ne sont pas battants.
Et quand on a épuisé toutes ces solutions simples : que faire quand il n’y a pas d’eau ? Certes, nous n’avons guère eu à arroser nos pelouses l’été dernier (en 2021). N’empêche, on savait que la sécheresse reviendrait bien une année ou l’autre, surtout si le réchauffement climatique se poursuivait… Et c’est bien le cas.
Donc il faut réfléchir sur le long terme. Et l’attitude qui paraît la plus raisonnable est de s’adapter. Pour cela, on a besoin de réfléchir et peut être,  de changer de repères : que souhaite-t-on dans son jardin, un havre verdoyant ou un tapis d’herbe ?
Déjà, on peut adapter notre façon de tondre ou de faucher. La température au sol varie en effet largement selon la hauteur de l’herbe qui le recouvre. Si l’herbe est laissée haute, le sol se maintiendra à environ 19 ou 20°. L’herbe coupée à 10 cm, ce qui est assez haut, résultera en une température de 24 ou 25°. Mais si l’herbe est coupée à ras, laissant le sol nu, celui-ci subira des températures de plus de 40°. La différence est donc très sensible. Laisser un sol chauffer au soleil a de graves conséquences sur la biodiversité car toute la faune qui vit proche de la surface du sol est détruite. On peut donc adopter une attitude différenciée : on continue à faucher les allées sur une largeur juste suffisante pour permettre une circulation facile et on laisse haute l’herbe tout autour.

Ensuite, on peut adapter la gamme végétale. Les jardiniers japonais sont depuis longtemps passés maîtres dans l’art du trompe l’œil. Et à défaut de pouvoir faire pousser un gazon tel qu’on le conçoit en Europe, ils créent des oasis verdoyantes. 

Oasis à Paris : Parc André Citroën (Paris)

Si l’on recherche absolument cet effet de tapis vert, certains végétaux couvre sols sont particulièrement bien adaptés. Les japonais ont développé l’art de faire pousser de très nombreuses variétés de mousses, à développement plus ou mois dense et dans une gamme étendue de verts.  Ceci leur permet de choisir les variétés les mieux adaptées à chaque jardin. Certaines mousses ne s’établissent bien que dans des milieux bien humides, mais d’autres, si elles sèchent en été, reprennent vite des couleurs aux premières pluies d’automne. 

En France de nombreuses variétés de géraniums vivaces résistent très bien à la chaleur. Et des tapis de sédums nains commencent à apparaître dans les espaces publics très arides, la ligne T9 à Paris, par exemple. Et si on souhaite un peu de hauteur on peut choisir des arbustes tels que les mahonias, les berbéris, les osmanthes ou les filaires. En revanche, je ne vous conseille pas les banquettes d’azalées comme ci-dessous, à Kyoto. Pas d’eau, pas d’azalée.

Pour les parcs et grands jardins, on peut remodeler l’espace petit à petit et en observant l’évolution de la flore, en particulier des graminées qui s’installent au fil des saisons, aller dans le sens de ce que l’on observe et choisir des plantes dans les mêmes familles que celles qui s’installent spontanément, un sujet sur lequel nous reviendrons, c’est sûr.

Au fond, la seule règle à suivre est de regarder la nature en grand et en petit et de s’adapter en conséquence.

Trottoir colonisé

Blog 2022 08 : Le jardinier, gardien de l’écosystème

Chaque mois d’avril, une semaine est dédiée au ‘développement durable’. Beaucoup de manifestations jardinières tournent autour de ce thème. Le Jardin des Merlettes insiste depuis sa création en 2007 sur l’importance de ce concept pour le jardinier, qu’il soit amateur ou professionnel. Notre jardin a en effet été créé pour participer à l’émergence d’une nouvelle forme de jardinage, le jardinage ‘durable’. C’est un concept par lequel le jardinier assume un nouveau rôle, qui n’est plus seulement de produire fleurs, légumes et fruits, mais de participer à un effort plus large d’équilibre et de bien être de la société.

Durable est la traduction de ‘sustainable’ (soutenable), un concept économique développé vers la fin des années 70 pour les projets de développement de ce qu’on appelait alors le Tiers Monde. On remettait (enfin) en cause l’aide apportée par les pays développés et qui se concentrait trop souvent sur des mesures prises dans l’urgence. Cette aide n’apportait souvent aucune solution à terme ou ne prenait pas en compte l’épuisement de certaines ressources naturelles. Et, peut-être plus grave encore, on ne tenait pas compte de l’organisation du travail dans la société sur place, ce qui fragilisait souvent l’équilibre des projets. On a progressivement intégré l’idée d’aide durable en créant des projets capables de s’auto-supporter financièrement (la contrainte économique) et sans porter atteinte à l’accès des générations futures aux ressources naturelles (la contrainte écologique). Mais le concept s’est très vite élargi car les économistes ont réalisé que les impératifs écologiques et économiques n’étaient pas suffisants et que la dimension sociale devait également être prise en compte. En effet les règles de fonctionnement de la société dans lequel est conçu chaque projet, la répartition du travail entre hommes et femmes par exemple, sont souvent lourdes de conséquences sur le succès d’un projet.

Cette façon d’analyser les projets sous ces différents angles de vue a été largement adoptée depuis une dizaine d’années. Cette approche enrichit les projets de développement en leur apportant plus de profondeur et de solidité. Mais elle est également applicable à l’art des jardins selon les trois dimensions, ou ‘piliers’ du développement durable, à savoir :

  • La dimension écologique : par l’adoption de techniques culturales adaptées
  • La dimension économique : en concevant et en appliquant un plan de gestion contraignant
  • Et enfin, en tous cas pour les jardins publics, la dimension sociétale : en respectant un objectif de consensus social, un jardin pour tous.

Un impératif écologique: il s’agit d’adopter des techniques culturales adaptées et de protéger la biodiversité

Les techniques culturales durables : soigner le sol

On parle ici de non travail du sol, de paillages et de connaissance des propriétés physiques du sol du jardin. Ces techniques culturales sont au centre des stages qui ont lieu au jardin pour apprendre à préparer le sol et à le protéger. Le point principal est que le jardinier doit accepter de passer un peu de temps pour mieux connaître son sol (sa structure, sa perméabilité, par exemple…) et le soigner en conséquence car la fertilité du sol est littéralement exponentielle s’il est bien soigné. Notre propos peut paraître exagéré, mais vraiment, cela vaut la peine d’essayer.

La biodiversité ordinaire

Il s’agit ensuite, ou plutôt, simultanément, de se préoccuper de la biodiversité existant au jardin. Et là, on parle de toutes les plantes et les bestioles ‘ordinaires’ qui vivent dans la même région que nous. …..  Il s’agit de respecter tout ce qui est endémique, c’est-à-dire tout ce qui est naturellement présent dans notre région. Et on comprend donc bien que ce ne seront donc pas les mêmes espèces et variétés en Bourgogne et en Normandie par exemple. Quoique bien sûr, le réchauffement climatique entraînant des migrations tant des plantes que des animaux, il en résulte une certaine confusion sur ce qu’il est ‘normal’ de trouver dans telle ou telle région.

En ce qui concerne la biodiversité en tous cas, une des premières priorités du jardinier va être de protéger la diversité des ‘mauvaises herbes’ et des insectes’. Il ne s’agit donc pas d’un combat glorieux pour quelque chose de tout à fait extraordinaire, comme un oiseau magnifique ou une orchidée rare, mais plutôt de s’assurer que le nombre de variétés de plantains ou de pissenlits ne diminue pas, pas plus que celui des espèces de cloportes et autres crustacés terrestres. Ces plantes et animaux bien modestes sont en effet complètement intégrés à la chaîne du vivant et chaque maillon a son importance.

