3 octobre 2022 : l’automne est là

Ça y est, c’est l’automne et on commence les récoltes de fruits pour lesquelles on a tant travaillé, et celles qu’on n’a pas méritées du tout et qui sont aussi très appréciées dans notre région de forêts, celles des châtaignes et des champignons. Elles s’annoncent bien belles. Au jardin, notre grand châtaignier est couvert de fruits et cette année les fruits sont gros malgré la sécheresse alors qu’ils étaient tout petits l’an dernier où il a tant plu en été… Parmi les châtaigniers plantés il y a 3 ans, deux vaillants (‘Bouche de Bétizac’ et ‘Dorée de Lyon’) font du zèle et portent déjà des fruits.

C’est le moment de préparer les plantations. Octobre sera donc consacré en grande partie aux choix et aux commandes de plantes, quand il pleut, et à la préparation du sol dès qu’on pourra mettre le nez dehors (60 mm de pluie la semaine dernière, on en avait bien besoin). Les livraisons n’interviendront qu’à partir de mi-novembre car on plante à racines nues, au Jardin des Merlettes.

Et le calendrier des stages et formations 2023 est en ligne depuis hier. On verra bien ce que les épidémies et autres calamités nous permettront de faire. Peu importe, on y croit ! En cliquant sur le stage qui vous intéresse, vous ouvrirez la page contenant tous les détails.

À bientôt, au jardin !

S4 E7 Podcast : comment choisir ses rosiers

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Quand on souhaite planter des rosiers, les catalogues regorgent de merveilles. Mais comment choisir ? Le propos semble anodin mais rien n’est plus dommage que de voir un rosier mal adapté à l’endroit où il est planté. Tout le savoir-faire du jardinier ne pourra pas compenser un mauvais choix à la plantation.
Ce podcast propose quatre règles d’or pour choisir un rosier : Des plantes en bonne santé, une forme de rosier appropriée àl’endroit où il est planté, un besoin d’entretien de la variété choisie bien synchronisé avec la disponibilité et le savoir-faire du jardinier. Et bien sûr, un rosier dont la couleur, les pétales, le parfum enchantent le jardinier et/ou ceux pour qui le rosier a été planté !
Une fois choisis vos critères, le nombre de rosiers ‘éligibles’ pour votre petit coin de paradis se réduit étonnamment. Mais le résultat sera à la mesure de vos efforts de recherche. 

Blog 2022 09 : Comment choisir ses rosiers

Le jardinier qui souhaite planter des rosiers a beaucoup de chance : l’offre des pépiniéristes est très fournie et les catalogues regorgent de merveilles. Oui mais… comment choisir ? Car si les rosiers sont en général des plantes faciles à cultiver, rien n’est plus dommage que de voir un rosier mal adapté à l’endroit où il est planté. Le propos semble anodin. Pourtant tout le savoir-faire du jardinier ne pourra pas compenser un mauvais choix à la plantation.

Il y a quatre règles d’or pour choisir un rosier :

  • Des plantes en bonne santé
  • Une forme de rosier appropriée à l’endroit où il est planté
  • Un besoin d’entretien de la variété choisie bien synchronisé avec la disponibilité et le savoir-faire du jardinier
  • Un rosier dont la couleur, les pétales, le parfum enchantent le jardinier et/ou ceux pour qui le rosier a été planté !
Rosier ‘Alchemist

Un rosier en bonne santé

Quelques régles à respecter.

Les rosiers ne supportent pas tous le froid. La plupart des rosiers résistent très bien au froid, témoin les magnifiques rosiers qui fleurissent chaque printemps devant les maisons de l’île de Gotland, à l’est de la Suède. Mais il y a desexceptions, et de taille, comme par exemple de nombreux rosiers thé. Ils ont tendance à geler jusqu’au sol en hiver, dans notre Puisaye. S’ils reprennent au printemps, ils sont simplement en retard sur la saison mais vigoureux. Mais certains ne se remettent pas de cet épisode rigoureux. Les rosiers chinensis, les noisette et les banksia n’aiment pas le froid non plus. En revanche, tous les Gallica, Rugosa et beaucoup de centifolia et alba sont bien résistants. Le rosier ‘Hansa’ ci dessous non seulement supporte le froid mais est d’autant plus beau que l’hiver a été rigoureux
Les hybrides modernes sont inégaux mais une taille très courte au printemps est souvent nécessaire.

Rosier ‘Hansa‘ en hiver

S’ils ne supportent pas tous le froid, en revanche les rosiers supportent bien la chaleur : certains rosiers nous viennent du Moyen Orient (Rose de Damas, de Perse) et ne craignent vraiment pas le soleil. A l’usage, les rosiers semblent même préférer le temps chaud au temps froid. Les épisodes de canicule de cet été 2022 l’ont amplement démontré et la plupart des rosiers de notre roseraie montrent en ce début septembre un feuillage bien fourni et brillant et préparent une belle remontée de fleurs.
Les rosiers ont besoin d’arrosage, mais moins que la plupart des plantes vivaces. Nous avons fait l’expérience cet été de pailler abondamment les pieds des rosiers mais nous ne les avons pas du tout arrosés. Ils ont bien supporté six semaines sans aucune pluie. En revanche, dès que les orages ont été assez conséquents pour traverser les paillages et réimbiber le sol, les rosiers ont produit de bien belles pousses, en avance sur ce que l’on voit en général début septembre. 
Inversement, les rosiers supportent mal un sol détrempé en hiver. Nous avons au Jardin des Merlettes quelques rosiers plantés et qui se portent bien à des endroits mal drainés et souvent inondés l’hiver. C’est le cas de ‘Mermaid’ et de certains rosiers botaniquesmais ce sont des exceptions, la plupart des rosiers n’aiment pas que leurs racines soient noyées.
Les rosiers préférent les sols argileux : il nous est bien facile de voir la différence entre les rosiers cultivés dans le jardin situé à Cosne même, dans le Val de la Loire, au sol léger et sableux, et ceux de la roseraie du Jardin des Merlettes, dans l’argile poyaudine, à environ 250 m d’altitude. Même bien enrichi en humus depuis des années, le sol du val donne de bien moins bons résultats. La structure du sol est un sujet sur lequel nous sommes particuliérement vigilants : les parterres du Jardin des Merlettes sont rechargés régulièrement en bois raméal fragmenté, terreau ou paillage de fétuque, paille ou mulch. A ce régime ne s’ajoute aucun engrais chimique, naturellement. Parmi les rosiers buissons particulièrement vigoureux et faciles : ‘Jubilé du Prince de Monaco’, ‘Westerland’ et ‘Mozart’.

Mais il faut bien reconnaître hélas que, même plantés dans des conditions idéales, certains rosiers sont fragiles : Même si la saison débute bien, ‘American Pillar’ se couvrira d’oïdium au début de l’été, de même que ‘Veichelblau’ (photo ci dessous) ou ‘Souvenir d’Alphonse Lavallée’. La différence est flagrante avec d’autres rosiers bien résistants. Autant le savoir. D’autres rosiers sont, eux, sujets au champignon Marsonia , appelé aussi ‘maladie des taches noires’ et perdent toutes leurs feuilles en début d’été. C’est le cas des rosiers ‘Alchemist’ , ‘Prince Igor’ et ‘Madame Butterfly’. Cette faiblesse ne nous a pas empêchés de les planter. Nous ne nous en préoccupons pas trop et nous contentons de tailler les branches les plus atteintes et d’arroser les rosiers les plus touchés. La pousse de remplacement qui s’ensuit en milieu d’été est en général saine.

