S1 E9 Podcast : Éloge des pivoines en sol argileux

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On a parlé dans cette chronique (Saison1 E4) des milieux dans lesquels poussent les plantes vivaces. En particulier, on a rappelé que pour qu’une plante pousse bien, il faut avant tout que le milieu dans lequel elle a été plantée lui soit adapté.
Pour avoir un jardin bien fleuri et sans souci, l’élément primordial est donc de trouver les plantes qui sont adaptées à ses conditions particulières et, si l’on veut être tout à fait tranquille, de se limiter à celles-là. Par une sorte d’auto-découragement, on associe souvent le fait qu’une plante soit très belle avec des difficultés éventuelles de culture. Mais ce n’est pas du tout vrai. Les orchidées Vanda, par exemple, poussent sans restreinte dans les forêts tropicales de Taiwan et les gardénias et les tubéreuses dans les jardins de Louisiane. Elles ne sont pas difficiles à faire pousser. Ce sont les conditions dans lesquelles elles se plaisent qui sont difficiles à réunir. Ce n’est pas la même chose.
Beaucoup plus près de nous, mais tout aussi belle et précieuse, je voudrais parler aujourd’hui d’une plante à laquelle on ne pense pas très souvent, et bien à tort, la pivoine.

S1 E4 Podcast : La culture des plantes vivaces

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Aujourd’hui, nous nous intéressons aux plantes vivaces, des plantes qui sont très à la mode depuis longtemps dans les jardins anglais mais qui n’ont pas encore tout à fait gagné leurs lettres de noblesse dans les jardins français. La façon de concevoir les jardins a beaucoup évolué ces dernières années. Les jardiniers recherchent des solutions pour faciliter l’entretien de leurs jardins, des solutions qui soient compatibles avec des pratiques jardinières respectueuses de l’environnement, tout en permettant d’avoir un jardin intéressant et fleuri un peu tout le temps. Et les plantes vivaces sont une excellente alternative à tous ces égards.

Mais qu’est-ce que c’est que ces ‘plantes vivaces ? Comment peut-on les utiliser au jardin et installer un parterre. Lesquelles choisit on ? Et à quoi faut-il faire attention ?

S2 E4 Podcast : Zoom printanier sur les tulipes

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Un petit cadeau de Pâques, pour vous tous, amis auditeurs confinés. C’est le printemps, les oiseaux chantent… et d’ailleurs on les entend beaucoup mieux maintenant que le bruit des moteurs s’est tu un peu partout. C’est donc le moment de descendre au jardin et d’admirer tout ce qui pousse. Oui, le propos est cruel pour ceux qui n’ont pas de jardin où se promener. Mais au printemps, les bulbes sont rois et parmi ceux-ci, les tulipes ont une place toute particulière. Leurs couleurs éblouissantes sont le témoin de la vie retrouvée au jardin et une nouvelle surprise chaque année. Et puis, des tulipes, en ce moment, il y en a même dans les plus petits parterres, donc tout le monde peut les admirer.


Arrêtons-nous un instant sur le mode de croissance et la culture des tulipes

Mode de croissance :

Cycle de vie du bulbe
La tulipe est modeste. Après sa floraison, elle se dessèche lentement et, environ début juillet, disparaît complètement… pour reparaître au printemps suivant. En fait, la tulipe est une plante vivace, grâce à son bulbe justement. C’est à dire que bien soignée, elle refleurira au jardin année après année. Mais alors que pour la plupart des plantes vivaces l’endroit névralgique se situe juste au niveau du sol, pour les tulipes, narcisses et autres plantes bulbeuses, c’est le bulbe installé dans la profondeur du sol qui constitue une réserve de nourriture et qui est fondamental. De la façon dont le bulbe évolue dépend la renaissance de la plante ou son dépérissement et parfois même sa multiplication, si la plante se naturalise.

Reprenons donc :

La tulipe fleurit au printemps en puisant dans les ressources de son bulbe. La plante pousse, une fleur s’épanouit puis fane. Mais les feuilles continuent de pousser et elles nourrissent, elles rechargent le bulbe grâce à la photosynthèse.
Bien soignées, c’est à dire si les tulipes sont arrosées en fin de printemps et qu’on leur apporte un peu d’engrais organique, le bulbe grossit d’année en année ou, selon les variétés, se divise et produit des bulbes secondaires.
Puis, vers le mois de juillet, la plante entre en dormance, les feuilles se dessèchent et peuvent être retirées du sol et placées dans un endroit sec en attendant d’être replantées en automne.

Si on a laissé la tulipe en terre, elle se réveille en automne quand le sol commence à être bien humide et les racines commencent à pousser. On ne voit rien, bien entendu car cela se passe dans la profondeur du sol. Cependant, il est sûrement arrivé à beaucoup d’entre vous de déterrer des tulipes (ou des narcisses) quand vous nettoyez vos parterres en octobre . Et vous avez sans doute été étonnés de voir que des racines poussaient déjà en couronne à la base du bulbe. Ce processus s’arrête quand la température baisse pour reprendre au printemps suivant. Et souvent, on n’a pas une seule mais deux, ou trois tulipes car les tulipes sont capables de se multiplier si elles se plaisent là où on les a installées, comme on l’a expliqué tout à l’heure.

Comment aider les tulipes à bien pousser ?
Compte tenu de leur mode de croissance et de développement, en particulier l’importance de la photosynthèse dans leur processus de régénération, il faut planter les tulipes en plein soleil.

Également leur offrir un sol favorable. Tous les sols conviennent à condition d’être bien drainés. Nous pouvons constater la différence entre le Jardin des Merlettes à Cosne, dans le val de la Loire où le terrain est léger et sableux et les tulipes magnifiques et le  Jardin des Merlettes à Saint Loup où le sol argilo limoneux est très hydromorphe par endroit et ne leur convient pas du tout.