On veillera donc à créer des refuges pour les insectes en gardant des bandes enherbées, des jachères ou des zones réservées, si on a assez de place. J’insiste sur les insectes, plus que sur les oiseaux, parce qu’ils se situent en amont. Or on ne peut pas jardiner avec la nature sans s’intéresser au monde des insectes. Plus on regarde, mieux on comprend les interactions, plus on est efficace pour protéger ses plantations. Faire fuir les indésirables, attirer les auxiliaires, cultiver puis préparer les plantes essentielles en phytothérapie, c’est un programme au long cours qui s’installe dans l’agenda du jardinier. Cela prend peu de temps et en fait gagner beaucoup. Le plus long, c’est de comprendre ce qui se passe : à chaque saison, ses soucis. Plus une action est spécifique, plus elle est efficace. Au jardin, nous proposons deux stages différents sur les ravageurs et maladies du jardin. L’approche générale est bien sûr la même pour les deux, mais les soucis sont différents selon la saison où se tient le stage, printemps ou automne. Regarder régulièrement son jardin pour détecter les soucis est la base. On peut ensuite poser sûrement un diagnostic, identifier le problème, maladie ou invasion, et alors seulement, agir.

Libellule

La gamme variétale

Préserver la biodiversité, c’est aussi penser à planter des variétés locales, en particulier des espèces fruitières. Et contrairement à certains préjugés, cela laisse un grand choix. Nous avons installé au Jardin des Merlettes un jardin d’arbustes et un conservatoire d’espèces fruitières bourguignonnes qui montrent la richesse de la gamme disponible.

Fête des fruits à Saint Loup

Enfin, autant que possible, il faut respecter le cahier des charges de l’agriculture bio

C’est à dire n’utiliser aucun produit chimique et favoriser les semences et plants issus de la filière ‘bio’. Si ça semble difficile, on peut tout simplement commencer en supprimant tous ces produits en ‘cide’ et observer les résultats au jardin. En particulier, on voit revenir assez vite des papillons et insectes de toutes sortes.

De même qu’il y a des parcours de santé pour les humains, on peut installer un parcours de biodiversité au jardin. Ce parcours recense les étapes à franchir pour que le jardin et ses hôtes disposent des ressources nécessaires à leur autonomie et à leur protection. On fait un premier pas, puis un autre et le jardin devient progressivement plus naturel et favorable à la biodiversité. On observe par exemple une multiplication des espèces : par exemple, et comme déjà mentionné dans d’autres de nos podcasts, ce n’est désormais plus une espèce mais de nombreuses espèces de coccinelles qui s’attaquent à nos pucerons pour protéger le jardin. Des contraintes économiques

Des contraintes économiques : Le plan de gestion du jardin

L’objectif du plan de gestion

Le plan de gestion sert à prévoir l’avenir du jardin tout en respectant certaines contraintes financières et humaines. Il prévoit la séquence des tâches qui doivent être accomplies chaque année mais aussi, à plus long terme, l’évolution des végétaux du jardin tout au long de leur cycle de vie : les arbres et arbustes qu’il faudra remplacer, l’évolution de leur volume, etc.

On cherche également à définir quel niveau d’entretien minimum est nécessaire pour les différents secteurs du jardin selon l’effet que l’on souhaite obtenir. Les parcs et jardins ouverts à la visite doivent économiser leurs ressources financières qui s’amenuisent au fil du temps. Faute de moyens, on ne peut plus entretenir les jardins comme au temps de Louis XIV, ni même au siècle dernier. Pour garder l’esprit des jardins et leur rendu esthétique, mais avec beaucoup moins de moyens, il faut établir des priorités. On va donc, par exemple, définir des zones de prestige, où l’entretien sera très soigné et d’autres catégories, pour des espaces qui demanderont moins de travail de suivi, jusqu’à même l’espace quasi naturel, qui ne nécessitera qu’un faucardage occasionnel..

Pour établir un plan de gestion durable pour un espace vert, on devra prendre en compte tous les coûts, c’est-à-dire les végétaux (les semences, plants et arbustes…), tous les intrants (eau, énergie, traitements, coût du matériel et de son entretien), le coût du travail et les intervenants extérieurs (élagueurs, dendrologues, techniciens et conseillers)… pour pouvoir répartir les ressources disponibles en respectant les priorités établies lors du zonage.

Topiaires au Parc de la Source (Orléans)

Mais ce raisonnement de gestion durable ne s’applique pas qu’aux espaces collectifs : le jardin familial est, lui aussi, soumis à des contraintes économiques ou édaphiques. Qu’il s’agisse du temps disponible, de l’équipement ou du coût des fournitures diverses, les ressources familiales ne sont pas infinies non plus. Autant les prendre en compte quand on prévoit son jardin. Voici quelques exemples concrets à éviter :

  • Des haies taillées très denses qui demandent plusieurs tailles par an, ce que les paysagistes ont surnommé ‘le béton vert’
  • A éviter aussi : les parterres de plantes annuelles ou de rosiers dont le sol est laissé nu et ceux dont l’accès est difficile pour le jardinier qui doit les désherber
  • Et bien sûr, de larges surfaces de gazon installées dans des conditions édaphiques défavorables

Au contraire, on peut essayer de favoriser :

  • Des haies variées en port libre
  • Des strates variées, y compris la strate herbacée (pour les insectes)
  • Le paillage systématique ou le ‘mulching’ des parterres
  • Un meilleur usage des arbustes

Un jardin qui s’adapte aux contraintes du jardinier

En bref, un jardin ‘durable’ est un jardin qui s’adapte. Il est difficile d’éviter de faire des erreurs lors de la conception d’un jardin. Une erreur courante consiste à pécher par optimisme et à mal apprécier la masse de travail qui sera nécessaire pour entretenir correctement ce que l’on souhaite planter. Mais on peut souvent rectifier par la suite, à condition de comprendre où le bât blesse. Nous avons ainsi planté au Jardin des Merlettes des parterres de rosiers de façon traditionnelle, en sous estimant largement le nombre d’heures de désherbage que ce choix entraînerait. Tout simplement parce que les parterres en sol poyaudin sont beaucoup plus difficiles et longs à désherber que ceux de la vallée de Loire, au sol sableux, donc légeret dont nous avions l’habitude. Nous avons dû déplacer certains rosiers pour aménager de plus petits parterres autour desquels il est facile de passer la tondeuse. Un autre exemple : certaines parties du jardin sont gorgées d’eau en hiver. Nous avons installé des mini collines au potager. Surélever nos plantations de 20 ou 30 cm permettent d’éviter certains dégâts. A suivre.

Le rôle du jardinier dans la société : une dimension humaine inégalée

Quand on demande aux gens quels métiers ils trouvent les plus sympathiques, les jardiniers se retrouvent tout en haut de la liste. C’est parce que le jardin est actuellement ressenti comme un des meilleurs endroits d’échange et de partage amical. En plus de cultiver son jardin, le jardinier remplit plusieurs missions :

Le jardin est vecteur de consensus social et de réinsertion

  • Le jardinage est une activité qui fait appel à l’observation, à la mémoire et au savoir. Il est accessible à tous, pourvu qu’on en aie l’envie.
  • C’est un travail physique où l’on endure la pénibilité de certaines tâches et où l’on est confronté à la force de la nature : dureté des sols, force du vent, pluies battantes, soleil écrasant.. Ces épreuves renforcent toujours les liens entre les participants. D’ailleurs, les stages dont nos élèves gardent le meilleur souvenir sont toujours des stages effectués dans des conditions climatiques difficiles… à notre corps défendant !

Le jardinage favorise les relations de proximité

  • C’est dur de travailler tout seul. De plus, les jardiniers aiment bien partager leurs expériences. C’est l’occasion de s’entraider, et aussi pour les anciens ou les plus expérimentés, de former les plus jeunes.
  • Travailler ensemble et ensuite, partager : un bon jardinier récolte en quantité, des fleurs, des légumes, des fruits. On a souvent trop d’un petit nombre de choses et chacun connaît des réussites et des échecs : c’est l’occasion d’échanger avec ses voisins.