Oidium sur rosier ‘Veichelblau’

Choisir où planter en recensant les milieux du jardin

Dans un jardin, les propriétés du sol, l’espace disponible, l’ombre portée par les bâtiments alentour et les arbres, le vent, le climat, sont autant de circonstances qu’on ne pourra pas changer. En revanche, la combinaison de ces éléments, favorables ou défavorables, peut changer de façon importante d’un endroit du jardin à l’autre et un jardinier peut utiliser ces différences de façon astucieuse.
Autant que possible, on plante les rosiers dans l’endroit du jardin le mieux adapté à leurs besoins, c’est à dire celui qui répond au plus grand nombre de critères positifs et, par ordre d’importance, de la lumière, de l’air, et un peu d’espace, tel ce rosier grimpant ‘Madame Meilland’, de plus de cinquante ans d’âge, qui contraste avec l’aspect chétif d’autres rosiers du même jardin qui ne reçoivent pas assez de lumière.

Mme Meilland’ ou ‘Peace’

Un rosier pour chaque usage

Il faut ensuite considérer la hauteur et la largeur souhaitée pour la plante qu’on installe. Bien sûr, ça coule de source…mais on a tendance à oublier cette question quand on achète un rosier. Selon l’objectif recherché, l’espace à investir ou le support à habiller, mais aussi l’association recherchée avec les plantes déjà en place et l’ambiance que l’on souhaite créer, on choisira des rosiers plus ou moins hauts ou larges, ceux qui serviront de fond et ceux qui joueront les ‘prima rosa’. Là se pose souvent un problème bien pratique : où trouver ces précieuses informations ? Les catalogues donnent des indications, mais le sol du jardin et les conditions de culture offertes au rosier changent beaucoup la donne. Nous avons ainsi planté des rosiers ‘Astronomia’ censés mesurer environ 60 cm de haut et sommes chaque année surpris par les pousses d’été qui avoisinent un mètre, ridiculisant un peu le second rang de rosiers qui s’en tient, lui, aux 80 cm prévus. Un détail anodin ? Pas vraiment, car l’effet d’ensemble est raté.

Le dessin ci-dessous présente la succession des formes de rosiers, par ordre croissant : rosier paysager couvre sol, buisson, haut buisson, demi tige, pleureur, grimpant (petit ou grand), et enfin le rosier liane. Le facteur important àconsidérer est le volume du rosier par rapport à ce qui pousse autour de lui : des plantes vivaces, d’autres buissons, ou bien si le rosier est planté en isolé sur une pelouse. Dans ce dernier cas, par exemple, on recommande de le planter par groupes de trois ou cinq exemplaires pour un meilleur effet

Et le port du rosier lui même est extrémement important, et, en particulier, la souplesse de ses branches et leur longueur.Les photos ci-dessous présentent quelques exemples de rosiers en pergola. Le rosier de gauche, ‘Pink Cloud’, est beaucoup trop petit pour cette pergola de trois mètres de haut. Ce n’est pas parce qu’il est jeune car d’autres rosiers du même âge ont déjà formé un arc de cercle au dessus de la pergola. Il n’est tout simplement pas programmé pour pousser aussi haut. Par contraste, le rosier de la photo du milieu, ‘Apple Blossom’ est parfaitement à son avantage. Mais à droite,‘Madame Alfred Carrière’ peut prêter à discussion. Il est si exubérant et difficile à draper que l’effet rendu est toujours un peu fouillis. Mais certains trouveront que cela lui donne encore plus de charme, et ses roses sont si jolies !

Et il faut également décider, bien sûr, si l’on souhaite absolument un rosier remontant ou si l’on accepte un rosier non remontant, c’est à dire qui ne fleurira qu’une seule fois… Nous n’insistons pas sur ce critère, largement discuté par ailleurs dans ce blog. Il peut être dommage, si l’on a quand même un peu de place à leur consacrer, de se priver de la magnifique floraison des rosiers non remontants. Ci dessous, ‘Wedding day’ et ‘François Juranville’.

‘Wedding Day‘ (blanc) et ‘François Juranville’ (rose)

Un rosier pour le jardinier

Et il ne faut pas oublier non plus le jardinier, qui va passer du temps à soigner les rosiers et à les attacher. Il est prudent d’intégrer dans notre choix quelques contraintes de gestion :
Il s’agit d’évaluer honnêtement le minimum de soins requis pour le rosier choisi. A chaque saison, il y a un peu de travail à faire sur les rosiers : en hiver (la taille d’hiver), au printemps (fin juin, un peu de nettoyage des fleurs fanées, et souvent, désherber le pied des rosiers), en été (la taille des rosiers non remontants que l’on n’aura pas taillé en hiver, pour préserver leur floraison de printemps), en automne enfin, le palissage des rosiers grimpants et lianes. Faute de ces soins essentiels, le rosier ne réalisera pas son potentiel.

Tout dépend donc du temps que le jardinier peut rendre disponible, et aussi de son savoir faire. La difficulté relative d’entretien des rosiers croît avec leur taille, et tout simplement déjà pour des raisons d’accès. Attention donc aux pergolas et autres grimpants pour ceux qui n’aiment pas les échelles car il faut absolument attacher les nouvelles pousses. Un rosier grimpant bien fourni peut facilement demander une demi-journée de travail deux fois par an, et quelques séances de nettoyage après floraison. Et n’espérez pas gagner du temps en ne le taillant que tous les deux ou trois ans, c’est l’inverse qui se passera car la taille sera beaucoup plus compliquée. Et si on omet l’exercice une année, le rosier n’en souffrira pas, mais il ne sera pas forcément très joli à regarder et certaines branches risquent d’être cassées par l’orage. Les choses rentreront dans l’ordre dès la taille suivante.

Les deux photos ci-dessous présentent un petit grimpant, ‘New Dawn’, qui est un bon sujet pour commencer. Il est si vigoureux que rien ne l’abattra. En revanche, en le taillant et en observant comment il pousse, vous comprendrez vite comment procéder ( à gauche, avant la taille d’hiver, au centre, après la taille). 

Et voici ‘Aimée Vibert’ , un rosier un peu plus difficile car il produit tant de pousses du pied qu’il peut décourager celui qui est chargé de le draper. Cependant il ne présente aucune difficulté une fois les pousses attachées.

Rosier ‘Aimé Vibert

Pour vérifier son choix, il est vraiment utile d’aller chaque fois qu’on le peut regarder ‘in situ’ les roses que l’on a choisies dans un catalogue. Pour cela, les roseraies de votre région sont idéales, si possible en juillet, après la première belle floraison et quand les maladies attaquent, ainsi qu’en octobre, quand seuls les rosiers les plus courageux fleurissent encore. Vous ferez des découvertes !

En région parisienne, les roseraies de Bagatelle et de l’Haÿ les Roses, à Lyon, la roseraie du Parc de la Tête d’Or, à Rennes, le parc du Mont Thabor, et beaucoup d’autres. Outre le plaisir de leur visite, ces roseraies sont particulièrement utiles pour l’amateur tant le choix qu’elles offrent est grand. Sans compter que si vous prenez le temps de regarder, vous découvrirez mille astuces utilisées par les jardiniers pour conduire et attacher les plus récalcitrants.

Un rosier … pour ses roses !

Et une fois passés en revue tous ces critères bien raisonnables, on peut simplement choisir des rosiers parce qu’on aime leurs roses ! Certains jardiniers ne jurent que par les roses ‘anciennes’, d’autres n’aiment que les polyanthas, d’autres enfin les botaniques.

Pour ma partie les aime toutes et nous avons planté des roses pour tous les goûts au Jardin des Merlettes, afin que chacun puisse s’entraîner sur les variétés qu’il préfère.