On l’a déjà dit, mais c’est très important, il faut penser à les nourrir et à les arroser quand elles rechargent leur bulbe, après la floraison.

Tous ces soins sont très simples, pour un très joli résultat.

La plantation

Parlons un instant de la plantation

Période de plantation 
Le mois d’octobre est idéal pour commencer la plantation des bulbes, c’est à dire plus tôt que ce que l’on imagine en général. Le sol a été bien arrosé par les pluies d’automne et les racines peuvent commencer à pousser et les bulbes à s’installer.

Profondeur de plantation
On recommande de planter à une profondeur suffisante, c’est à dire trois fois la hauteur du bulbe avec un minimum de cinq centimètres. Cette plantation profonde retarde un peu la croissance la première année mais permet aux racines de ne pas être en concurrence avec les plantes adventices de surface. Cela protège également le bulbe des chocs thermiques car le sol est un bon isolant. Il faut penser dès la plantation à une possible canicule l’été suivant.

Distance de plantation
Une autre décision à prendre : à quelle distance planter ? Voilà un grand sujet. Et il y a autant d’avis sur la question que de jardiniers ! En général, on recommande de créer un effet de masse, une nappe de couleur. Mais je me souviens d’un parterre dans un jardin au pays basque : une seule tulipe, bien placée et le tableau était parfait.

La question des distances de plantation se présente différemment selon que l’on parle d’un parterre où il n’y a que des bulbes ou d’un parterre ‘mixte’, c’est à dire une association de bulbes et de bisannuelles ou de bulbes et de plantes vivaces. Les plantes annuelles n’entrent pas vraiment en ligne de compte car elles commencent en général à pousser au moment où les tulipes entrent en dormance donc elles ne sont pas en concurrence avec les bulbes ni pour la lumière ni pour l’espace au sol.

Alors, combien de bulbes au mètre carré ? Les recommandations des professionnels paraissent parfois énormes. A titre d’exemple, la société De Boer, un spécialiste néerlandais des plantes à bulbes, recommande de planter environ 60 à 120 (oui, j’ai bien dit 120) tulipes au mètre carré selon les variétés. Un peu interloquée, j’ai fait l’expérience de compter les fleurs dans quelques massifs plantés en mosaïque et, effectivement, je peux confirmer que, pour obtenir  un joli effet visuel, il faut planter beaucoup beaucoup de bulbes au mètre carré si vous ne plantez que des tulipes ou des narcisses, par exemple.

Protection pendant la période de dormance et gestion du parterre au fil des ans
Il y a d’autres bonnes raisons de planter ainsi les bulbes en taches bien denses. Cela a à voir avec le travail du jardinier. D’abord, il est moins fatigant de ne préparer que de petits espaces. Mais aussi et surtout, cela permet de repérer où les bulbes sont plantés pour ne pas les arracher durant la période de dormance et ne pas non plus marcher dessus en début de printemps. Certains jardiniers plantent des muscaris autour de leurs taches de tulipes car ces plantes présentent l’avantage d’avoir des feuilles en automne, contrairement aux narcisses et aux tulipes, et sont donc très facilement repérables.

Protection contre les ravageurs
Si votre jardin est près de la campagne, vous rencontrerez peut être également des problèmes avec les campagnols qui adorent certains bulbes et les mangent : au Jardin des Merlettes, nous avons ce souci pour les crocus et les tulipes. A noter que les campagnols ne s’attaquent pas aux narcisses. Contre ces bestioles, nous utilisons une stratégie dissuasive toute simple. Au moment de la plantation, nous installons une petite poignée de cheveux dans le trou de plantation de chaque bulbe. Oui, des cheveux, gracieusement offerts par notre coiffeur qui nous en balaie un sac au moment des plantations. Peu importe la force, la taille ou la couleur des cheveux, naturelle ou pas, le système fonctionne très bien et les petits animaux ne s’approchent plus de nos bulbes.

Comment choisir ses tulipes ?

Un reproche souvent adressé aux tulipes concerne la courte durée de leur floraison. Elle dure si peu de temps, deux semaines à peine, alors, pourquoi se préoccuper de mettre des tulipes au jardin ?

C’est mal raisonner et on a déjà évoqué ce sujet dans le podcast dédié aux pivoines à qui l’on fait le même reproche, un reproche que l’on pourrait aussi adresser à la plupart des plantes et arbustes fleuris du jardin. Certes leur floraison est courte mais la beauté des tulipes, les couleurs extraordinaires qu’elles apportent au jardin, valent bien qu’on se donne un peu de peine. De plus, comme pour les pivoines, en choisissant correctement les variétés, on peut allonger notablement la durée de la floraison. Je vous propose de passer un petit peu de temps sur ce sujet.

Vous pouvez facilement trouver dans les jardineries des bulbes de tulipes de 4 catégories différentes dont la floraison s’étale entre la mi-mars et la fin avril. Il suffira de mélanger les bulbes des quatre catégories pour avoir une longue durée de floraison au jardin. 