Le jardinage participe à conserver la mémoire du vivant, les savoir faire et les connaissances locales

  • La taille des arbres dans certaines formes, par exemple, la conduite des arbustes fruitiers en formes palissées, mais aussi les tétards des haies, les plessis ou pléchages.
  • Certaines techniques pour la conservation des récoltes : construction de silos enterrés, transformation ou conservation de certains aliments (les poires tapées en Puisaye)
  • La connaissance des particularités locales édaphiques : en particulier concernant le sol et le climat. En janvier 2012, les personnes les plus âgées en Bourgogne nous rappelaient qu’en 1956 aussi, le printemps s’était invité au début de l’hiver, jusqu’à la fin janvier. S’en était suivi du 1er au 27 février 1956, la pire vague de froid depuis 1947. Dans les temps de canicule que nous subissons actuellement, c’est important de se souvenir que d’autres générations ont enduré aussi de grosses difficultés. Cela protège du défaitisme ambiant.
  • Les jardiniers privés participent également activement à la préservation des variétés locales, qu’il s’agisse d’arbres fruitiers, de légumes ou de plantes naturelles, grâce aux espaces préservés de leur jardin.

Quand on parle de la dimension sociale, ou plutôt sociétale du jardinage, il y a un aspect qu’il peut être très utile de se rappeler, c’est sa dimension thérapeutique

Le jardinage thérapeutique : l’exemple de l’association Thrive

L’exemple le plus concret de mise en œuvre de cette vertu ‘soignante’ du jardinage est fourni par l’association THRIVE, créée sous l’égide de la Royal Horticultural Society au Royaume Uni et qui organise et gère des jardins thérapeutiques. Sa devise : ‘Utiliser le jardinage pour changer les vies’ (‘Using gardening to change lives : social and therapeutic horticulture’) : Rien que ça! Les jardins qu’elle conçoit sont adaptés pour servir d’ateliers pratiques pour des personnes en situation de handicap, physique ou mental.

Thrive crée des jardins, forme du personnel d’encadrement, milite pour imposer le jardinage comme vecteur de réinsertion sociale. Son succès depuis sa création, en 1978, est phénoménal : plus de 900 jardins créés, aidés ou encadrés à ce jour. Et plus elle crée de jardins, plus on lui en demande !

Un petit plaidoyer pour conclure ce podcast : un chemin vers le BNB

Jardiner ‘durable’ c’est remettre en cause ses habitudes : travail du sol (béchage) ou couverture du sol (paillis, mulching), taille ou éborgnage, cassage ou arcure des arbres fruitiers, etc. C’est aussi s’éloigner du productivisme et privilégier plus de qualité et de diversité.

On peut aussi y ajouter un poil de philosophie : jardiner, c’est être dans l’instant présent. Rien ne ‘vide’ autant la tête que de soigner des plantes, que l’on prépare une planche au potager, qu’on récolte des graines ou qu’on cueille des fleurs pour un bouquet. Ce que les yogis mais aussi les thérapeutes appellent, ‘la pleine conscience’. Et cela nous rapproche d’une autre notion : le BNB (ou Bonheur national Brut), un concept inventé au Bhoutan. Si on parlait un peu de nous, juste histoire de voir d’où nous tirons nos moments de bonheur ? Le jardinage est probablement un élément à retenir pour améliorer cet indice.

On nous annonce pour bientôt des restrictions de toutes sortes, mais, tout comme le BNB du bonheur s’oppose au PNB de la productivité, la ‘sobriété heureuse’, un concept remis en avant (mais non inventé) par Pierre RAHBI, s’oppose à la consommation effrénée. Sobriété, pleine conscience, des façons de profiter de la vie qui s’accordent bien avec les jardiniers. A réfléchir !

Blog 2022 07 : Lutter contre les pucerons ? Il y a la coccinelle, bien sûr, mais pas seulement…

Avec le printemps et l’éruption de tendres pousses sur nos rosiers, arbustes et arbres fruitiers, un nouvel ennemi envahit les jardins ces temps ci : le puceron. Et chaque jardinier de sortir son arsenal de lutte : pulvérisations en tous genres, aspersions, et, pour les plus avertis, lâchers (ou poser) de coccinelles. C’est une bonne idée d’inviter ces insectes au jardin et de leur permettre de s’y installer durablement, mais on peut pousser plus loin cette réflexion. En effet, la coccinelle, ou Bête à bon Dieu, comme on l’appelait autrefois, est loin d’être le seul insecte efficace contre les pucerons. Il existe de nombreux autres auxiliaires qui peuvent aider le jardinier, pourvu qu’on les y invite. Nous vous proposons une courte introduction sur ce sujet passionnant.

La coccinelle est utile au jardin : les différentes phases de son développement

Comme beaucoup d’insectes, la coccinelle passe par des métamorphoses. L’oeuf éclot en larve puis se nymphose en pupe et enfin émerge l’insecte. Nous connaissons moins bien les coccinelles que nous ne le croyons. Peu d’entre nous savent par exemple reconnaître sa larve, pourtant très utile au jardin car très affamée… de pucerons. D’autre part, si tout le monde connaît la coccinelle à 7 points (Coccinella septempunctata), on ne connaît guère ses petites soeurs.

Les larves

Voici quelques photos de larves de coccinelles prises au Jardin des Merlettes. Presque aussi vorace que l’insecte adulte, la larve en fin de croissance dévore environ 80 pucerons par jour. La coccinelle adulte en dévore environ 100.

Et c’est toujours un spectacle rassurant pour le jardinier que la vue d’un groupe de larves en action sur une pousse de pommier ! Pas de souci à se faire, l’arbre sera nettoyé en moins d’une journée.

Les insectes adultes (imago)

Voici quelques photos d’insectes adultes. Nous avons observé de nombreuses variétés au Jardin des Merlettes, en plus de la coccinelle à 7 points. Elle exhibent un nombre de points varié, ce qui n’a rien à voir avec leur âge, ont des formes et des couleurs différentes… sans oublier la redoutable coccinelle asiatique qui dévore ses congénères quand la nourriture se fait rare ! Michael Chinery, dans son livre ‘Insectes de France et d’Europe Occidentale’ (Flammarion, 2005) cite ainsi, parmi les coccinelles proprement dites, la Coccinella 7-punctata de Linné, abondante partout de mars à septembre, l‘Anatis ocellata, que l’on trouve souvent sur les les conifères (juin – juillet) et la Théa 22-punctata, sur les végétations basses (avril à août).

Les coccinelles ravageuses

Mais toutes les coccinelles ne sont pas les bienvenues au jardin. Il existe différents groupes dans la famille des coccinellidae et certaines cousines de nos coccinelles familières sont de redoutables ravageurs. Si les Coccidula scutellata pourchassent les aphides en été, d’autres espèces s’intéressent davantage à nos cultures. Ainsi au fil des mois, vous rencontrerez au jardin des Epilachna chrysomelina, rouge jaune, qui s’attaquent aux melons, et des Subcoccinella vigintiquatuorpunctata  (24 pooints) – (Linné 1758), rouge fauve, aux élytres à points noirs, qui s’attaquent aux cultures florales dans le midi de la France.

Chaque variété d’insecte opère à une période bien spécifique et uniquement à cette période. Lorsqu’il s’agit de ravageurs, cela permet au jardin de respirer. Mais pour les auxiliaires, on aimerait qu’ils soient là tout le temps pour nous aider. Heureusement, si la période d’activité est assez limitée pour les coccinelles, il n’en est pas de même pour d’autres auxiliaires qui participent à protéger le jardin toute l’année.

Les autres auxiliaires mangeurs de pucerons

Un peu de vocabulaire : ravageurs, auxiliaires et prédateurs.

Les ravageurs

On appelle ravageurs les insectes qui s’attaquent à nos cultures. Ils portent bien leur nom car ils font des ravages. Tel Attila, là où leur horde est passée, rien ne repousse… Enfin, ça dépend. Dans certains cas on s’inquiète pour rien car la plante se remet très bien de cet assaut printanier et en sort même renforcée. L’attaque aura tout au plus calmé une vigueur très grande. Pour les plantes plus chétives en revanche, l’assaut peut être fatal.