  • La famille de rosiers : ‘anciens’ versus ‘modernes’, les botaniques, des roses ‘thé’ ou des Noisettes…
  • Les critères horticoles : par exemple, la forme des fleurs, en coupe, globuleuse, turbinée,… de leurs pétales ainsi que leur nombre, simple ou centifolia, la floribondité, le port du rosier lui même, et aussi des roses, et même la façon dont elles fanent, qui peut être très jolie ou totalement disgracieuse, comme la rose ‘Sénégal’, montrée ci dessous.
  • Des qualités particulières : le parfum, bien entendu, mais aussi des qualités auxquelles on ne pense pas d’abord. Par exemple, le fait de pousser en mi-ombre. C’est le cas de ‘Alister Stella Gray’, un rosier Noisette qui s’accommode bien d’une ambiance de sous bois aéré. Parmi d’autres critères, on peut également penser à la tenue de la fleur en bouquet dont ‘Mme Meilland’ détient la médaille d’or !
  • Et enfin, les roses que l’on aime parce qu’elles font partie de notre histoire personnelle. Chacun a des souvenirs liés à telle ou telle rose dont le nom évoque un proche, un ami, un souvenir agréable.
Rose ‘Sénégal’

Voici ci-dessous, quelques unes de nos roses préférées : le ‘Rosier évêque’ pour sa couleur, ‘Mme Butterfly’, pour ses pétales turbinés et son parfum, ‘Chinensis mutabilis’ pour sa grâce….

Il ne vous reste plus qu’à vous mettre au travail. Vous allez sans doute découvrir qu’une fois choisis vos critères, le nombre de rosiers ‘éligibles’ pour votre petit coin de paradis se réduit étonnamment. Mais le résultat sera à la mesure de vos efforts de recherche. Vous êtes peut-être surpris par toutes ces précautions que je viens de décrire pour choisir vos rosiers. Mais je vous garantis que chacune d’entre elles est nécessaire. Comme dans d’autres disciplines qui font appel à nos sens artistiques, lorsque le résultat est réussi, tout paraît simple et on a tendance à minimiser le travail qui a précédé. Le visiteur en tous cas n’en saura rien.

Rendez vous bientôt au jardin, pour une visite commentée de la roseraie.

31 août 2022 : C’est la rentrée !

Pendant l’été, on a rêvé de nouveaux projets pour son jardin et c’est le moment de les mettre en œuvre. Et il est temps de commencer à préparer vos plantations de l’automne prochain.

D’une part, il faut décider ce qu’on va planter, où, combien et aussi où on va trouver les végétaux souhaités. C’est plus ardu qu’il n’y paraît car le choix est grand et il ne faut pas se laisser emporter par la séduction des catalogues mais essayer de rester sur les critères auxquels on a soigneusement réfléchi, cet été, sur la plage ! Quand on soumet la liste des envies à une sélection fondée sur des critères objectifs, la liste fond à vue d’œil et il faut souvent retourner aux catalogues pour trouver d’autres idées. Même s’il n’est pas encore temps de planter, il faut donc préparer les listes dès maintenant. On profitera ainsi des fêtes des plantes de l’automne pour préciser encore nos choix.

D’autre part, c’est le moment de porter notre attention sur la façon dont le jardin a supporté l’été. Quels sont les endroits et les plantes qui ont bien résisté, lesquels sont ravagés ? Est-ce qu’on comprend pourquoi et qu’est-ce qu’il faut changer ? Peut-on mieux protéger le sol du jardin, en particulier, du soleil. 

Nous essayons de vous donner régulièrement des pistes sur notre blog et dans nos podcasts. Alors, vérifiez et faites-nous part de vos expériences et commentaires.

Bon courage !

S4 E6 Podcast : Jardin et sécheresse, comment les concilier ?

Écouter

L’été 2021, très pluvieux, nous avait fait oublier les épisodes de canicule et la sécheresse de l’année précédente. L’été 2022 nous rappelle brutalement que le dérèglement climatique est bien là et que nous devons désormais l’intégrer dans nos pratiques jardinières. Mais, pratiquement, que faire quand la canicule sévit et que nos jardins souffrent ? Face à ce défi, chacun recherche des solutions et certaines sont plus efficaces que d’autres. Nous vous proposons quelques pistes de réflexion.

Blog 2022 08 Sécheresse et jardins, comment les concilier ?

Que faire quand la canicule sévit et que nos jardins souffrent ? Face à ce défi, chacun recherche des solutions et certaines sont plus efficaces que d’autres. Commençons, pour l’écarter bien vite, par une méthode qui me paraît bien saugrenue mais dont l’usage se répand paraît-il.

Il s’agit de peindre sa pelouse en vert

Les californiens, rois des truquages et effets spéciaux (en tous cas dans une certaine banlieue bien connue de Los Angeles) sont confrontés à une sécheresse record depuis près d’un siècle et désormais également à l’interdiction d’arroser leur jardin. C’est bien ennuyeux dans un pays où les propriétaires urbains n’imaginent pas leur villa autrement que posée dans un écrin de verdure dont l’élément principal est une pelouse. Jusqu’à présent, les jardiniers achetaient plutôt quelques rouleaux de gazon et remplaçaient les espaces trop abîmés. Mais la sécheresse se fait trop intense, les rouleaux sont chers et, faute d’un arrosage approprié, la reprise est médiocre, donc on n’est pas très avancé. Alors, de guerre lasse probablement, certains ont trouvé un moyen plus efficace de conserver une jolie couleur verte à leur pré carré, soit en installant du gazon synthétique, soit, plus récemment, en peignant le sol, tout simplement. 
Xtreme Green Grass se présente comme la société de peinture de pelouses leader sur le marché californien. Les affaires se développent vite dans le jardinage en trompe l’œil et le magazine anglais ‘The Economist’, notait déjà en 2014 que le chiffre d’affaires de cette société (dont le nom ne s’invente pas ne s’invente pas !) avait progressé de 75% un an. Pas mal mais moins bien que celui de la société de peintures pour pelouses ‘LawnLift’ dont les ventes ont, elles, progressé de 300% !

Un des arguments de vente de Lawn lift est que la dépense en eau pour arroser les pelouses des particuliers aux USA correspond en moyenne à la moitié de la consommation en eau du foyer. Je répète, pour ceux qui croirait que je me suis trompée dans les chiffres : la dépense en eau pour arroser les pelouses des particuliers aux USA correspond en moyenne à la moitié de la consommation en eau du foyer. On comprend donc facilement pourquoi il est urgent de stopper les arrosages quand l’eau se fait rare partout.
Mais ce n’est pas si facile : si la pelouse cesse d’être arrosée, elle sèche très vite et prend un aspect bien désolé. D’abord, c’est assez laid, mais aussi, le propriétaire se retrouve bien souvent dans une situation de violation du règlement de copropriété qui précise souvent que les pelouses doivent être entretenues.
De là à peindre le sol !  Bien entendu, cette pratique (je me refuse à employer le mot ‘solution’) n’est pas sans inconvénient. Tout simplement parce qu’exposer un produit chimique sur le sol autour de votre maison présente des risques pour votre santé. En fait, cette démarche m’a semblé si incongrue que je me suis renseignée sur les produits… et je n’ai pas été déçue. Outre les irritations possibles aux poumons, aux yeux, à la peau, les producteurs mentionnent que le produit peut avoir des effets potentiellement aigüs. Sans compter que la notice ne met en garde que contre les inconvénients à court terme. Mais s’agissant d’une pelouse autour d’une maison, on doit sans doute envisager aussi les effets à long terme. L’information sur la toxicité du produit est édifiante : récapitulant les différents types de toxicité (chronique, effets mutagènes, tératogènes ou sur le développement) la réponse laconique est ‘aucun connu’. Et pour l’impact sur l’environnement (eco-toxicité et bio-dégradation notamment) : aucune donnée disponible.
Je cite un peu longuement cet exemple de peinture des pelouses parce qu’il illustre bien à mon avis à quel point certains agissements peuvent être déviants par rapport à une fonction initiale. Au même titre que trop regarder un arbre peut faire oublier la forêt, trop regarder les brins d’herbe font oublier la pelouse. La fonction initiale de celle-ci est de participer à la création d’un cadre de verdure, un abri frais et reposant. Mais au fil des années, un conformisme navrant s’est imposé dans ces banlieux californiennes. Quelques arbres et arbustes, une grande pelouse abondamment arrosée, de larges allées bétonnées et le décor est posé pour un pseudo jardin : banal, pratique, demandant peu d’entretien hormis une bonne tondeuse et un réseau d’arrosage. Ni fouillis, ni biodiversité.  Mais quand l’eau vient à manquer, le modèle s’effondre.