Les tulipes kaufmanniana
Ce sont les plus précoces, au mois de mars. Leurs tiges sont courtes, 15 à 25 cm. Le bouton est étroit et allongé. On les appelle aussi parfois tulipes nénuphars, peut-être parce que, comme les nénuphars, leurs corolles s’ouvrent au soleil, pour nous laisser découvrir des couleurs plus vives au cœur de la corolle. Elles se naturalisent facilement et forment un tapis très coloré et gracieux. Parmi un grand nombre de variété disponibles, j’aime particulièrement :

  • Corona (15 cm) d’un jaune safran au cœur tout rouge (rien à voir avec le corona virus, évidemment !)
  • The First (20 cm, un peu plus haute) blanche et rouge
Tulipe kaufmanniana

Les tulipes greigii
Elles fleurissent de la fin mars à mi-avril. Elles sont un peu plus hautes et beaucoup plus trapues que les kaufmannianas : 20 à 25 cm. Leur feuillage est marbré de pourpre. J’aime particulièrement :

  • Ali Baba (20 cm), d’un rouge magenta superbe
  • Pinocchio (très courte, 15 cm) aux tépales très allongés, acuminés
  • Mary Ann (plus haute, 25 cm) crème et rouge, au feuillage fortement marbré
Tulipe à pétales acuminés

Les tulipes fosteriana
Elles fleurissent de la fin mars à mi-avril et sont beaucoup plus hautes que les greigii ( 35 à 40cm). Ces tulipes assez précoces à grandes fleurs aiment le soleil et surtout être abritées du vent. Je vous propose :

  • Apricot Emperor (bien haute, 40 cm), d’une jolie couleur abricot, comme son nom l’indique
  • Purissima (également 40 cm) une variété qui réussit toujours

Les tulipes simples hâtives :
Elles fleurissent tout au long du mois d’avril et produisent des tiges très solides, de 30 à 35 cm de haut. Par exemple :

  • Apricot beauty : encore une couleur abricot, c’est vrai, mais tellement jolie ! Vous ferez durer le plaisir si vous en plantez quelques-unes parmi les fosteriana ‘Apricot Emperor’
  • Red Paradise : d’un rouge magenta éclatant.
Tulipe simple hâtive

Et puis, il y a encore une catégorie ‘hors norme’ de tulipes qui n’ont pas été obtenues par hybridation dans la filière horticole. Je veux parler des tulipes dites ‘botaniques’. Ce sont des tulipes qu’on a ‘trouvées’ dans différents pays du monde et qui sont restées en l’état. Elles sont souvent assez précoces, pas très hautes, à tiges parfois un peu graciles. Beaucoup d’entre elles portent plusieurs fleurs sur la même tige. Leurs couleurs sont souvent moins éclatantes que celles des tulipes horticoles. Elles présentent un grand intérêt pour le jardinier amateur qui aime cultiver une certaine liberté dans son jardin car elles se naturalisent très facilement. Donc, elles se multiplient facilement au jardin et se déplacent vers les endroits qui leur conviennent le mieux.
Pour revenir sur la façon de planter et, en particulier les distances de plantation, on comprend bien qu’elle ne sera pas la même selon les variétés de tulipes que l’on aura choisies. La densité maximum sera de 120 tulipes au mètre carré pour les tulipes botaniques et la minimum de ‘seulement ’60 pour les tulipes simples tardives. Il faut noter aussi que, s’il est tout à fait courant d’avoir des parterres uniquement composés de tulipes simples tardives, en revanche, un parterre de tulipes botaniques n’est pas d’un grand effet, compte tenu du faciès de ces plantes. Elles ont à mon avis absolument besoin d’être complantées avec d’autres bulbes ou plantes qui les mettront en valeur, comme c’est le cas dans leur milieu naturel, en Toscane, dans les collines autour de Florence. Pensez en particulier aux plantes couvre sols : pervenche, violettes, Épimedium ou millepertuis, selon l’effet plus ou moins dense que vous souhaitez obtenir.

Voilà pour ces jolies fleurs que nous espérons que vous apprécierez autant que nous. Retrouvez nous sur notre site si vous voulez obtenir plus d’information ou vous renseigner sur nos prochains stages de plantations. Et pensez à mettre une appréciation sur ce podcast. Cela nous encourage et nous aide.

Très joyeux week end de Pâques à tous, envers et en dépit de tout.

S2 E5 Podcast : Préparer les floraisons de l’été

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Dans ce podcast, nous vous proposons de réfléchir à la préparation d’une seconde saison de floraison magnifique dans votre jardin, celle de l’été. Elle est parfois un peu négligée pour ne pas dire totalement oubliée, tout simplement parce qu’on est très occupé par la préparation de la floraison de printemps et qu’il ne reste pas autant d’énergie pour s’occuper de la suite. Mais heureusement, une fois la saison de printemps bien organisée au jardin, les floraisons se renouvellent d’année en année (à quelques détails près, comme le remplacement de quelques bulbes) et on peut porter son attention sur la saison suivante.

Agapanthes et fuschia

Dans le podcast précédent nous vous avons recommandé quelques arbustes particulièrement beaux en été et trois autres podcasts ont été consacrés aux belles roses de l’été. Cette fois ci, nous vous proposons de compléter votre tableau estival en explorant la strate herbacée, celle des parterres de fleurs annuelles, bisannuelles et vivaces.

Je vous rappelle rapidement les différences entre ces trois catégories qui sont expliquées plus en détail dans le podcast consacré à la culture des plantes vivaces.