Les pucerons sont des ravageurs. Ils sont redoutables tant par leur appétit pour sucer la sève de nos plantes que par leur nombre, leur diversité (avec ou sans ailes) et la longueur de la période pendant laquelle ils sévissent. Ils privilégient toujours l’extrémité herbacée des branches. C’est en observant régulièrement ses arbres que l’on peut se repérer les attaques des insectes ravageurs. Voici des photos de trois espèces très répandues. A gauche, le Myzus Persicae, ou Puceron vert du Pêcher, qui sévit au printemps. Au centre, le Puceron lanigère du pommier, Eriosoma lanigerum, qui s’attaque aux branches en été et aux racines en hiver. A droite, le Puceron noir de la fève, Aphis fabae qui hiverne sur fusain ou genêt à l’état d’oeuf et pullule en été sur de très nombreuses plantes.

Les auxiliaires

Et voici la contre attaque : les auxiliaires. Il est important de les prendre en compte avant de recourir à des produits insecticides destinés à éliminer tel ou tel ravageur, mais qui supprime en même temps nombre d’auxiliaires. Il ne faut pas détruire ces derniers mais, au contraire, leur permettre de bien s’acclimater au jardin. En effet, leur cycle de vie est calqué sur celui de leurs proies et ils protégeront le jardin de façon plus durable et moins polluante que tous les produits chimiques
Le souci, c’est que les auxiliaires ne sont pas toujours ceux qu’on croit et que certains, pourtant très utiles contre les ravageurs de nos cultures, sont largement méconnus et donc méprisés, voire pourchassés par les jardiniers. D’où l’idée d’une formation pour apprendre à les reconnaître.

On distingue les auxiliaires prédateurs et les parasitoïdes :

  • Les prédateurs chassent et dévorent leurs proies, c’est le cas des coccinelles.
  • Les parasitoïdes procèdent différemment. Ils pondent dans l’abdomen des insectes, acariens ou pucerons, par exemple, à l’aide d’un ovipositeur situé à  l’extrémité de leur abdomen. Les oeufs éclosent et les larves se développent en dévorant leurs hôtes. La photo ci dessous montre l’un de ces insectes (probablement une punaise translucide) doté d’un ovipositeur. On imagine facilement les ravages que peut provoquer cet instrument !
Punaise à oviposteur

Quelques insectes auxiliaires méconnus

Non seulement la coccinelle n’est pas le seul auxiliaire du jardinier dans sa lutte contre les pucerons, mais elle n’est pas non plus la plus efficace. Le journal « Avertissements agricoles AQUITAINE » N° 10 du 3 mai 2007 proposait ainsi un recensement des auxiliaires contre les ravageurs des vergers. Pour la lutte contre les pucerons, il classait les auxiliaires en deux groupes selon leur efficacité contre les ravageurs :

D’une efficacité importante : les chrysopes, les syrphes, les cécidomyies

Les chrysopes :

Les larves de chrysopes sont des prédateurs redoutables. Elles consomment principalement des pucerons et acariens (jusqu’à 500 pucerons ou 10000 acariens au cours de leur développement), mais peuvent aussi s’attaquer aux oeufs et jeunes larves de lépidoptères.

Les syrphes :

Les syrphes, de couleur jaune et noire, sont souvent confondus avec les abeilles et les guêpes. Or elles ne sont pas des hyménoptères mais des diptères (elles n’ont que deux ailes), communément appelées ‘mouches’. Leurs larves peuvent consommer de 400 à 700 pucerons au cours de leur développement.

Les cécidomyies :

Leurs larves, par exemple celles d’Aphidoletes aphidizyma, peuvent consommer jusqu’à 20 proies par jour. Les cécidomyies sont également des diptères et dévorent aussi des acariens.

La chrysope est à gauche, le syrphe au milieu et la cécidomyie à droite. Ces photos ont été prises au Jardin des Merlettes, sauf celle de la cécidomye, trouvée sur le site internet aramel.free.fr (crédit photo M. Chevriaux). La taille du syrphe (environ celle d’une mouche) et celle de la chrysope sont environ celles des photos ci dessous. L’image de la cécidomyie, en revanche, est grossie environ 10 fois. Elle ne mesure que quelques millimètres seulement, ce qui explique pourquoi elle est difficile à observer (et encore plus, à photographier).

D’une efficacité moyenne, les coccinelles, les staphylins, les forficules et certaines espèces d’acariens et de punaises.

Les coccinelles :

Les aphides (les pucerons) sont leur nourriture favorite. Les statistiques concernant leur appétit varient selon les auteurs : de 50 ou 70 insectes par jour, pour larves et adultes, respectivement, à 80 ou 100. Les espèces plus petites se nourrissent également d’acariens ou de cochenilles.

 Les staphylins :

Ils sont généralement noirs et de forme très allongée. Larves et adultes sont polyphages. Ils se nourrissent d’acariens, de pucerons et de larves de diptères. Leur abdomen rappelant celui du scorpion, il n’y a pas de surprise qu’ils soient moins populaires que les jolies coccinelles ! L’université catholique de Louvain a conduit une étude expérimentale sur l’efficacité des staphylins en lutte biologique contre les pucerons qui a conclu à leur grande efficacité.

 Les forficules :

Nous avons déjà plaidé la cause des forficules (de son petit nom ‘forficula auricularia’), bien méprisés en général. Des études, en particulier celles menées par l’INRA, au centre de recherche d’Avignon, ont pourtant montré leur action prédatrice contre les pucerons.

Voir la vidéo sur les forficules

Les acariens :

Les acariens ont bien mauvaise réputation, et souvent à raison puisque cet ordre d’insectes comprend les redoutables tiques et l’araignée rouge (Panonichus ulmi), un parasite important des arbres fruitiers. Mais certains acariens comme les trombidions ((Trombidium sp) vivent sur les plantes et chassent les pucerons et d’autres acariens ravageurs. Leur appétit n’est pas énorme, mais ceci est compensé par leur capacité de prolifération. Il sont difficiles à identifier en raison de leur petite taille et on les confond souvent avec les araignées rouges.

Les punaises :

Quant aux punaises, l’ordre des hétéroptères est si fourni qu’il regroupe aussi bien des insectes très indésirables que certaines cousines, comme la punaise translucide, que les arboriculteurs québécois considèrent comme prometteuse dans la lutte intégrée (Revue Vertigo Volume 2 Numéro 2, octobre 2001). 

Les photos ci dessous montent un forficule, appelé familièrement perce oreille (à gauche), un staphylin trouvé sur le site www.salamandre.net au milieu et, à droite, un acarien s’attaquant à un puceron, trouvé sur le site www.galerie-insecte.org , deux sites participatifs spécialisés sur les insectes et que je vous recommande au passage.

De tous ces insectes, seules les coccinelles sont appréciées des jardiniers, peut être parce qu’elles sont si jolies et ont l’air tellement inoffensives. Les autres insectes cités sont pourtant tout aussi efficaces, mais ils font souvent peur et sont les victimes de préjugés.

Comment inviter ces auxiliaires dans son jardin ?

Le jardinier sait donc souvent assez peu de choses sur le monde des insectes et leurs multiples interactions. Alors, comment faire pour laisser un équilibre naturel s’instaurer. Dans le doute, on est bien souvent tenté d’intervenir car certains insectes sont parfois des auxiliaires prédateurs à un moment de l’année, pour devenir ravageurs à d’autres.

 Dans leur livre ‘Coccinelles, primevères, mésanges… La nature au service du jardin‘ ( Terre Vivante, 2008), Denis Pépin et Georges Chauvin offrent une mine de renseignements pour nous aider dans cette démarche de jardiniers naturalistes et nous permettre d’aménager des espaces du jardin favorables aux auxiliaires. Ils citent en particulier les plantes ‘hôtes’ favorites à chaque insecte.