Pomper et utiliser l’eau du sous sol

La sécheresse actuelle fait progresser les mentalités partout dans le monde, enfin dans le monde qui se croyait à l’abri de la sécheresse. En particulier, particuliers, agriculteurs et autorités locales qui gèrent l’approvisionnement en eau des villes doivent reconsidérer leur position en ce qui concerne le pompage des nappes phréatiques. Longtemps, les jardiniers des villes ou des champs ont considéré qu’arroser avec des eaux de pompage ne portait pas à conséquence. Il ne pleut pas ? Pas de souci, j’ai l’eau de mon puits, ou du ruisselet qui passe dans mon jardin. Et moins il y avait d’eau à utiliser en surface, plus on pompait. Solution simple… et bête, ça va parfois de pair. Ainsi en Californie environ 65% de l’eau utilisée en 2014 provenait de pompages directs, contre 40% environ les années précédentes. Mais cela n’est juste pas durable et le magazine GEO notait, en août 2021 que la guerre de l’eau aurait bien lieu en Californie. 

Champs irrigués

Le grand public s’est (enfin) rendu compte que le problème est très compliqué, et grave. On réexamine le concept de nappe phréatique et on se rappelle que cette eau de sous sol est un bien commun et que trop pomper entraîne invariablement des problèmes de salinité. Et si l’eau fraîche venait à manquer ?

Salinité (Source : Wikipédia)

Une fois l’urgence reconnue, on réfléchit à des moyens de préserver cette ressource précieuse. Santa Cruz, par exemple, a depuis près de 10 ans rationné l’eau et interdit de remplir baignoires et jacuzzis, tout en instituant des amendes et des classes d’instruction civiques (« water schools ») pour les contrevenants. Les résultats ont été à la mesure des moyens employés : une baisse de 26% de la consommation d’eau dès la première année par rapport à l’année précédente.
Et bien sûr, arme ultime, on peut facturer l’eau à un prix qui reflète la valeur de ce bien rare pour la communauté. Toute l’eau utilisée, c’est à dire celle du réseau de distribution mais aussi celle pompée localement, serait enfin prise en compte et facturée à chaque immeuble… mais en 2025 seulement. Certains progrès ont un peu de mal à passer dans les actes.
En attendant ces mesures radicales, chacun de nous peut commencer par faire le meilleur usage possible de l’eau qui est à sa disposition
Pour commencer, on peut installer des citernes pour récupérer l’eau de nos toitures, ce que les anglo saxons appellent « water harvesting », ou ‘récolte de l’eau. J’aime bien ce terme qui, en la comparant à une récolte, souligne combien l’eau est précieuse. Dans la bible (dans le livre de la genèse), Joseph est enfermé par ses frères dans une citerne avant d’être vendu comme esclave par ses frères. Tiens ? une citerne. Elle était probablement vide à ce moment de l’année, mais oui, le Moyen Orient a une longue tradition de conservation de l’eau. L’eau que l’on récupère ainsi ne permet pas d‘arroser une pelouse, d’ailleurs, on n’y pense même plus, mais elle fournit de l’eau à verser au pied des végétaux les plus fragiles et quelques arrosoirs peuvent faire une vraie différence et éviter la mort de tel ou tel joli arbuste.
Sans aller jusqu’à la récupération bien organisée de toutes les eaux grises de la maison, une solution à laquelle on viendra peut-être, on peut aussi reprendre les gestes que l’on a vu faire à nos grands-mères qui ne perdaient pas une cuvette d’eau de rinçage des légumes, par exemple.
Mais surtout, il faut soigner le jardin de telle façon que toute goutte qui tombe au sol lui profite et dure ! Bien sûr un orage violent ou un épisode de grêle peuvent causer des dégâts par leur violence. Mais il n’empêche qu’il faut à tout prix récupérer toute l’eau qui tombe, parfois bien violemment. Cela veut dire entretenir la perméabilité du sol et réfléchir au circuit de l’eau qui ruisselle. Autant que possible il faut retenir l’eau chez soi et l’empêcher de filer dans les égouts, au demeurant bien souvent saturés lors d’un épisode orageux. Cette préparation consiste à :

  • Repérer et supprimer autant que possible tous les endroits où le sol a été imperméabilisé. Le fameux ‘drive in’ des américains, l’entrée du garage, certaines circulations. Et les remplacer chaque fois que c’est possible par des grilles au sol au travers desquelles l’herbe pourra pousser et être tondue.
  • Installer de larges cuvettes autour des arbustes. Si le jardin est en pente, il faut souvent renforcer le bord de la cuvette, au haut et en bas, par des pierres.
  • Installer des paillages sur les parterres : cela permet d’absorber beaucoup d’eau mais, pour une bonne efficacité, il ne faut pas se contenter de recouvrir le sol, il faut installer une bonne épaisseur (3 ou 4 cm). Et si vous n’avez pas de paille, pas de souci, les tontes de gazon, le mulch, toutes sortes de débris végétaux conviendront parfaitement.

En fait, l’idée conductrice est qu’un sol ne doit jamais être laissé nu, et surtout s’il est ‘battant’, c’est-à-dire s’il a tendance à se compacter sous l’effet des gouttes d’eau. C’est le propre des sols contenant une forte proportion d’argile ou de limons. Les sols sableux ne sont pas battants.
Et quand on a épuisé toutes ces solutions simples : que faire quand il n’y a pas d’eau ? Certes, nous n’avons guère eu à arroser nos pelouses l’été dernier (en 2021). N’empêche, on savait que la sécheresse reviendrait bien une année ou l’autre, surtout si le réchauffement climatique se poursuivait… Et c’est bien le cas.
Donc il faut réfléchir sur le long terme. Et l’attitude qui paraît la plus raisonnable est de s’adapter. Pour cela, on a besoin de réfléchir et peut être,  de changer de repères : que souhaite-t-on dans son jardin, un havre verdoyant ou un tapis d’herbe ?
Déjà, on peut adapter notre façon de tondre ou de faucher. La température au sol varie en effet largement selon la hauteur de l’herbe qui le recouvre. Si l’herbe est laissée haute, le sol se maintiendra à environ 19 ou 20°. L’herbe coupée à 10 cm, ce qui est assez haut, résultera en une température de 24 ou 25°. Mais si l’herbe est coupée à ras, laissant le sol nu, celui-ci subira des températures de plus de 40°. La différence est donc très sensible. Laisser un sol chauffer au soleil a de graves conséquences sur la biodiversité car toute la faune qui vit proche de la surface du sol est détruite. On peut donc adopter une attitude différenciée : on continue à faucher les allées sur une largeur juste suffisante pour permettre une circulation facile et on laisse haute l’herbe tout autour.

Ensuite, on peut adapter la gamme végétale. Les jardiniers japonais sont depuis longtemps passés maîtres dans l’art du trompe l’œil. Et à défaut de pouvoir faire pousser un gazon tel qu’on le conçoit en Europe, ils créent des oasis verdoyantes. 

Oasis à Paris : Parc André Citroën (Paris)

Si l’on recherche absolument cet effet de tapis vert, certains végétaux couvre sols sont particulièrement bien adaptés. Les japonais ont développé l’art de faire pousser de très nombreuses variétés de mousses, à développement plus ou mois dense et dans une gamme étendue de verts.  Ceci leur permet de choisir les variétés les mieux adaptées à chaque jardin. Certaines mousses ne s’établissent bien que dans des milieux bien humides, mais d’autres, si elles sèchent en été, reprennent vite des couleurs aux premières pluies d’automne. 