  • La plante annuelle effectue la totalité de son cycle de vie en une année seulement. Une graine germe en début de printemps, la plante pousse et fleurit. Quand la fleur se fane, son pistil grossit et les graines qu’il contient mûrissent. A maturité, il libère ces graines qui tombent au sol ou sont emportées par le vent ou les oiseaux et la plante meurt. L’année suivante, le cycle se répète. Parmi ces plantes éphémères, les cosmos, les soucis, les nigelles de damas, les pois de senteur et beaucoup d’autres.
  • La plante bisannuelle met, elle, deux ans à accomplir son cycle. La première année, la graine germe, comme dans le cas d’une plante annuelle. Mais la plante ne fleurit pas. Elle développe simplement une corolle de feuilles au ras du sol. En hiver, cette corolle gèle mais seulement partiellement. Dès les beaux jours, elle recommence à pousser à partir de son bourgeon central et produit cette fois une hampe florale qui portera des graines puis se dessèchera à son tour. Fin de l’histoire. Dans cette catégorie, les digitales, les campanules, les giroflées, les pavots, les roses trémières, les carottes… et beaucoup d’autres ! Ne soyez donc pas désolés si les graines que vous avez semées et qui ont bien poussé ne produisent pas de fleurs. Un peu de patience… jusqu’au printemps prochain et vous serez largement récompensés. Entre temps, vous pouvez déplacer les plantules en excès pour enrichir d’autres parterres ou faire plaisir à des amis.
  • La plante vivace, elle, perdure et se renforce d’année en année. Même si pour beaucoup elles sont, elles aussi, issues d’une graine à l’origine, une fois établies, ces plantes ne meurent pas. Elles possèdent un système racinaire qui stocke des réserves et est capable de les emmener de saison en saison. En hiver, la partie aérienne de la plante gèle car elle n’est pas ligneuse et ne peut donc pas résister au froid. Mais le bourgeon central de la plante perdure car il est pour partie enfoui dans le sol, à l’abri du gel. Au printemps la plante recommence à pousser dès que les conditions lui sont favorables. Si vous souhaitez en savoir un peu plus sur les spécificités des plantes vivaces et leur culture, je vous recommande notre podcast de la saison 1 intitulé ‘La culture des plantes vivaces’.

Puisque ces différentes catégories de plantes, annuelles, bisannuelles et vivaces, ont des modes de croissance très différents, on comprend bien qu’on ne peut pas les soigner toutes de la même façon. En particulier, pour le sujet qui nous intéresse aujourd’hui, c’est à dire la préparation de nos parterres pour cet été tout proche, il va falloir s’adapter aux besoins particuliers des différentes variétés de plantes.

Les plantes annuelles et bisannuelles

Vous pouvez acheter des plantes en godets et les transplanter. C’est assez coûteux, mais rapide et assez sûr.

Un jour ou l’autre, de toutes façons, vous prend l’envie de vous essayer au semis. Et c’est maintenant la bonne saison pour beaucoup de fleurs : fin du printemps, début de l’été.

Si vous n’avez pas l’habitude de faire des semis, considérez le résultat que vous souhaitez. Si vous voulez un parterre un peu naturel, vous pouvez semer en place et éclaircir lorsque le semis a levé, c’est à dire arracher délicatement les plantules en surnombre. Si vous souhaitez quelque chose de plus ordonné, vous semez en godets, vous éclaircissez et vous repiquerez en place après les dernières gelées de mai . Cette deuxième méthode permet aussi de démarrer les semis plus tôt, dans une terrine que vous garderez à l’abri, dans une véranda par exemple.

Parmi les plantes les plus faciles à semer, les soucis (calendula), les coquelourdes des jardins (lychnis coronaria ) roses ou blanches, les campanules à feuilles de pêcher (campanula persicifolia) blanches ou bleu indigo, les digitales, les pavots, les œillets de poète en mélange. Mais il y en a bien d’autres. Quand vous aurez acquis un peu d’expérience, vous deviendrez ‘accros’ aux semis car ils comportent un côté magique. Souvenez-vous toutefois des deux règles d’or que nous répétons tout le temps dans ce podcast :

  • D’abord, assurez-vous que le sol où vous semez correspond bien aux besoins de la plante que vous souhaitez faire pousser et préparez le en conséquence en l’éclaircissant si besoin. Vous noterez que je ne dis pas, exprès, ‘en le nettoyant’ car ces herbes qu’on dit mauvaises n’ont rien de sale, elles sont juste envahissantes et feraient de la concurrence aux jeunes plantules de vos semis. Vous pouvez griffer le sol légèrement ou au contraire le dégager complètement. Je vous rappelle que lorsque vous avez ainsi dégagé un parterre, il arrive le plus souvent, surtout s’il y a eu un peu de pluie, qu’une cohorte de plantules poussent dans les quinze jours suivants. Cela est dû à toutes les graines du sol que vous avez remontées à la surface en désherbant. Le phénomène s’appelle un ‘faux semis’. Il faut arracher toutes ces petites plantes si possible avant de semer. C’est en général très rapide à faire, dans le sol que vous avez préparé et qui est bien meuble.
  • Ensuite, deuxième règle d’or, notez l’emplacement de vos semis sur le plan de plantation que vous élaborez pour votre jardin. Gardez la trace de ce que vous faites. Sur le plan, en notant soigneusement les références des graines (et où vous les avez achetées) mais aussi sur place avec des tuteurs ou tout autre moyen de votre choix. Ce propos semble peut-être évident, mais vous constaterez vite qu’on se laisse dépasser par la situation. D’un mois sur l’autre on ne se souvient pas bien de ce que l’on a semé et où… et parfois on replante ou on ressème au même endroit. Le résultat peut être très joli, ou pas.

Les plantes à bulbes

Il en existe beaucoupque vous pouvez encore planter fin mai, si vous les trouvez en jardinerie : par exemple les dahlias, glaïeuls, gladiolus, bégonias, renoncules et freesias et vous obtiendrez une belle floraison fin août. En revanche, il est trop tard pour planter les lys et couronnes impériales qui fleurissent plutôt en fin de printemps, en ce moment.