Le mot de la fin : la patience. Il ne faut pas raisonner à court terme mais essayer d’instituer un équilibre stable. Même si chaque insecte ne nous est activement “utile” qu’à une certaine période de l’année, il faut lui permettre de conduire à son terme son cycle de reproduction. Il faut donc procurer gîte et nourriture toute l’année pour favoriser son installation durable. Ce sera l’objet d’un prochain article. Nous vous expliquerons également comment soigner la biodiversité de votre jardin.

Le stage du Jardin des Merlettes intitulé “maladies et ravageurs” est une initiation à la lutte intégrée au jardin et, en particulier, au jardin fruitier. Il a lieu deux fois par an, au printemps et en automne, des moments où la pression des ravageurs et des maladies se fait intense. Ne vous laissez pas rebuter par le titre, c’est très amusant et vous vous passionnerez vite pour le monde des insectes.

Blog 2021 12 : la plantation des arbres et arbustes en automne : pourquoi à la Sainte Catherine ?

Et voici de nouveau la Sainte Catherine, une journée qui marque le début de la période la plus favorable pour la plantation des plantes pérennes, arbres et arbustes: “À la Sainte Catherine, tout arbre prend racine…”. Cette saison va durer jusqu’aux froids de janvier, sauf épisodes neigeux. En 2009 il a neigé le 19 décembre, en 2010, dès le 19 novembre. En 2021, on a vu les premières neiges en Val de Loire le 3 décembre.

Écouter le podcast

Pourquoi planter en novembre ?

Le système souterrain (les racines) travaille en différé par rapport au système aérien (les feuilles).

En automne, la sève se retire dans les racines (elle ‘descend’), entraînant la chute des feuilles. A partir de ce moment la partie aérienne de la plante entre en repos végétatif. Mais les racines, elles, continuent de pousser. Planter un arbre en novembre permet donc à son système racinaire de bien s’installer avant les grands froids. Au printemps, l’arbre repartira avec d’autant plus de vigueur que son système racinaire sera bien développé. Il sera également plus résistant en cas de sécheresse. Au printemps, l’inverse est vrai, et les bourgeons se réveillent avant les racines.

On plante maintenant les arbres et arbustes à racines nues.

Certains rosiéristes ou obtenteurs d’arbres réputés n’expédient leurs plantes qu’à partir de la fin novembre. Donc, pas de panique pour ceux qui souhaitent encore réfléchir à quelques commandes, la saison bat son plein encore pour quelques semaines.

On peut planter jusquau début de lhiver

Cependant, on ne peut planter qu’à condition que le sol ne soit pas gelé. La période la plus favorable s’étend sans conteste de mi novembre à mi décembre car les racines ont le temps de bien s’installer avant les grands froids de janvier.

Préparer les végétaux

Praliner pour réhydrater avant de planter

Le pralin est un mélange de bouse de vache séchée, d’argile et d’eau. On trempe les racines de la plante dans un pralin pour que le chevelu de la plante soit imprégné d’une substance favorable à son développement. Mais le pralinage sert surtout à réhydrater la plante avant la plantation. C’est une précaution très importante car les végétaux souffrent lors des manipulations et attendent parfois quelques semaines entre arrachage et replantation. A défaut de pralin, un trempage dans un seau d’eau fera l’affaire, et cette étape est indispensable. Laissez donc ‘boire’ vos plantes avant de les planter.

Pralinage

Mettre les végétaux en jauge

Si l’on ne peut pas planter des végétaux dès leur réception, il faut défaire le paquet d’expédition le plus rapidement possible. Attention, le séjour dans un garage ou pire, dans une cave, s’il protège les plantes du gel, n’empêche pas leur déshydratation, au contraire. Or celle ci est très dangereuse pour les racines. Il faut donc mettre les plantes en jauge, c’est à dire placer tout le chevelu dans un trou, le recouvrir de terre ou de sable et arroser. Protégée ainsi du gel et de la soif, la plante attendra le jour de sa plantation et si plusieurs jours ou même plusieurs semaines se sont écoulés avant la plantation, le jardinier pourra constater que le système racinaire s’est développé dans la jauge en produisant de nombreux petits radicelles. Attention donc aux garages desséchants.

Jauge de sable

Protéger les végétaux pendant la plantation

Le dessèchement des racines est dangereux pour la bonne reprise des végétaux. Alors il faut les protéger jusqu’à ce qu’ils soient bien plantés. Cela implique en particulier de se méfier du vent pendant la plantation. Lorsque l’on commence à planter et qu’on sort les plantes de la jauge pour les apporter sur le lieu de plantation, on oublie souvent de les protéger. Pas de souci si vous ne plantez que deux ou trois sujets. Au delà, il faut penser à entourer les racines des arbustes en attente avec une bâche ou un carton pour éviter que les racines ne se dessèchent. Même une demi journée en plein vent peut endommager le chevelu racinaire. Un simple carton fait l’affaire. Simple et très efficace, encore faut il y penser.

Tailler ou rafraîchir ?

On préconise généralement de rafraîchir les racines, c’est à dire de tailler légèrement leur extrémité (photo du milieu). Si le chevelu est en bon état (photo de gauche), ce n’est pas forcément nécessaire. Il suffit de vérifier qu’aucune racine n’est abîmée et qu’un chignon n’est pas en train de se former, sinon bien sûr, il faut tailler (photo de droite). Il en va de même pour les branches, mais la plantation n’est pas forcément le bon moment de faire une taille de mise en forme. Cela peut attendre quelques jours.

La plantation proprement dite

Un vieux débat, la taille du trou à préparer

Faut il un gros ou un petit trou de plantation, le faire à l’avance ou au moment de planter ? La réponse est simple : ça dépend du sol. En sol argileux, il ne sert à rien de s’y prendre à l’avance car une pluie qui survient bouche le trou et le sol fraîchement remué et imprégné d’eau est beaucoup plus long à ressuyer, rendant la plantation difficile. Dans une terre à lapins très poudreuse et légère, ce n’est pas non plus la peine de s’y prendre à l’avance car la plantation est rapide. Il n’y a donc que dans les sols très difficiles où l’intervention d’un engin, est nécessaire, que l’on prépare les trous de plantation à l’avance. Nous avons ainsi dû creuser à la pelleteuse à certains endroits du Jardin des Merlettes envahis de silex.

Préparer soigneusement le trou

En particulier, il faut s’assurer que les parois ne sont pas lisses après le passage de la bêche. Si c’est le cas, les griffer. Et dimensionner le trou en fonction de la taille de la motte à installer : parfois large et relativement plat (certains arbres fruitiers, les pommiers par exemple) ou au contraire relativement étroit et profond (pour les rosiers).

La taille nécessaire pour le trou dépend également de l’état du sol

Meilleur le sol, plus petit le trou à préparer car les racines y feront facilement leur chemin. En revanche, un sol compact demandera la préparation d’un volume plus grand. Si l’on doit creuser profond, attention aux horizons du sol : il faut veiller à ne pas les inverser pour protéger la vie du sol. Les insectes, mais aussi les vers de terre et les bactéries vivent à des profondeurs très spécifiques. Les enfouir trop ou, au contraire, les amener trop en surface, peut provoquer leur disparition.

Faut-il apporter des engrais à la plantation ? Tout dépend de votre sol, encore une fois.

Beaucoup de jardiniers ont l’impression d’aider leurs jeunes arbres en leur apportant un engrais au moment de la plantation. Une nourriture facilement assimilable, en quelque sorte un viatique pour les premiers mois d’adaptation. Mais dans un sol bien structuré et vivant, il n’y a pas besoin d’engrais. Ce n’est certes pas le cas partout, mais nous pensons que le jardinier doit soigner son sol tout au long des années. Si c’est le cas, il n’y a pas de soin particulier à apporter lors de la plantation. Et sinon la poignée d’engrais n’est qu’un cautère sur une jambe de bois !