En France de nombreuses variétés de géraniums vivaces résistent très bien à la chaleur. Et des tapis de sédums nains commencent à apparaître dans les espaces publics très arides, la ligne T9 à Paris, par exemple. Et si on souhaite un peu de hauteur on peut choisir des arbustes tels que les mahonias, les berbéris, les osmanthes ou les filaires. En revanche, je ne vous conseille pas les banquettes d’azalées comme ci-dessous, à Kyoto. Pas d’eau, pas d’azalée.

Pour les parcs et grands jardins, on peut remodeler l’espace petit à petit et en observant l’évolution de la flore, en particulier des graminées qui s’installent au fil des saisons, aller dans le sens de ce que l’on observe et choisir des plantes dans les mêmes familles que celles qui s’installent spontanément, un sujet sur lequel nous reviendrons, c’est sûr.

Au fond, la seule règle à suivre est de regarder la nature en grand et en petit et de s’adapter en conséquence.

Trottoir colonisé

S4 E5 Podcast : Le jardinier, gardien de l’écosystème

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Le Jardin des Merlettes insiste depuis sa création en 2007 sur l’importance du développement durable, un concept économique articulé au départ pour mieux concevoir et gérer les projets de développement dans les pays pauvres et qui, revisité en ‘jardinage ‘durable’, propose au jardinier d’assumer un nouveau rôle, qui n’est plus seulement de produire des fleurs, des légumes et des fruits, mais de participer à un effort plus large d’équilibre et de bien être de la société tout en œuvrant, entre autres missions, à la protection, voir au développement de la biodiversité. Tout un programme !

Blog 2022 08 : Le jardinier, gardien de l’écosystème

Chaque mois d’avril, une semaine est dédiée au ‘développement durable’. Beaucoup de manifestations jardinières tournent autour de ce thème. Le Jardin des Merlettes insiste depuis sa création en 2007 sur l’importance de ce concept pour le jardinier, qu’il soit amateur ou professionnel. Notre jardin a en effet été créé pour participer à l’émergence d’une nouvelle forme de jardinage, le jardinage ‘durable’. C’est un concept par lequel le jardinier assume un nouveau rôle, qui n’est plus seulement de produire fleurs, légumes et fruits, mais de participer à un effort plus large d’équilibre et de bien être de la société.

Durable est la traduction de ‘sustainable’ (soutenable), un concept économique développé vers la fin des années 70 pour les projets de développement de ce qu’on appelait alors le Tiers Monde. On remettait (enfin) en cause l’aide apportée par les pays développés et qui se concentrait trop souvent sur des mesures prises dans l’urgence. Cette aide n’apportait souvent aucune solution à terme ou ne prenait pas en compte l’épuisement de certaines ressources naturelles. Et, peut-être plus grave encore, on ne tenait pas compte de l’organisation du travail dans la société sur place, ce qui fragilisait souvent l’équilibre des projets. On a progressivement intégré l’idée d’aide durable en créant des projets capables de s’auto-supporter financièrement (la contrainte économique) et sans porter atteinte à l’accès des générations futures aux ressources naturelles (la contrainte écologique). Mais le concept s’est très vite élargi car les économistes ont réalisé que les impératifs écologiques et économiques n’étaient pas suffisants et que la dimension sociale devait également être prise en compte. En effet les règles de fonctionnement de la société dans lequel est conçu chaque projet, la répartition du travail entre hommes et femmes par exemple, sont souvent lourdes de conséquences sur le succès d’un projet.

Cette façon d’analyser les projets sous ces différents angles de vue a été largement adoptée depuis une dizaine d’années. Cette approche enrichit les projets de développement en leur apportant plus de profondeur et de solidité. Mais elle est également applicable à l’art des jardins selon les trois dimensions, ou ‘piliers’ du développement durable, à savoir :

  • La dimension écologique : par l’adoption de techniques culturales adaptées
  • La dimension économique : en concevant et en appliquant un plan de gestion contraignant
  • Et enfin, en tous cas pour les jardins publics, la dimension sociétale : en respectant un objectif de consensus social, un jardin pour tous.

Un impératif écologique: il s’agit d’adopter des techniques culturales adaptées et de protéger la biodiversité

Les techniques culturales durables : soigner le sol

On parle ici de non travail du sol, de paillages et de connaissance des propriétés physiques du sol du jardin. Ces techniques culturales sont au centre des stages qui ont lieu au jardin pour apprendre à préparer le sol et à le protéger. Le point principal est que le jardinier doit accepter de passer un peu de temps pour mieux connaître son sol (sa structure, sa perméabilité, par exemple…) et le soigner en conséquence car la fertilité du sol est littéralement exponentielle s’il est bien soigné. Notre propos peut paraître exagéré, mais vraiment, cela vaut la peine d’essayer.

La biodiversité ordinaire

Il s’agit ensuite, ou plutôt, simultanément, de se préoccuper de la biodiversité existant au jardin. Et là, on parle de toutes les plantes et les bestioles ‘ordinaires’ qui vivent dans la même région que nous. …..  Il s’agit de respecter tout ce qui est endémique, c’est-à-dire tout ce qui est naturellement présent dans notre région. Et on comprend donc bien que ce ne seront donc pas les mêmes espèces et variétés en Bourgogne et en Normandie par exemple. Quoique bien sûr, le réchauffement climatique entraînant des migrations tant des plantes que des animaux, il en résulte une certaine confusion sur ce qu’il est ‘normal’ de trouver dans telle ou telle région.

En ce qui concerne la biodiversité en tous cas, une des premières priorités du jardinier va être de protéger la diversité des ‘mauvaises herbes’ et des insectes’. Il ne s’agit donc pas d’un combat glorieux pour quelque chose de tout à fait extraordinaire, comme un oiseau magnifique ou une orchidée rare, mais plutôt de s’assurer que le nombre de variétés de plantains ou de pissenlits ne diminue pas, pas plus que celui des espèces de cloportes et autres crustacés terrestres. Ces plantes et animaux bien modestes sont en effet complètement intégrés à la chaîne du vivant et chaque maillon a son importance.

On veillera donc à créer des refuges pour les insectes en gardant des bandes enherbées, des jachères ou des zones réservées, si on a assez de place. J’insiste sur les insectes, plus que sur les oiseaux, parce qu’ils se situent en amont. Or on ne peut pas jardiner avec la nature sans s’intéresser au monde des insectes. Plus on regarde, mieux on comprend les interactions, plus on est efficace pour protéger ses plantations. Faire fuir les indésirables, attirer les auxiliaires, cultiver puis préparer les plantes essentielles en phytothérapie, c’est un programme au long cours qui s’installe dans l’agenda du jardinier. Cela prend peu de temps et en fait gagner beaucoup. Le plus long, c’est de comprendre ce qui se passe : à chaque saison, ses soucis. Plus une action est spécifique, plus elle est efficace. Au jardin, nous proposons deux stages différents sur les ravageurs et maladies du jardin. L’approche générale est bien sûr la même pour les deux, mais les soucis sont différents selon la saison où se tient le stage, printemps ou automne. Regarder régulièrement son jardin pour détecter les soucis est la base. On peut ensuite poser sûrement un diagnostic, identifier le problème, maladie ou invasion, et alors seulement, agir.

Libellule

La gamme variétale

Préserver la biodiversité, c’est aussi penser à planter des variétés locales, en particulier des espèces fruitières. Et contrairement à certains préjugés, cela laisse un grand choix. Nous avons installé au Jardin des Merlettes un jardin d’arbustes et un conservatoire d’espèces fruitières bourguignonnes qui montrent la richesse de la gamme disponible.

Fête des fruits à Saint Loup

Enfin, autant que possible, il faut respecter le cahier des charges de l’agriculture bio

C’est à dire n’utiliser aucun produit chimique et favoriser les semences et plants issus de la filière ‘bio’. Si ça semble difficile, on peut tout simplement commencer en supprimant tous ces produits en ‘cide’ et observer les résultats au jardin. En particulier, on voit revenir assez vite des papillons et insectes de toutes sortes.