Après la floraison, on laisse tranquillement les bulbes ‘se recharger’ comme on l’a décrit dans le podcast consacré aux tulipes. L’avantage de les laisser dans le sol, en plus de nous épargner la peine de les planter de nouveau, c’est qu’ils grossissent et se multiplient par division des bulbilles (pour les glaïeuls) ou des cayeux (pour les lys). On peut se contenter de les arracher tous les 3 ou 4 ans et les trier par gabarit pour des floraisons plus homogènes. Certains bulbes sont toutefois trop fragiles pour rester en terre pendant l’hiver. C’est le cas des dahlias. En plus d’un problème de température, cela dépend aussi de la nature du sol du jardin (encore lui). Au Jardin des Merlettes dont le sol est détrempé une grande partie de l’hiver, il faut absolument arracher les dahlias en fin de saison et les conserver à l’abri jusqu’au printemps suivant. Laissés dans le sol, ils y pourriraient. En revanche, les glaïeuls résistent bien. Certaines variétés de lys s’accommodent très bien de cette humidité, par exemple le lilium regale African Queen, mais d’autres disparaissent dès l’hiver suivant, par exemple le lys de la madone (lilium candidum) et un certain nombre de lys martagon, ces splendides lys qui portent sur une tige très haute de nombreuses fleurs à long tépales récurvés, en forme de turban , roses foncé ou orange. Ces variétés ont juste horreur d’avoir les cayeux dans l’eau en hiver.

Lys Martagon

Les plantes à rhizomes ou à griffes

Ce n’est pas non plus le moment de les planter car elles sont actuellement en pleine végétation. Les iris et hémérocalles par exemple s’arrachent, se multiplient et se replantent au mois de juillet et les eremurus en automne. Une fois installées, vous pourrez ensuite laisser la plupart de ces plantes en terre d’année en année et elles formeront une ossature pour vos parterres des étés à venir. Bien entendu, plus il y a déjà de choses en place, plus le travail est simplifié chaque année au moment de préparer les parterres d’été. Mais les cannas, comme les dalhias, sont trop fragiles, pas assez ‘rustiques’, et ne supportent pas le froid de l’hiver. Vous les arracherez donc lorsque leurs tiges auront séché en automne. Vous les diviserez et les stockerez dans un lieu sec (mais pas trop) où ils passeront l’hiver et vous les replanterez au printemps, au moment où vous verrez apparaître de nouvelles petites pousses sur les bulbes.

Alstromères, Phlox, rosier, asters et hydrangea ‘Annabelle

Et enfin, parlons des

Les plantes vivaces qui ont un système racinaire fasciculé ou pivotant, plutôt qu’à réserve,

Elles peuvent être transplantées en cours de saison c’est à dire à partir du mois de mai, quand le sol est bien réchauffé et le risque de gelées matinales écarté, et jusque bien avant dans l’été, en évitant les journées de canicule, bien entendu. Théoriquement, on pourrait également les transplanter en septembre et octobre mais au Jardin des Merlettes nous avons constaté une moins bonne reprise des plantes en automne qu’au printemps ou en début d’été.

Il y a deux possibilités pour les plantes vivaces : on les multiplie en divisant des souches existantes (dans notre jardin ou chez les amis) ou on achète des godets. Si vous choisissez de préparer vous-même vos plants, idéalement, vous passez par une étape ‘multiplication’ qui prendra un an. Vous divisez un plant et replantez les morceaux dans des petits godets que vous mettez en pépinière. Vous les mettrez en place, dans vos parterres, l’année suivante, lorsqu’ils auront développé un bon système racinaire qui leur permettra de démarrer très vite, c’est à dire de prendre rapidement du volume et de résister ainsi aux intempéries mais aussi aux petites bêtes qui pourraient avoir envie de venir les déguster.

Deux conseils importants :

1- Quand on transplante une plante vivace, on lui enlève presque toutes ses feuilles pour limiter l’évapotranspiration qui déshydrate la plante. Cela permet aux racines de s’établir rapidement. Vous savez que la plantation a réussi lorsque les feuilles recommencent à pousser. Parmi les plantes les plus faciles à multiplier : les géranium vivaces, les rudbeckias, heuchères, héléniums et toutes les variétés d’asters. Ils grossiront d’année en année. Lorsque la touffe devient envahissante, on recommence l’opération. Soit on sépare à la bêche des fragments en pourtour de touffe, soit on arrache complètement la touffe. Puis on la divise et on prépare des plants pour de futures plantations.

Le deuxième conseil est

2- d’Installer une petite pépinière dans votre jardin (pépinière se dit ‘nursery’ en anglais, ça dit bien ce que ça veut dire).

Pour cela, vous choisissez un endroit protégé du vent et un peu ombragé. Vous creusez un sillon large d’environ 50 à 60 cm et, si vous pouvez en obtenir, vous le remplissez de sable. Vous installerez les uns à côté des autres dans cette jauge les godets que vous aurez préparés, bien serrés pour ne pas perdre de place et comblerez les espaces entre les pots par du sable sur toute la hauteur des godets. Cela les protège du froid, du chaud et de la sécheresse car le sable retient bien l’eau et il vous suffira d’arroser la pépinière de temps en temps. Si vous n’avez pas de sable, utilisez de la terre de jardin, tout simplement.

Attention, l’épisode ‘pépinière’ ne doit durer qu’un an, ou deux au maximum. Ensuite, la plante a formé un réseau de racines trop important pour le pot dans lequel vous l’avez installée au départ et elle commence à dépérir, faute de nourriture. Veillez donc à bien gérer la quantité de godets que vous préparez et faites le vide régulièrement dans votre pépinière, ce qui, par la même occasion, créera de l’espace pour de nouvelles plantes.