Se méfier des engrais près des racines 

En effet, les engrais peuvent brûler les racines. Cela vaut aussi pour le fumier, s’il n’a pas eu le temps de se décomposer et de se transformer en compost. Ne pas enfouir non plus d’herbe au pied de l’arbre. En se décomposant, elle perturbe les échanges gazeux et se révèle nocive.

Préparer très en avance

Si vous êtes convaincus par nos explications, essayez de prévoir dès maintenant vos plantations de l’an prochain et d’installer bâches, mulch et BRF pour faire revivre le sol de votre jardin aux endroits que vous souhaitez planter.

Voir le stage ‘Soigner le sol de son jardin’

La hauteur à laquelle on plante l’arbre ou l’arbuste par rapport au sol est très importante

Il faut absolument éviter d’enterrer le collet (la limite entre la partie souterraine et la partie aérienne) de la plante car ceci entraînerait le pourrissement de certains arbres et l’affranchissement de certains autres. Pour éviter de se tromper, on place un bâton en travers du trou de plantation, bien en appui sur le sol des deux côtés du trou, et ceci sert de repère. Et nous vous recommandons aussi de planter à deux. L’un maintient le sujet, l’autre apporte la terre, ce qui évite que la plante descende ou se mette de travers au fur et à mesure que l’on ajoute de la terre. Ainsi on plante droit et au bon niveau !

On dispose les racines bien écartées

On les place en étoile, éventuellement en les plaçant sur un petit dôme de terre, si leur forme s’y prête. Chacune partira ainsi dans sa propre direction et un volume maximum de terre sera investigué par le système racinaire.

On recouvre de terre

On ne jette pas de grandes pelletées, mais on émiette la terre à la main en vérifiant qu’elle glisse bien entre les racines. Le sujet doit pouvoir tenir droit même avant qu’on ait tassé la terre à la main, (et non pas au pied !).

Enfin, on arrose à l’arrosoir, au goulot, pour finir de tasser la terre

Au Jardin des Merlettes, où le sol est très argileux, ceci ne s’impose pas car la première pluie se chargera de tasser le sol très soigneusement émietté. En revanche, on met un peu plus de terre au pied de chaque arbre car la terre qui a foisonné à la plantation prendra beaucoup moins de place une fois arrosée et certaines racines pourraient se trouver à nu.

Piquets et haubanage

Il est généralement nécessaire dattacher la plante à un piquet pour la protéger du vent

Le vent secoue en effet les plantes et ralentit ou empêche le développement du système racinaire. Le piquet doit être enfoncé bien profondément, plus que la hauteur de terre remuée à l’occasion de la plantation.

On commence par installer le piquet, si possible du côté du vent dominant, puis on présente l’arbuste et on le plante de façon à ce que ses branches ne soient pas gênées par le piquet. Au cours de l’hiver, il faut vérifier que l’arbuste ne frotte pas contre le piquet et, si c’est le cas, installer une petite séparation, en caoutchouc ou en polystyrène par exemple. Et par la suite, penser à desserrer le lien pour ne pas étrangler le jeune arbre. Il faut également se méfier de la gêne que peut occasionner un piquet pour le développement des branches latérales. Sur la photo ci dessus, on voit que le cyprès chauve (Taxodium Distichum) ne peut pas développer de branche sur presque la moitié de sa circonférence. Le piquet a été retiré depuis mais il est trop tard pour que de nouvelles branches poussent au bas de l’arbre. Celui ci restera donc déséquilibré pendant encore quelques années.

Il faut parfois haubaner

Un piquet seul n’est parfois pas suffisant si l’arbre a besoin d’être attaché par plusieurs angles. Ce n’est généralement pas le cas quand on plante petit, ce que nous recommandons chaque fois que possible. Quand on cherche à restaurer un alignement et que l’on a besoin de planter une ébauche d’arbre, il faut haubaner. Pour un jeune scion, ce n’est pas nécessaire.

Protection et grillage

Quand on a suivi toutes ces dispositions, l’arbuste est bien planté, bien installé, mais la tâche n’est pas finie. Il faut en effet penser à le protéger du mauvais temps et des ravageurs.

Installer un paillage au sol

Cela protège (un peu) contre les mauvaises herbes et surtout évite l’évapotranspiration. Les printemps récents ont été très secs. Le paillage diminue le besoin en arrosage. Il est plus ou moins efficace contre les mauvaises herbes mais le sol, protégé du martèlement des gouttes de pluie par le paillage , reste meuble et est plus facile à désherber. Tant mieux car il est important de désherber le pied des arbustes dans leurs jeunes années, pour éviter la concurrence des graminées, très gourmandes en eau. C’est vrai qu’un dispositif aussi important que sur la photo ci-dessous peut faire sourire car on devine à peine le jeune scion de pommier à côté du bambou, mais ‘petit scion deviendra vite grand’, surtout s’il est bien protégé ! Le feutre est dévoré en deux ou trois ans par les petites bêtes du sol, juste le temps qu’il faut à l’arbuste pour s’implanter. On retire ensuite la toile verte et on la remplace par notre paillage fétiche composé de carton, fumier et mulch ou fétiche qu’on renouvelle environ tous les trois ans.

Super protection : toile verte sur feutre

Installer un grillage

Pas de problème si votre jardin est en ville, quoique… il faut aussi se méfier des griffes du chat du voisin. Et, en pleine campagne, penser à adapter la taille du grillage à celle du ravageur, petit, moyen ou gros gibier ! On ne protège pas contre des lapins ou des lièvres de la même façon que contre des chevreuils ou des sangliers. Et surtout, ne pas attendre mais mettre les protections en place dès la plantation !
Le Jardin des Merlettes est protégé par un grillage assez haut qui évite les incursions de chevreuils. Mais nous installons systématiquement des filets autour de nos nouvelles plantations car les lièvres du jardin sont très curieux. Ils ont besoin de goûter tout ce que l’on plante. Quand ils cisaillent un bout de branche, cela n’est pas dommageable. En revanche, c’est beaucoup plus grave quand ils s’attaquent au tronc or on ne s’en rend pas forcément compte tout de suite. En général, on installe maintenant un protège tronc souple puis un grillage en seconde protection. Nos voisins qui sont exposés aux ravages des chevreuils sont obligés de construire une protection beaucoup plus importante.

En résumé : planter bien, c’est planter soigneusement, en prenant son temps. Au Jardin, on compte que l’on peut, à deux personnes, planter environ 10 à 15 arbres par jour lorsque le travail est fait par des jardiniers amateurs, dans un terrain sans grande difficulté et que le chantier a été préparé, c’est à dire que tous les outils et le matériel nécessaire sont à disposition. Je parle ici d’ébauche d’arbres qui ne font pas plus de deux mètres de haut et qui n’ont pas encore développé de branches secondaires. Ce temps comprend aussi la mise en place des piquets, d’un petit grillage pour protéger le tronc et d’une couverture au sol. Pour les arbustes, on prévoit de planter environ 20 à 25 arbustes par jour.

Une bonne plantation est un gage de bonne reprise, alors, à vous de jouer !

Et, pour conclure, nous vous proposons ces photos de notre roseraie juste à la plantation, puis un an et trois ans plus tard

Pour ceux qui voudraient aller plus loin, nous vous rappelons aussi notre stage de création et plantation de verger

Voir le stage de plantation et gestion de verger

Blog 2021 11 : La taille des forsythias

Quand l’automne est bien installé et que les feuilles des arbustes sont tombées vient la saison des tailles. Le jardinier profitera des belles journées pour remettre en état son jardin et, en  particulier, tailler ses arbustes.
Tous ses arbustes ? Non, justement pas. Le forsythia par exemple, ce symbole du printemps, se taille après sa floraison, c’est-à-dire, à partir de la mi-avril environ, selon les régions. Mais au fait, pourquoi faut-il tailler les forsythias, pourquoi à la fin du printemps, et comment ?

Pourquoi faut-il tailler les forsythias ?