De même qu’il y a des parcours de santé pour les humains, on peut installer un parcours de biodiversité au jardin. Ce parcours recense les étapes à franchir pour que le jardin et ses hôtes disposent des ressources nécessaires à leur autonomie et à leur protection. On fait un premier pas, puis un autre et le jardin devient progressivement plus naturel et favorable à la biodiversité. On observe par exemple une multiplication des espèces : par exemple, et comme déjà mentionné dans d’autres de nos podcasts, ce n’est désormais plus une espèce mais de nombreuses espèces de coccinelles qui s’attaquent à nos pucerons pour protéger le jardin. Des contraintes économiques

Des contraintes économiques : Le plan de gestion du jardin

L’objectif du plan de gestion

Le plan de gestion sert à prévoir l’avenir du jardin tout en respectant certaines contraintes financières et humaines. Il prévoit la séquence des tâches qui doivent être accomplies chaque année mais aussi, à plus long terme, l’évolution des végétaux du jardin tout au long de leur cycle de vie : les arbres et arbustes qu’il faudra remplacer, l’évolution de leur volume, etc.

On cherche également à définir quel niveau d’entretien minimum est nécessaire pour les différents secteurs du jardin selon l’effet que l’on souhaite obtenir. Les parcs et jardins ouverts à la visite doivent économiser leurs ressources financières qui s’amenuisent au fil du temps. Faute de moyens, on ne peut plus entretenir les jardins comme au temps de Louis XIV, ni même au siècle dernier. Pour garder l’esprit des jardins et leur rendu esthétique, mais avec beaucoup moins de moyens, il faut établir des priorités. On va donc, par exemple, définir des zones de prestige, où l’entretien sera très soigné et d’autres catégories, pour des espaces qui demanderont moins de travail de suivi, jusqu’à même l’espace quasi naturel, qui ne nécessitera qu’un faucardage occasionnel..

Pour établir un plan de gestion durable pour un espace vert, on devra prendre en compte tous les coûts, c’est-à-dire les végétaux (les semences, plants et arbustes…), tous les intrants (eau, énergie, traitements, coût du matériel et de son entretien), le coût du travail et les intervenants extérieurs (élagueurs, dendrologues, techniciens et conseillers)… pour pouvoir répartir les ressources disponibles en respectant les priorités établies lors du zonage.

Topiaires au Parc de la Source (Orléans)

Mais ce raisonnement de gestion durable ne s’applique pas qu’aux espaces collectifs : le jardin familial est, lui aussi, soumis à des contraintes économiques ou édaphiques. Qu’il s’agisse du temps disponible, de l’équipement ou du coût des fournitures diverses, les ressources familiales ne sont pas infinies non plus. Autant les prendre en compte quand on prévoit son jardin. Voici quelques exemples concrets à éviter :

  • Des haies taillées très denses qui demandent plusieurs tailles par an, ce que les paysagistes ont surnommé ‘le béton vert’
  • A éviter aussi : les parterres de plantes annuelles ou de rosiers dont le sol est laissé nu et ceux dont l’accès est difficile pour le jardinier qui doit les désherber
  • Et bien sûr, de larges surfaces de gazon installées dans des conditions édaphiques défavorables

Au contraire, on peut essayer de favoriser :

  • Des haies variées en port libre
  • Des strates variées, y compris la strate herbacée (pour les insectes)
  • Le paillage systématique ou le ‘mulching’ des parterres
  • Un meilleur usage des arbustes

Un jardin qui s’adapte aux contraintes du jardinier

En bref, un jardin ‘durable’ est un jardin qui s’adapte. Il est difficile d’éviter de faire des erreurs lors de la conception d’un jardin. Une erreur courante consiste à pécher par optimisme et à mal apprécier la masse de travail qui sera nécessaire pour entretenir correctement ce que l’on souhaite planter. Mais on peut souvent rectifier par la suite, à condition de comprendre où le bât blesse. Nous avons ainsi planté au Jardin des Merlettes des parterres de rosiers de façon traditionnelle, en sous estimant largement le nombre d’heures de désherbage que ce choix entraînerait. Tout simplement parce que les parterres en sol poyaudin sont beaucoup plus difficiles et longs à désherber que ceux de la vallée de Loire, au sol sableux, donc légeret dont nous avions l’habitude. Nous avons dû déplacer certains rosiers pour aménager de plus petits parterres autour desquels il est facile de passer la tondeuse. Un autre exemple : certaines parties du jardin sont gorgées d’eau en hiver. Nous avons installé des mini collines au potager. Surélever nos plantations de 20 ou 30 cm permettent d’éviter certains dégâts. A suivre.

Le rôle du jardinier dans la société : une dimension humaine inégalée

Quand on demande aux gens quels métiers ils trouvent les plus sympathiques, les jardiniers se retrouvent tout en haut de la liste. C’est parce que le jardin est actuellement ressenti comme un des meilleurs endroits d’échange et de partage amical. En plus de cultiver son jardin, le jardinier remplit plusieurs missions :

Le jardin est vecteur de consensus social et de réinsertion

  • Le jardinage est une activité qui fait appel à l’observation, à la mémoire et au savoir. Il est accessible à tous, pourvu qu’on en aie l’envie.
  • C’est un travail physique où l’on endure la pénibilité de certaines tâches et où l’on est confronté à la force de la nature : dureté des sols, force du vent, pluies battantes, soleil écrasant.. Ces épreuves renforcent toujours les liens entre les participants. D’ailleurs, les stages dont nos élèves gardent le meilleur souvenir sont toujours des stages effectués dans des conditions climatiques difficiles… à notre corps défendant !

Le jardinage favorise les relations de proximité

  • C’est dur de travailler tout seul. De plus, les jardiniers aiment bien partager leurs expériences. C’est l’occasion de s’entraider, et aussi pour les anciens ou les plus expérimentés, de former les plus jeunes.
  • Travailler ensemble et ensuite, partager : un bon jardinier récolte en quantité, des fleurs, des légumes, des fruits. On a souvent trop d’un petit nombre de choses et chacun connaît des réussites et des échecs : c’est l’occasion d’échanger avec ses voisins.

Le jardinage participe à conserver la mémoire du vivant, les savoir faire et les connaissances locales

  • La taille des arbres dans certaines formes, par exemple, la conduite des arbustes fruitiers en formes palissées, mais aussi les tétards des haies, les plessis ou pléchages.
  • Certaines techniques pour la conservation des récoltes : construction de silos enterrés, transformation ou conservation de certains aliments (les poires tapées en Puisaye)
  • La connaissance des particularités locales édaphiques : en particulier concernant le sol et le climat. En janvier 2012, les personnes les plus âgées en Bourgogne nous rappelaient qu’en 1956 aussi, le printemps s’était invité au début de l’hiver, jusqu’à la fin janvier. S’en était suivi du 1er au 27 février 1956, la pire vague de froid depuis 1947. Dans les temps de canicule que nous subissons actuellement, c’est important de se souvenir que d’autres générations ont enduré aussi de grosses difficultés. Cela protège du défaitisme ambiant.
  • Les jardiniers privés participent également activement à la préservation des variétés locales, qu’il s’agisse d’arbres fruitiers, de légumes ou de plantes naturelles, grâce aux espaces préservés de leur jardin.

Quand on parle de la dimension sociale, ou plutôt sociétale du jardinage, il y a un aspect qu’il peut être très utile de se rappeler, c’est sa dimension thérapeutique

Le jardinage thérapeutique : l’exemple de l’association Thrive

L’exemple le plus concret de mise en œuvre de cette vertu ‘soignante’ du jardinage est fourni par l’association THRIVE, créée sous l’égide de la Royal Horticultural Society au Royaume Uni et qui organise et gère des jardins thérapeutiques. Sa devise : ‘Utiliser le jardinage pour changer les vies’ (‘Using gardening to change lives : social and therapeutic horticulture’) : Rien que ça! Les jardins qu’elle conçoit sont adaptés pour servir d’ateliers pratiques pour des personnes en situation de handicap, physique ou mental.