Vos choix sont faits, les plantes sont prêtes, il vous reste à accomplir le travail le plus agréable (à mon avis) : La plantation

Et aujourd’hui, nous n’allons parler que d’une seule chose : l’organisation spatiale du parterre. Il y a beaucoup d’éléments à prendre en compte mais deux sont particulièrement importants pour la composition de votre tableau : réfléchir à la succession des floraisons tout au long de l’année et prendre en compte la hauteur des plantes.

  • D’abord, comment, dans un même espace, organiser les vagues successives de pousse et de floraison : les bulbes de printemps par exemple seront en pleine floraison au moment de planter ceux d’été. Souvenez-vous qu’il faut laisser les bulbes en place le temps qu’ils se ‘rechargent’. Si vous mettez vos bulbes de printemps en avant du parterre, vous aurez donc jusqu’au mois de juillet un assez triste spectacle de feuilles fanées jonchant le sol. Contrairement à ce qui se pratique souvent, il faut donc planter les bulbes de printemps plutôt en arrière du parterre et les bulbes d’été, devant.
  • Quelle est la hauteur de chaque plante que l’on souhaite installer et quelle pourrait être sa position dans le parterre. Il faut répertorier les différentes hauteurs des plantes que l’on a choisies  et réfléchir au plan du parterre ‘en élévation’, c’est à dire pas seulement au sol mais de façon verticale, comme projeté sur un mur. Cela ne veut pas dire que les plus petites plantes sont forcément devant et les grandes derrière, c’est à vous de voir en fonction des effets que vous souhaitez créer. Mais votre choix doit être réfléchi, comme toujours au jardin. Quelques exemples :
  • Les lys mesurent de 60cm à 2m de haut, l’eremurus mesure 3m de haut. Mais l’eremurus occupe une assez grande place au sol et peut étouffer des plantes plus petites. Ce n’est pas le cas du lys qui ne développe qu’une seule tige et peut donc être utilisé tout à fait différemment, jusqu’en avant du parterre.
    • Les différents variétés d’asters s’étagent de 40cm (pour l’ A. dumosus) à 1,50m (pour l’A. novae angliae). Les sauges sont également de toutes les tailles (environ 10cm pour la sauge cespiteuse et plus d’un mètre pour la salvia azurea, la grande sauge bleue).
    • La verveine des jardins culmine à 60cm environ. Elle s’étiole facilement s’il y a trop de concurrence autour d’elle.

Conclusion

Voilà donc quelques idées pour vos parterres d’été. Bien entendu, ce n’est pas la fin de l’histoire et il y  aurait encore tant de choses à dire. Notre seule prétention aujourd’hui était de vous fournir quelques pistes pour vous aider à réfléchir à ces tableaux que vous créez dans votre jardin. C’est du travail, mais vous en serez bien récompensés. Bonne plantation !

S3 E2 Podcast : Des iris pour tous les goûts

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De toutes les figures héraldiques du Moyen Age, aucune n’est plus répandue que la fleur de lys, qui symbolise à la fois le pouvoir royal et la protection divine. Cette symbolique se retrouve dans les plus anciennes civilisations, en Égypte et en Inde, comme signe de vie et de résurrection. Or, à y regarder de plus près, il ne s’agit pas d’un lys mais plutôt d’un iris et plus particulièrement de l’iris des marais (Iris pseudoacarus) que l’on trouve couramment dans la plus grande partie de l’Europe et de l’Asie.

Beaucoup de jardiniers sont assez catégoriques à propos des iris. Ils les écartent de leur jardin au motif qu’ils sont trop rigides, trop colorés et ne durent pas assez longtemps. J’espère que vous faites partie de ce groupe car je pourrai ainsi tenter de vous convaincre d’installer quelques iris dans votre jardin et vous permettre de profiter, année après année, de leur beauté remarquable. Car il en va des iris comme des pivoines : ces plantes sont des amies fidèles du jardinier. Année après année, elles refleurissent, même si, et cela peut arriver, vous les avez un peu négligées.

Et ça vaut vraiment la peine d’y regarder de plus près. Dire que l’on n’aime pas les iris, c’est comme de dire (pour faire une comparaison digne d’un jardinier) que l’on n’aime pas les abricots sans jamais en avoir goûté un qui a mûri sur l’arbre et que vous avez cueilli vous-même.

Quant à leurs supposés défauts, nous vous ferons la même remarque que pour les tulipes dont nous avons discuté à l’épisode 4 de la saison 2 : tout dépend du soin que l’on prend à choisir les variétés. Là réside le secret de votre succès avec les iris comme avec la plupart des plantes.

(Une grande diversité botanique)

Quand on dit ‘iris’, on parle d’un groupe de fleurs qui sont bien différentes les unes des autres. Il s’agit en effet d’un genre très étendu (210 espèces recensées et un nombre infini de variétés) et de classification botanique particulièrement compliquée. Tous ont en commun des fleurs composées de six éléments : 3 pétales en partie supérieure et trois sépales en partie inférieure et qui retombent plus ou moins selon les espèces. En revanche, la plus grande différence entre les espèces tient à un caractère invisible au premier abord car souterrain : leurs racines. Car, s’il s’agit dans tous les cas de plantes vivaces mais certaines espèces d’iris sont à rhizomes tandis que d’autres sont bulbeux.

Les iris bulbeux comprennent deux sections, les iris Reticulata et les iris Xiphion. Derrière ces noms un peu compliqués se cachent des plantes très familières.