La floraison des forsythias s’effectue sur du bois de deux ans. Les fleurs que vous venez d’admirer sur les arbustes de votre jardin ont donc éclos sur du bois qui avait poussé entre les mois de mai et de septembre d’il y a deux ans, et plus précisément entre mai et juillet. Des fleurs se forment également sur du bois d’un an (de l’année précédente) mais cette floraison est généralement peu fournie. En revanche, lorsqu’une branche atteint trois ans, elle commence à vieillir, fleurit moins et finit par se dessécher complètement.
Il faut donc opérer une taille sélective : encourager le forsythia à faire de nouvelles pousses et à se régénérer, c’est à dire à renouveler sa charpente tout en protégeant les pousses encore jeunes des deux années précédentes. Et, inversement, ne pas tailler un forsythia aboutit immanquablement à un enchevêtrement de branches, comme sur l’image ci-dessous. L’arbre finit par s’épuiser.

Pourquoi tailler fin avril et non pas en hiver, comme tant d’autres arbustes ?

On l’aura compris, si l’on supprime en hiver du bois qui devrait fleurir au printemps, c’est autant de floraison que l’on supprime. Cette question de la période favorable de taille peut paraître anodine, pourtant elle est une source de déconvenue pour de nombreux jardiniers. Pour savoir à quelle période tailler un arbuste d’ornement il faut observer ses boutons floraux : quand ils se forment et sur quel bois. Vous en déduirez la période optimale de taille. Par exemple, si un arbuste fleurit sur le bois de l’année, c’est à dire si les rameaux qui ont poussé au printemps portent des bourgeons qui forment des fleurs au cours de la même saison, alors la taille d’hiver est la mieux appropriée. On profite du repos végétatif de la plante pour supprimer les branches enchevêtrées et rectifier la structure de l’arbuste. En revanche, lorsque la plante fleurit sur une pousse déjà aoûtée (qui a passé le mois d ‘août de l’année précédente et s’est lignifiée), alors on attend que la floraison ait eu lieu et on intervient ensuite. C’est le cas des camélias, de certaines spirées et, généralement, de nombreux arbustes à la floraison précoce. Le fruticetum (jardin d’arbustes) du Jardin des Merlettes a été planté tout spécialement pour permettre aux visiteurs d’observer ces différences lors des stages consacrés à la taille des arbustes et lianes d’ornement.
Et voilà donc résolu le mystère de certains rosiers “qui ne fleurissent jamais”… parce que leur propriétaire, plein de bonnes intentions, rabat chaque printemps les pousses qui se préparaient à porter des fleurs. Car pour les rosiers aussi, il existe une taille d’hiver et une taille d’été, mais ne nous dispersons pas…Vous trouverez ailleurs dans ce blog et dans nos podcasts tous les conseils sur la taille d’hiver et la taille d’été des rosiers.

Voir les stages de taille de rosiers du Jardin des Merlettes
Taille d’hiver
Taille d’été

Comment tailler ?

Il faut observer le type de végétation de la plante. Lorsqu’un arbuste émet de nouvelles pousses à partir de sa souche, on dit qu’il est basitone. Il est important de l’aider à renouveler sa charpente : on peut par exemple travailler sur un cycle de 3 ou 4 ans en taillant chaque année à la base de l’arbuste un quart des pousses, les bois les plus âgés. En revanche, un arbuste acrotone (qui n’émet pas de rejet spontané à partir de sa base) sera taillé pour mettre en valeur sa structure, en éclaircissant les branches à l’intérieur et en raccourcissant les autres par une taille légère. Rien de bien difficile, il faut juste un peu de pratique, ce que nous proposons lors de nos stages.

Et notre forsythia ? Et bien, il est particulièrement intéressant car il n’est ni strictement basitone, ni acrotone, mais un mélange des deux, mésotone. Lorsqu’on le taille à la base, il émet des rejets très vigoureux, parfois un peu inesthétiques. L’année suivante, ces branches s’arquent et commencent à porter quelques fleurs. On peut les raccourcir en partie ou leur laisser toute leur longueur. La seconde année, des rameaux secondaires apparaissent et portent une abondante floraison. La branche fleurira encore un ou deux ans, puis il faudra la supprimer, à la base, tout simplement.


Bien entendu, sur ce sujet comme sur tant d’autres, il n’y a pas d’obligations. On peut choisir de mener son forsythia en topiaire ou, au contraire, choisir un port très dégingandé et éclairci comme montré ci dessus. Dès l’instant que l’on a compris le fonctionnement biologique du végétal, on obtient l’effet que l’on souhaite. Alors, ne négligez plus vos forsythias au printemps, ils vous remercieront bien pour votre peine ! Et si vous avez encore des doutes, venez suivre un stage d’initiation à la taille des arbustes au Jardin des Merlettes, au printemps.
Voir le stage de taille des arbustes au Jardin des Merlettes

Blog 2021 10 : Ravageurs et maladies au jardin (Partie I) – Repérer les soucis

Certaines maladies reviennent chaque année, on le sait bien : la grippe en hiver et le rhume des foins au printemps. Au jardin, c’est pareil, certains fléaux attaquent nos plantes à certains moments de l’année. Pourtant, on a beau savoir que le mal va arriver, on se laisse souvent surprendre. Et quand on se rend compte que la maladie ou le prédateur sont là, le mal est déjà bien installé et souvent plus difficile à combattre.
Nous vous proposons ici quelques méthodes pour contrer les attaques des maladies cryptogamiques et des insectes et araignées les plus courants. Dans cet article, on cherche à repérer les problèmes potentiels et diagnostiquer l’importance des attaques.  Dans le suivant, on réfléchira aux méthodes de lutte en agriculture biologique.

Le jardinier est un promeneur attentif
La première règle pour protéger son jardin est de savoir le regarder car bien connaître ses arbres ou ses plantes est le meilleur moyen de reconnaître quand ils ne vont pas bien. Chaque changement par rapport à ce que l’on voit d’habitude pour un arbre donné peut constituer un indice : le changement de la coloration d’une feuille, la tenue moins rigide d’une hampe florale, le gonflement anormal d’une branche ou le fait qu’elle se torde, une écorce qui s’abîme…
Un petit tour au jardin chaque fois que l’on peut est donc la meilleure façon de détecter les difficultés. C’est extraordinaire tout ce que l’œil saisit et enregistre et ce que le cerveau classe, méthodiquement. Voici par exemple à gauche la photo d’un plaqueminier ‘Muscat’: port érigé, feuilles larges souples et luisantes, écorce impeccable, il respire la santé. A droite, le même kaki, trois ans plus tard, juste après les gelées de juin 2017. De très loin et avant même de savoir exactement ce qui s’est passé, le jardinier comprend que quelque chose de grave s’est passé.

Lorsque l’on a pris l’habitude de regarder, on peut voir les différences, et les évolutions peu encourageantes. C’est un moment critique car, soyons honnêtes, on a souvent tendance à nier les problèmes. Soit on ne les comprend pas, soit on les minimise. Or, s’il y a une anomalie, il faut comprendre pourquoi. Voyez ces photos d’un saule Salix udensis ‘Sekka’. A gauche, la vue globale. Les photos de droite montrent que lorsque l’on s’approche on remarque le gonflement et l’aplatissement de certains rameaux. En l’occurrence, tout est parfaitement normal. C’est une particularité de cette variété d’avoir ses rameaux contournés et aplatis. Quand on ajoute qu’il présente au printemps de très gros et nombreux chatons, on comprend pourquoi il est très utilisé en art floral oriental.

En revanche, voyez cette branche de framboisier. Elle aussi est gonflée, or ce n’est pas normal du tout. Il s’agit d’une galle provoquée par les larves de Lasioptera rubi, une espèce de cécidomyie, une minuscule Mouche noire de 2 mm, qui a pondu l’année précédente dans les pousses tendres. Selon le site ‘Démons et merveilles’ « Chaque galle uniloculaire contient de nombreuses larves, l’intérieur de la loge est tapissé du mycélium d’un champignon microscopique introduit par la femelle au moment de la ponte. Le champignon se développe en même temps que les larves qui le consomment au lieu de se nourrir du végétal dont la croissance n’est pas affectée. » (voir l’article de ‘Démons et merveilles’)

Donc, regardez et cherchez, le reste vient facilement.