Thrive crée des jardins, forme du personnel d’encadrement, milite pour imposer le jardinage comme vecteur de réinsertion sociale. Son succès depuis sa création, en 1978, est phénoménal : plus de 900 jardins créés, aidés ou encadrés à ce jour. Et plus elle crée de jardins, plus on lui en demande !

Un petit plaidoyer pour conclure ce podcast : un chemin vers le BNB

Jardiner ‘durable’ c’est remettre en cause ses habitudes : travail du sol (béchage) ou couverture du sol (paillis, mulching), taille ou éborgnage, cassage ou arcure des arbres fruitiers, etc. C’est aussi s’éloigner du productivisme et privilégier plus de qualité et de diversité.

On peut aussi y ajouter un poil de philosophie : jardiner, c’est être dans l’instant présent. Rien ne ‘vide’ autant la tête que de soigner des plantes, que l’on prépare une planche au potager, qu’on récolte des graines ou qu’on cueille des fleurs pour un bouquet. Ce que les yogis mais aussi les thérapeutes appellent, ‘la pleine conscience’. Et cela nous rapproche d’une autre notion : le BNB (ou Bonheur national Brut), un concept inventé au Bhoutan. Si on parlait un peu de nous, juste histoire de voir d’où nous tirons nos moments de bonheur ? Le jardinage est probablement un élément à retenir pour améliorer cet indice.

On nous annonce pour bientôt des restrictions de toutes sortes, mais, tout comme le BNB du bonheur s’oppose au PNB de la productivité, la ‘sobriété heureuse’, un concept remis en avant (mais non inventé) par Pierre RAHBI, s’oppose à la consommation effrénée. Sobriété, pleine conscience, des façons de profiter de la vie qui s’accordent bien avec les jardiniers. A réfléchir !

S4 E4 Podcast ; Les auxiliaires au jardin

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Syrphe sur pomme Boskoop

Nous sommes trop ignorants de toutes les bestioles qui vivent dans notre jardin et qui influencent grandement la façon dont nos plantes arrivent à échapper aux ravageurs… ou pas. Seules les coccinelles sont universellement connues des jardiniers. Il existe pourtant de nombreux autres insectes qui sont tout aussi, sinon plus efficaces en tant qu’auxiliaires du jardinier. Mais ils font souvent peur et sont les victimes de préjugés. Au mieux, les jardiniers les ignorent, au pire ils cherchent à les éliminer alors qu’au contraire, ils devraient favoriser leur installation. Nous vous en présentons quelques uns.

Blog 2022 07 : Lutter contre les pucerons ? Il y a la coccinelle, bien sûr, mais pas seulement…

Avec le printemps et l’éruption de tendres pousses sur nos rosiers, arbustes et arbres fruitiers, un nouvel ennemi envahit les jardins ces temps ci : le puceron. Et chaque jardinier de sortir son arsenal de lutte : pulvérisations en tous genres, aspersions, et, pour les plus avertis, lâchers (ou poser) de coccinelles. C’est une bonne idée d’inviter ces insectes au jardin et de leur permettre de s’y installer durablement, mais on peut pousser plus loin cette réflexion. En effet, la coccinelle, ou Bête à bon Dieu, comme on l’appelait autrefois, est loin d’être le seul insecte efficace contre les pucerons. Il existe de nombreux autres auxiliaires qui peuvent aider le jardinier, pourvu qu’on les y invite. Nous vous proposons une courte introduction sur ce sujet passionnant.

La coccinelle est utile au jardin : les différentes phases de son développement

Comme beaucoup d’insectes, la coccinelle passe par des métamorphoses. L’oeuf éclot en larve puis se nymphose en pupe et enfin émerge l’insecte. Nous connaissons moins bien les coccinelles que nous ne le croyons. Peu d’entre nous savent par exemple reconnaître sa larve, pourtant très utile au jardin car très affamée… de pucerons. D’autre part, si tout le monde connaît la coccinelle à 7 points (Coccinella septempunctata), on ne connaît guère ses petites soeurs.

Les larves

Voici quelques photos de larves de coccinelles prises au Jardin des Merlettes. Presque aussi vorace que l’insecte adulte, la larve en fin de croissance dévore environ 80 pucerons par jour. La coccinelle adulte en dévore environ 100.

Et c’est toujours un spectacle rassurant pour le jardinier que la vue d’un groupe de larves en action sur une pousse de pommier ! Pas de souci à se faire, l’arbre sera nettoyé en moins d’une journée.

Les insectes adultes (imago)

Voici quelques photos d’insectes adultes. Nous avons observé de nombreuses variétés au Jardin des Merlettes, en plus de la coccinelle à 7 points. Elle exhibent un nombre de points varié, ce qui n’a rien à voir avec leur âge, ont des formes et des couleurs différentes… sans oublier la redoutable coccinelle asiatique qui dévore ses congénères quand la nourriture se fait rare ! Michael Chinery, dans son livre ‘Insectes de France et d’Europe Occidentale’ (Flammarion, 2005) cite ainsi, parmi les coccinelles proprement dites, la Coccinella 7-punctata de Linné, abondante partout de mars à septembre, l‘Anatis ocellata, que l’on trouve souvent sur les les conifères (juin – juillet) et la Théa 22-punctata, sur les végétations basses (avril à août).

Les coccinelles ravageuses

Mais toutes les coccinelles ne sont pas les bienvenues au jardin. Il existe différents groupes dans la famille des coccinellidae et certaines cousines de nos coccinelles familières sont de redoutables ravageurs. Si les Coccidula scutellata pourchassent les aphides en été, d’autres espèces s’intéressent davantage à nos cultures. Ainsi au fil des mois, vous rencontrerez au jardin des Epilachna chrysomelina, rouge jaune, qui s’attaquent aux melons, et des Subcoccinella vigintiquatuorpunctata  (24 pooints) – (Linné 1758), rouge fauve, aux élytres à points noirs, qui s’attaquent aux cultures florales dans le midi de la France.

Chaque variété d’insecte opère à une période bien spécifique et uniquement à cette période. Lorsqu’il s’agit de ravageurs, cela permet au jardin de respirer. Mais pour les auxiliaires, on aimerait qu’ils soient là tout le temps pour nous aider. Heureusement, si la période d’activité est assez limitée pour les coccinelles, il n’en est pas de même pour d’autres auxiliaires qui participent à protéger le jardin toute l’année.

Les autres auxiliaires mangeurs de pucerons

Un peu de vocabulaire : ravageurs, auxiliaires et prédateurs.

Les ravageurs

On appelle ravageurs les insectes qui s’attaquent à nos cultures. Ils portent bien leur nom car ils font des ravages. Tel Attila, là où leur horde est passée, rien ne repousse… Enfin, ça dépend. Dans certains cas on s’inquiète pour rien car la plante se remet très bien de cet assaut printanier et en sort même renforcée. L’attaque aura tout au plus calmé une vigueur très grande. Pour les plantes plus chétives en revanche, l’assaut peut être fatal.

Les pucerons sont des ravageurs. Ils sont redoutables tant par leur appétit pour sucer la sève de nos plantes que par leur nombre, leur diversité (avec ou sans ailes) et la longueur de la période pendant laquelle ils sévissent. Ils privilégient toujours l’extrémité herbacée des branches. C’est en observant régulièrement ses arbres que l’on peut se repérer les attaques des insectes ravageurs. Voici des photos de trois espèces très répandues. A gauche, le Myzus Persicae, ou Puceron vert du Pêcher, qui sévit au printemps. Au centre, le Puceron lanigère du pommier, Eriosoma lanigerum, qui s’attaque aux branches en été et aux racines en hiver. A droite, le Puceron noir de la fève, Aphis fabae qui hiverne sur fusain ou genêt à l’état d’oeuf et pullule en été sur de très nombreuses plantes.