L’Iris reticulata ne mesure qu’environ 15 cm de haut et fleurit dès la fin février, en même temps que les perce neige. Il ne faut pas le confondre avec l’iris nain qui lui est à rhizome. Ses fleurs bleu violet, de 2 à 7 cm de large, portent une tache jaune d’or au milieu de chaque sépale. Ses feuilles commencent à pousser quand la fleur s’épanouit. Elles peuvent atteindre 30 à 45 cm avant de disparaître au début de l’été. L’iris reticulata suit donc exactement le cycle de vie des plantes bulbeuses qui ont besoin de ‘recharger’ leur bulbe en éléments nutritifs grâce à la photosynthèse effectuée par leurs feuilles puis se mettent en dormance jusqu’à l’année suivante. En février encore, l’iris Danfordiae , 15 cm de hauteur, qui s’adapte particulièrement bien aux potées et aux jardins de rocaille.

Les iris Xiphion comprennent, entre autres, les iris espagnols, les iris anglais et l’iris hollandica, un croisement entre iris espagnols et iris d’autres espèces.Dès le printemps ils produisent de longues hampes rigides de 30 à 60 cm qui fleurissent de mi-mai à début juin. En général deux fleurs de 7 à 12 cm par bulbe. Il y en a de nombreuses variétés, bleu, jaune, violet, blanc et des panachés entre ces couleurs. Ils se naturalisent très facilement au jardin et forment vite de belles touffes colorées. Ils sont excellents pour la fleur coupée car ils se tiennent en vase une bonne semaine. Moins connu, l’iris latifolia ou iris des Pyrénées, 40 cm, bleu foncé, fleurit en avril et se naturalise lui aussi très bien. J’insiste sur cette facilité de naturalisation car il en résulte des touffes de fleurs qui se distribuent de façon aléatoire et sont extrêmement décoratives au jardin. Vous êtes toujours libre d’arracher les bulbes en surplus et de les placer ailleurs, ou de les donner autour de vous. Tout disparaît en début d’été jusqu’au printemps suivant sans autre effort de la part du jardinier que quelques apports d’engrais organique.

Parlons maintenant des iris à rhizomes 

Les iris les plus fréquemment cultivés dans nos jardins sont les iris barbus (Iris barbata), appelés ainsi parce que des excroissances de poils groupés en une ligne centrale ornent leurs sépales. Ces ‘barbes’ de multiples couleurs peuvent être particulièrement décoratives. Les iris des jardins sont souvent appelés iris germanica bien qu’ils ne viennent pas tous d’Allemagne. Ils ont une tige très charnue, de couleur vert argenté comme leurs feuilles en forme de lances larges. Ils poussent à partir d’un rhizome charnu et qui doit être l’objet de toutes nos attentions, un élément sur lequel nous reviendrons dans un prochain épisode. Leurs fleurs sont parfois imposantes, jusqu’à 16 cm de largeur et offrent toutes les couleurs de l’arc en ciel. Si les conditions de culture sont favorables, et cela a été le cas en 2021, chaque hampe peut porter jusqu’à 4 ou même 5 branchements comprenant de un à trois boutons qui fleurissent à tour de rôle. Beaucoup d’entre eux dégagent une odeur délicate. Ces iris barbus existent en quatre hauteurs différentes :

  • Les grands iris : de 70cm à plus d’un mètre de haut
  • Les iris intermédiaires (Iris X intermedia) : de 40 à 70 cm
  • Les iris lilliputs : de 25 à 40 cm
  • Les iris nains ou iris pumilla : de 12 à 20 cm

Dans cette catégorie des iris barbus, il faut mentionner l’Iris pallida, aussi nommé Iris de Dalmatie, de couleur indigo clair, dont chaque inflorescence est enveloppée dans une membrane (une spathe) qui ressemble à du papier de soie. Cet iris botanique, c’est à dire naturel, non créé par hybridation, se naturalise très facilement. Il est très important dans l’histoire de l’hybridation car il est à la base de très nombreuses variétés horticoles. On le voit souvent en bordure de route, à la campagne, le long des vieilles maisons.

Également à rhizome, l’Iris de Kaempfer, originaire du Japon, nommé aussi Iris ensata, est une plante semi aquatique qui pousse en terrain marécageux, dans les endroits humides, en position ombragée. Alors que tous les iris dont nous avons parlé jusqu’à présent poussent dans toutes les terres de jardin, cet iris est un peu plus difficile et se plaît particulièrement en bord de rivière. Cependant, il ne doit pas rester toujours immergé. Ses fleurs, très élégantes, sont simples ou doubles à 6 sépales horizontaux. Leurs couleurs vont du blanc pur au pourpre et au bleu foncé. Hauteur : 0,80 cm à 1m.

De tous ces iris, un de mes préférés est un iris du Japon, l’iris frangé, originaire de Chine occidentale. Je cultive depuis des années la variété «confusa». C’est une espèce d’iris non barbu, mais à crêtes, dont les fleurs et le port sont très différents des autres iris. Il craint le soleil et a besoin d’ombre partielle. Il forme un rhizome traçant sous terre, d’où émergent de nouvelles pousses verticales au printemps. Très différent des iris de jardin, Iris confusa déploie son feuillage vert clair en éventail à l’horizontale ou vers le bas. Il porte 5 à 10 fleurs par tige de 40 à 60 cm de hauteur. Elles sont petites et ravissantes. J’ai le souvenir d’une nappe de ces iris, installée je crois à l’ombre d’un grand cèdre, à l’entrée du jardin botanique de Padoue. Les feuilles formaient comme un tapis ondoyant d’où émergeaient les hampes de fleurs.

Iris confusa

Encore plus beau, l’Iris nada, est un croisement entre Iris japonica et Iris confusa. Il porte beaucoup plus de fleurs que l’iris confusa, environ 25 mais parfois jusqu’à 50 fleurs par tige, d’où son nom d’iris papillon.