Soyons donc des promeneurs attentifs au jardin, des promeneurs qui prennent leur temps. Voici en particulier deux éléments que vous devez systématiquement vérifier :

  • Le feuillage des plantes : sa vigueur, sa taille, sa couleur. Par exemple, s’il est normal qu’il soit taché de brun en automne, ce n’est pas le cas au printemps. Vérifiez s’il est piqué, perforé, dévoré ou si, tout simplement, la plante semble avoir du mal à le fabriquer… Un végétal qui a du mal à produire son feuillage est souvent en grand danger. Mais ne confondez pas pousse maladive et pousse tardive. Le lagerstroemia (aussi appelé lilas des Indes) pousse très tard en saison. En Bourgogne, fin mai ou début juin. Il se développe ensuite très vite. Rien d’anormal à cela. En revanche, un pommier qui n’a pas de feuillage en mai est certainement en souffrance.
  • L’écorce des plantes : il faut l’observer de la tête au pied de l’arbre ou de l’arbuste. Y a-t’il des blessures, avec ou sans bourrelet de cicatrisation, des signes de nécrose, des trous anormaux, des petits dépôts de sciure ? Cela peut nécessiter que vous vous mettiez régulièrement à genoux au pied de vos arbres, un exercice bien inconfortable, mais croyez-moi, vous serez bien payé de votre effort.

En effet, plus tôt vous décèlerez une anomalie, plus tôt vous pourrez y remédier, comme nous le verrons plus tard. Mais il faut parfois être très attentif : remarquez vous ces œufs bien disposés autour du pédoncule de de bouquet de fleurs de poirier ?

Les stades phénologiques 

Des repères tout au long de l’année :
Les scientifiques ont cherché à jalonner la croissance des plantes au cours de l’année pour signaler certaines étapes particulièrement significatives dans le développement de la plante, de la fleur et du fruit. C’est ce qu’on appelle les stades phénologiques. La phénologie est l’étude de l’apparition d’évènements périodiques dans le monde vivant, animal ou végétal. Une planche très connue en France est celle ci-dessous, éditée par l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) et qui montre les étapes du développement des fruits.

Chaque variété est ainsi décrite pour caractériser ses différents stades de développement. Ci-dessous par exemple, la planche de l’INRA présente les stades phénologiques du poirier et celle du CITFL (Centre Technique Interprofessionnel des Fruits et Légumes) présente ceux du framboisier. Le site internet de l’UFL (Union Fruitière Lémanique) présente des planches de stades phénologiques pour de nombreux fruits. Elles ont été préparées par l’INRA, par le CIFTL ou par le Service de l’Agriculture du Canton de Vaud.

Chaque plante passe ainsi chaque année par un certain nombre de stades codifiés qui correspondent à un événement physiologique pour la plante.

  • Le repos hivernal, après la chute des feuilles : le bourgeon d’hiver
  • Le gonflement du bourgeon
  • L’apparition des bourgeons floraux
  • Le stade de pleine floraison, quand toutes les fleurs sont épanouies
  • La nouaison : stade auquel le fruit commence à se former
  • La véraison : le fruit commence à mûrir et à changer de couleur

Ces stades sont nommés par des lettres, de A à J. Quelques exemples :

Fruitiers au stade de bourgeon gonflé (B)
A la sortie de l’hiver, les écailles des bourgeons glissent lentement les unes sur les autres pour permettre aux bourgeons de grossir. C’est la dernière étape avant que le bourgeon ne commence à s’ouvrir et à laisser paraître des ébauches de fleurs ou feuilles, selon les cas.

Fruitiers au stade de pleine floraison (F2)
Les fleurs sont ouvertes, bien étalées (kiwi, à gauche), ou simplement épanouies (cerisier à droite). Pour le cassis (au centre) 50% des fleurs sont ouvertes.

Fruitiers au stade de la nouaison (H)
En général, tous les pétales sont tombés et la base du calice commence à grossir. Ci-dessous, les ébauches de fruits du myrtillier (à gauche), du pêcher (au centre) et du poirier (à droite).

Pourquoi surveiller ces stades de développement ? Parce que ce sont des étapes clés qui correspondent à des moments où les plantes sont sujettes à des attaques bien spécifiques : des aléas climatiques (gel, sécheresse…), ou bien des maladies ou ravageurs qui peuvent soit retarder (ou stopper) leur croissance ou compromettre leur floraison ou leur fructification. Ces attaques interviennent à des moments bien précis dont la chronologie est bien connue parmi les jardiniers. Voici par exemple ci-dessous un extrait du calendrier d’alerte pour les cerisiers proposé par l’association des Croqueurs de Pommes. Ne cherchez pas des pucerons sur vos cerisiers (ni sur vos rosiers d’ailleurs) en stade A ou C ! De même, la moniliose est une maladie cryptogamique qui requiert certaines conditions atmosphériques pour se développer. Vous ne pourrez donc l’observer qu’à partir du mois de juin environ, même si ses spores sont déjà bien présents, à l’état de dormance, dans votre jardin.

Source : Les Croqueurs de pommes. 2008. ‘Maladies et Ravageurs au Verger.’ Brochure technique.

Cela veut dire également que, pro ou prou, tous les arbustes d’une même espèce, fruitière ou ornementale, vont être au même stade phénologique à peu près en même temps. Les pomologues s’intéressent d’ailleurs aux retards (ou avances) éventuels. Les membres les plus zélés de l’Association des Croqueurs de pommes, par exemple, remplissent chaque printemps le bulletin ci joint et qui indique, variété par variété, la date à laquelle leur arbre a atteint le stade F2 (fleur épanouie). Pour permettre la comparaison entre les relevés correspondant à des jardins qui peuvent être sujets à des aléas climatiques différents, on indique également pour référence les dates en F2 du forsythia (une des premières plantes à fleurir) et de l’aubépine monostyle (tardive) à un endroit proche du verger objet du relevé.

L’exercice semble fastidieux… et il l’est, surtout si vous cultivez quelques dizaines de variétés dans votre jardin fruitier. Et vous vous apercevrez également qu’il n’est pas si facile à accomplir. Car il faut essayer de noter avec le plus de précision possible le moment où la majorité des fleurs a atteint le stade observé. Il faut passer souvent près des arbres pour ne pas rater le bon moment et établir un relevé fiable.
Mais c’est un bon exercice car il démontre que la rigueur est de mise quand on parle d’agriculture biologique, un argument qui reviendra dans la suite de cette série d’articles. En effet, puisque les moyens utilisés sont peu agressifs, leur utilisation doit être précise pour optimiser leur efficacité, en particulier en ce qui concerne leur date de mise en œuvre. C’est un élément que nous soulignons auprès de nos stagiaires, lors des stages qui traitent de la protection des végétaux contre les maladies et ravageurs, aussi bien en ce qui concerne les soins à apporter aux arbres fruitiers de plein vent que ceux consacrés aux petits fruits.
Observer régulièrement ses plantes et dépister les anomalies est la base de la lutte raisonnée. Pour être efficace, le dépistage doit être effectué de façon régulière, y compris à chaque période  critique. Et vous améliorerez beaucoup votre efficacité si vous prenez le soin de noter soigneusement vos observations au fil des années. Cela vous permettra des comparaisons sur un même endroit au cours du temps, ou entre différents endroits.

Le prochain article couvrant les ravageurs et maladies au jardin s’occupera d’identifier les maux observés

En attendant ce prochain article, nous vous proposons de méditer sur ces deux photos d’une inflorescence de pommier. A gauche, des bouquets en pleine forme (de deux arbres différents). A droite… peut mieux faire !