Les auxiliaires

Et voici la contre attaque : les auxiliaires. Il est important de les prendre en compte avant de recourir à des produits insecticides destinés à éliminer tel ou tel ravageur, mais qui supprime en même temps nombre d’auxiliaires. Il ne faut pas détruire ces derniers mais, au contraire, leur permettre de bien s’acclimater au jardin. En effet, leur cycle de vie est calqué sur celui de leurs proies et ils protégeront le jardin de façon plus durable et moins polluante que tous les produits chimiques
Le souci, c’est que les auxiliaires ne sont pas toujours ceux qu’on croit et que certains, pourtant très utiles contre les ravageurs de nos cultures, sont largement méconnus et donc méprisés, voire pourchassés par les jardiniers. D’où l’idée d’une formation pour apprendre à les reconnaître.

On distingue les auxiliaires prédateurs et les parasitoïdes :

  • Les prédateurs chassent et dévorent leurs proies, c’est le cas des coccinelles.
  • Les parasitoïdes procèdent différemment. Ils pondent dans l’abdomen des insectes, acariens ou pucerons, par exemple, à l’aide d’un ovipositeur situé à  l’extrémité de leur abdomen. Les oeufs éclosent et les larves se développent en dévorant leurs hôtes. La photo ci dessous montre l’un de ces insectes (probablement une punaise translucide) doté d’un ovipositeur. On imagine facilement les ravages que peut provoquer cet instrument !
Punaise à oviposteur

Quelques insectes auxiliaires méconnus

Non seulement la coccinelle n’est pas le seul auxiliaire du jardinier dans sa lutte contre les pucerons, mais elle n’est pas non plus la plus efficace. Le journal « Avertissements agricoles AQUITAINE » N° 10 du 3 mai 2007 proposait ainsi un recensement des auxiliaires contre les ravageurs des vergers. Pour la lutte contre les pucerons, il classait les auxiliaires en deux groupes selon leur efficacité contre les ravageurs :

D’une efficacité importante : les chrysopes, les syrphes, les cécidomyies

Les chrysopes :

Les larves de chrysopes sont des prédateurs redoutables. Elles consomment principalement des pucerons et acariens (jusqu’à 500 pucerons ou 10000 acariens au cours de leur développement), mais peuvent aussi s’attaquer aux oeufs et jeunes larves de lépidoptères.

Les syrphes :

Les syrphes, de couleur jaune et noire, sont souvent confondus avec les abeilles et les guêpes. Or elles ne sont pas des hyménoptères mais des diptères (elles n’ont que deux ailes), communément appelées ‘mouches’. Leurs larves peuvent consommer de 400 à 700 pucerons au cours de leur développement.

Les cécidomyies :

Leurs larves, par exemple celles d’Aphidoletes aphidizyma, peuvent consommer jusqu’à 20 proies par jour. Les cécidomyies sont également des diptères et dévorent aussi des acariens.

La chrysope est à gauche, le syrphe au milieu et la cécidomyie à droite. Ces photos ont été prises au Jardin des Merlettes, sauf celle de la cécidomye, trouvée sur le site internet aramel.free.fr (crédit photo M. Chevriaux). La taille du syrphe (environ celle d’une mouche) et celle de la chrysope sont environ celles des photos ci dessous. L’image de la cécidomyie, en revanche, est grossie environ 10 fois. Elle ne mesure que quelques millimètres seulement, ce qui explique pourquoi elle est difficile à observer (et encore plus, à photographier).

D’une efficacité moyenne, les coccinelles, les staphylins, les forficules et certaines espèces d’acariens et de punaises.

Les coccinelles :

Les aphides (les pucerons) sont leur nourriture favorite. Les statistiques concernant leur appétit varient selon les auteurs : de 50 ou 70 insectes par jour, pour larves et adultes, respectivement, à 80 ou 100. Les espèces plus petites se nourrissent également d’acariens ou de cochenilles.

 Les staphylins :

Ils sont généralement noirs et de forme très allongée. Larves et adultes sont polyphages. Ils se nourrissent d’acariens, de pucerons et de larves de diptères. Leur abdomen rappelant celui du scorpion, il n’y a pas de surprise qu’ils soient moins populaires que les jolies coccinelles ! L’université catholique de Louvain a conduit une étude expérimentale sur l’efficacité des staphylins en lutte biologique contre les pucerons qui a conclu à leur grande efficacité.

 Les forficules :

Nous avons déjà plaidé la cause des forficules (de son petit nom ‘forficula auricularia’), bien méprisés en général. Des études, en particulier celles menées par l’INRA, au centre de recherche d’Avignon, ont pourtant montré leur action prédatrice contre les pucerons.

Voir la vidéo sur les forficules

Les acariens :

Les acariens ont bien mauvaise réputation, et souvent à raison puisque cet ordre d’insectes comprend les redoutables tiques et l’araignée rouge (Panonichus ulmi), un parasite important des arbres fruitiers. Mais certains acariens comme les trombidions ((Trombidium sp) vivent sur les plantes et chassent les pucerons et d’autres acariens ravageurs. Leur appétit n’est pas énorme, mais ceci est compensé par leur capacité de prolifération. Il sont difficiles à identifier en raison de leur petite taille et on les confond souvent avec les araignées rouges.

Les punaises :

Quant aux punaises, l’ordre des hétéroptères est si fourni qu’il regroupe aussi bien des insectes très indésirables que certaines cousines, comme la punaise translucide, que les arboriculteurs québécois considèrent comme prometteuse dans la lutte intégrée (Revue Vertigo Volume 2 Numéro 2, octobre 2001). 

Les photos ci dessous montent un forficule, appelé familièrement perce oreille (à gauche), un staphylin trouvé sur le site www.salamandre.net au milieu et, à droite, un acarien s’attaquant à un puceron, trouvé sur le site www.galerie-insecte.org , deux sites participatifs spécialisés sur les insectes et que je vous recommande au passage.

De tous ces insectes, seules les coccinelles sont appréciées des jardiniers, peut être parce qu’elles sont si jolies et ont l’air tellement inoffensives. Les autres insectes cités sont pourtant tout aussi efficaces, mais ils font souvent peur et sont les victimes de préjugés.

Comment inviter ces auxiliaires dans son jardin ?

Le jardinier sait donc souvent assez peu de choses sur le monde des insectes et leurs multiples interactions. Alors, comment faire pour laisser un équilibre naturel s’instaurer. Dans le doute, on est bien souvent tenté d’intervenir car certains insectes sont parfois des auxiliaires prédateurs à un moment de l’année, pour devenir ravageurs à d’autres.

 Dans leur livre ‘Coccinelles, primevères, mésanges… La nature au service du jardin‘ ( Terre Vivante, 2008), Denis Pépin et Georges Chauvin offrent une mine de renseignements pour nous aider dans cette démarche de jardiniers naturalistes et nous permettre d’aménager des espaces du jardin favorables aux auxiliaires. Ils citent en particulier les plantes ‘hôtes’ favorites à chaque insecte.

Le mot de la fin : la patience. Il ne faut pas raisonner à court terme mais essayer d’instituer un équilibre stable. Même si chaque insecte ne nous est activement « utile » qu’à une certaine période de l’année, il faut lui permettre de conduire à son terme son cycle de reproduction. Il faut donc procurer gîte et nourriture toute l’année pour favoriser son installation durable. Ce sera l’objet d’un prochain article. Nous vous expliquerons également comment soigner la biodiversité de votre jardin.

Le stage du Jardin des Merlettes intitulé « maladies et ravageurs » est une initiation à la lutte intégrée au jardin et, en particulier, au jardin fruitier. Il a lieu deux fois par an, au printemps et en automne, des moments où la pression des ravageurs et des maladies se fait intense. Ne vous laissez pas rebuter par le titre, c’est très amusant et vous vous passionnerez vite pour le monde des insectes.