A découvrir aussi, l’Iris sibirica, est une autre espèce d’iris qui gagne vraiment à être connue. Il a des feuilles plates, étroites, et des tiges ramifiées de 45 à 90 cm de haut. Elles portent plusieurs fleurs, de 7,5 à 10cm, le plus souvent dans des tons de bleus, mais parfois bordeaux, blanches ou violettes. La forme très graphique de ces fleurs et leur longue tenue en vase en fait aussi d’excellentes fleurs à bouquet. C’est cet iris pense-t-on qui a été retenu comme modèle de la fleur de Lys de l’écu royal.

Bien différent, l’Iris spurria est le dernier à fleurir au jardin. D’une hauteur de 80 cm environ, il est admirable par sa robustesse et les couleurs très chatoyantes de ses fleurs. Une idée à suivre pour allonger à moindre effort la durée des floraisons au jardin.

Et, pour conclure cette longue énumération, l’Iris jaune (Iris pseudacorus) dont la tige dressée mesure de 50 cm à 1,50 m de haut et que l’on trouve à l’état naturel sur les rives des eaux dormantes ou courantes, des plaines jusqu’aux montagnes. Il est très facile, très rustique à cultiver et idéal pour créer une zone de transition entre un jardin et la campagne avoisinante.

Je n’irai pas plus loin aujourd’hui, en priant les amateurs d’iris de m’excuser pour toutes les espèces que je n’ai pas citées. Il y en a juste trop, dont certains que je cultive avec un soin jaloux, comme les Iris de Louisiane et les Iris reticulata. Mais j’en ai assez dit au cours de cet exposé pour vous persuader, j’espère, qu’en termes d’iris, il y en a pour le goût de chacun. Nous ne sommes pas tous sensibles aux mêmes attributs. Pour certains, c’est le graphisme de la plante elle-même qui prime, pour d’autres, c’est plutôt la façon dont la plante va apporter une nouvelle dimension à un massif existant.

Si on reprend les critères un par un :

La hauteur est le premier d’entre eux : le choix est très vaste entre les grands barbus ou spurrias jusqu’aux mini pumillas, reticulata ou danfordiae en passant par les iris intermédiaires.

La rigidité ensuite :

Quand on parle de rigidité, on pense avant tout aux grands germanica et barbus. Car les sibirica s’inclinent doucement et ondulent pour ainsi dire sous le vent. Les spurrias sont rigides mais touffus, presque comme un petit arbuste.

Le jardinier est un être bizarre : il se plaint des pivoines qui sont trop hautes et qu’il faut tuteurer. Mais il se plaint aussi des iris qui se tiennent debout tout seuls ! Allez comprendre.

D’ailleurs, on peut aussi considérer la rigidité comme un atout. Car cette bonne tenue de la plante permet d’admirer de loin une touffe d’iris au fond du jardin, pour peu qu’on ait pris le soin de laisser un peu d’espace autour d’elle. En début de soirée, quand les rayons du soleil se font rasants, c’est juste magnifique !

Troisième critère de choix : Les formes des iris offrent maintes options au jardinier, selon le tableau qu’il veut composer :

  • La forme et la couleur des feuilles tout d’abord : gris vert, vert tendre, charnue, gracile…
  • La forme des fleurs : l’iris royal sibirica (le lys de France), l’immense robe du soir des barbus, ou la délicatesse des japonica

Pour la couleur, les iris barbus sont des champions. En revanche, les iris de Sibérie sont parfaits pour border des allées, d’autant que leurs feuilles sont particulièrement décoratives en automne et en hiver, ce qui n’est pas le cas des autres iris.

Pour l’odeur la palme revient sans conteste aux Germanica. Un plus important pour ceux qui cherchent à créer un jardin de senteur. L’iris au parfum poudré est un excellent candidat dans ce domaine.

Enfin, on peut être contraint dans ses choix par les dates de floraison, un sujet sur lequel nous insistons souvent dans ce podcast. Ce n’est pas la peine de planter des variétés qui fleuriront à un moment où vous n’êtes pas dans votre jardin. Les confinements récents ont d’ailleurs apporté quelques jolies surprises à certains amis jardiniers.

Pour vous rappeler la chronologie des floraisons, par exemple, en Bourgogne Val de Loire :

  • Les iris reticulata et iris de Provence fleurissent en février
  • Les iris nains : début avril
  • Les iris de Hollande et les iris intermédiaires : en avril mai
  • Les barbus : de mi-mai à juin
  • Les sibirica et les iris anglais : de fin mai à mi-juin
  • Et enfin les spurrias et les iris d’eau : de la mi- juin au début de juillet

Pour des floraisons ‘courtes’, avouez que cela couvre quand même plus de 4 mois !

J’espère vous avoir convaincus que votre jardin mérite quelques iris bien choisis. La clé de votre succès résulte, comme souvent, dans le choix de l’endroit où vous les installerez, tant pour répondre à leurs besoins de culture : un iris barbu fleurit très peu à l’ombre et un iris confusa doit être protégé des rayons du soleil, que pour l’effet esthétique que vous souhaitez créer. Mon conseil est de planter un exemplaire de nombreuses espèces différentes, c’est-à-dire, iris barbu, sibirica, iris de Hollande, etc.  et de les observer. Quand ils seront bien installés, il faut compter environ trois ou quatre ans, vous verrez de quoi ils sont capables et vous pourrez prendre des décisions de plantation en plus grand nombre… en commençant d’ailleurs par dédoubler vos iris test ! Ce délai vous semble long ? Honnêtement, pas vraiment, quand vous pensez que ces plantes vous survivront probablement. Et puis, n’est-ce pas ce qu’on fait constamment quand on déplace nos vivaces d’un endroit à l’autre, ce qui leur fait d’ailleurs souvent le plus grand bien.